Tous les maîtres souscriraient à cette réponse générale de saint Augustin (354-430), pour savoir quelle est la bonne solution pour prier : « Quand quelqu’un veut prier, qu’il se mette dans la position qui lui conviendra le mieux à ce moment-là pour s’occuper de son âme. Et quand le désir de la prière vient de lui-même sans qu’on le cherche, quand survient à l’improviste en l’esprit quelque chose qui meut l’affection en des gémissements inénarrables (cf. Ro 8, 26s), en quelque situation qu’on soit, il ne faut pas, pour chercher un lieu retiré, ou la facilité de se tenir debout ou prosterné, différer l’oraison. Car alors par le recueillement l’âme se crée une solitude, et souvent elle oublie dans quel lieu ou dans quelle posture cette inspiration l’a surprise » (À Simplicien).
La meilleure posture
Ceci étant, pour ce qui dépend de nous, la meilleure posture sera celle qui nous aidera le mieux à exprimer par notre corps ce que nous portons dans notre âme : se mettre à genoux aide à exprimer l’adoration, s’asseoir aide à écouter, etc. Pour autant, selon saint Thomas d’Aquin, « les hommes ont recours à des pratiques sensibles, telles que des prostrations, des génuflexions, des exclamations vocales et des chants, non pour éveiller Dieu, mais pour se stimuler eux-mêmes aux choses de Dieu… Nous accomplissons cela afin que par ces œuvres sensibles notre intention soit dirigée vers Dieu et notre amour enflammé. »
Et cela parce que l’homme est indissociablement corps et âme, dans la prière comme ailleurs. D’ailleurs, les anciens étaient beaucoup moins embarrassés que nous par leur corps dans la prière, comme en témoigne saint Ignace de Loyola (1491-1556) : « Je commencerai ma contemplation tantôt à genoux, tantôt prosterné, tantôt étendu à terre, le visage vers le ciel, tantôt assis, tantôt debout, cherchant toujours à trouver ce que je désire… Et si je trouve ce que je désire à genoux ou prosterné, je ne chercherai pas une autre position… » (Exercices spirituels).
Bref, pour saint François de Sales, « la meilleure prière ou oraison, c’est celle qui nous tient si bien employés en Dieu que nous ne pensons point en nous-mêmes, ni en ce que nous y faisons. En somme, il faut aller là simplement, à la bonne foi et sans art, pour être auprès de Dieu pour l’aimer, pour s’unir à lui » (Lettre de 1618).
Prière détendue et simple
Ce qui nous trompe, est que bien souvent nous aurons tendance à mesurer la valeur de l’oraison à ce qu’elle peut avoir de pénible, oubliant qu’elle ne vaut que par l’amour qu’elle exprime. Ne cherchons pas la performance, ni en augmentant démesurément la durée de l’oraison, ni en forçant notre corps à des poses de « saints », ni en confondant le recueillement avec la concentration mentale. La bonne prière doit chercher à être détendue, simple, bref, amoureuse, pour saint Jean d’Avila (1499-1569) : « Pour autant, le corps doit se tenir durant le temps de cette méditation comme la santé le demande, et comme l’âme trouvera la détente qui lui est nécessaire pour s’occuper du Seigneur. »