Apparemment, rien d’aussi spontané que la prière : « Je fais comme les enfants qui ne savent pas lire, je dis simplement au bon Dieu ce que je veux lui dire… La prière, c’est un élan du cœur, c’est un simple regard jeté vers le ciel, c’est un cri de reconnaissance et d’amour au sein de l’épreuve comme au sein de la joie… » (sainte Thérèse de l’Enfant-Jésus [1873-1897], Histoire d’une âme, XI).
Le contact surnaturel avec Dieu
Mais encore faut-il que notre Père prenne les devants et « envoie dans nos cœurs l’Esprit de son Fils qui crie : Abba, Père ! » (Ga 4, 4-7). « L’élément essentiel de l’oraison est le contact surnaturel de l’âme avec Dieu, dans lequel l’âme puise cette vie divine qui est la source de toute sainteté. Ce contact se produit lorsque l’âme, élevée par la foi et l’amour, appuyée sur Jésus-Christ, se livre à Dieu, à sa volonté, par un mouvement de l’Esprit Saint. Aucun raisonnement, aucun effort purement naturel ne peut produire ce contact » (bienheureux Columba Marmion [1858-1923], Le Christ, vie de l’âme, II, X). Mais l’expérience montre que ce « mouvement de l’Esprit Saint » a besoin d’être éduqué.
Pourquoi ? Un bébé n’apprend pas à aimer sa mère, mais il apprend à lui parler, faute de quoi cet amour restera infantile. Quand les disciples demandent à Jésus une méthode, il leur apprend le Notre Père. À partir de là, toute méthode d’oraison commence par la prise de conscience de la présence de Dieu, continue par la représentation mentale de Jésus que nous savons réellement présent à celui qui prie, se prolonge par la méditation de ce qu’il nous dit, en nous aidant de sa Parole dans l’Écriture ou la Tradition, pour s’achever par la mise en œuvre de cette parole dans notre comportement.
« Le secret des secrets en l’oraison, c’est de suivre les attraits en simplicité de cœur. (…) La meilleure prière ou oraison, c’est celle qui nous tient si bien employés en Dieu, que nous ne pensons point à nous-mêmes ni à ce que nous faisons. En somme, il faut aller là simplement, à la bonne foi et sans artifice, pour être auprès de Dieu, pour l’aimer, pour s’unir à lui. Le vrai amour n’a guère de méthode » (saint François de Sales [1567-1622], Lettre 1441).
En réalité, il y aura souvent des allers et retours entre oraison méthodique et oraison plus simple : toute relation d’amour alterne paroles et silence, activité et contemplation ; il faut ici se laisser conduire par la grâce : « Je vous prie de bien remarquer que la pratique des pratiques, le secret des secrets, la dévotion des dévotions, c’est de n’avoir point d’attache à aucune pratique ou exercice particulier de dévotion, mais avoir un grand soin, dans tous vos exercices et actions, de vous donner au Saint-Esprit de Jésus, afin qu’il ait plein pouvoir et liberté d’agir en vous selon ses désirs, de mettre en vous telles dispositions et tels sentiments de dévotion qu’il voudra, et de vous conduire par les voies qu’il lui plaira » (saint Jean Eudes [1601-1680], Vie et Royaume de Jésus, VI, 19).