En ces temps de disette énergétique, une interrogation court la presse régionale, assortie de recommandations sur la sobriété écologique : faudra-t-il que cette année, l’esprit de Noël soit vécu « à basse consommation » (Le Courrier Picard) ? Et de mettre en avant telle grande surface, qui exhibe déjà sur sa devanture des décorations de Noël illuminées.
Certes, ce ne sont pas les excès de mairies comme celle de Bordeaux, qui avait préféré un sapin en verre et en acier au traditionnel sapin de Noël géant, sous prétexte qu’il s’agissait d’un « arbre mort ». Et certes, il est vrai que l’esprit religieux et familial de Noël a peu à peu cédé la place à une grande fête consumériste.
Mais cela n’est pas nouveau. Pourquoi donc Noël devrait-il faire les frais de la gabegie énergétique de nos villes le reste de l’année ? Il ne faudrait pas qu’au passage, la nouvelle religion « verte » fasse disparaître toute la culture et l’histoire de notre pays, accentuant ainsi les fragilités d’un individu déraciné et donc plus sensible à la peur.
Nous avons besoin de Noël
Saluons plutôt l’initiative de maires courageux, comme à Bayeux, qui ont choisi de conserver les éclairages de la façade de la cathédrale – en mettant en avant les ampoules led – afin, dit-il, de « garder un air de fête dans nos têtes et [que] la magie de Noël […] reste ».
Qui soutiendra que nous n’avons pas besoin de cette joie qu’offre la venue espérée d’un Sauveur, dans un monde qui s’obscurcit et redevient dangereux, à l’extérieur de nos frontières comme sur notre propre sol ?
On l’oublie souvent, mais l’Avent, qui se distingue justement par la lumière des quatre bougies dans nos églises, marque aussi l’attente du deuxième avènement du Christ, beaucoup plus retentissant celui-là : son retour en gloire, qui surviendra « comme l’éclair » partant de l’orient jusqu’à l’occident, et « avec puissance et grande gloire » (Mt 24-30). Alors interviendra le Jugement des vivants et des morts, comme nous le répétons chaque dimanche dans le Credo. Cela indique bien l’horizon que nous devons désirer avant tout, plutôt que d’être soumis aux injonctions du monde : le Ciel !
Dès lors, ce que nous attendons n’est pas d’abord un charmant poupon dans la crèche – même si l’émerveillement a sa place. Cela, c’était il y a 2000 ans. Ce pour quoi nous veillons, c’est l’attente de notre redressement spirituel : « Votre rédemption approche », affirme la liturgie du premier dimanche de l’Avent.
Enfin, si ce renouveau attendu ne dépend pas d’abord de nos propres forces, nous pouvons y avoir notre part, voire le hâter. Car l’Avent est aussi un temps de pénitence – plus légère que pendant le Carême, mais enfin… Historiquement, la Gaule a même accentué cette tonalité, avant d’être modérée par la liturgie romaine.
Alors nous n’aurons plus besoin des lumières artificielles, comme le soulignait le pape saint Grégoire : « C’est avec raison que le Royaume de Dieu est comparé à l’été, car alors les nuages de notre tristesse passeront, et les jours de la vie brilleront de la clarté du Soleil éternel. »