Vous avez dit « égoïste » ? - France Catholique
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Vous avez dit « égoïste » ?

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Tous ces jours derniers, nous avons évoqué la crise incontestable que traverse l’Europe, à l’épreuve d’une vague de réfugiés, d’une ampleur peu commune. Imaginons que Paris ait été sollicité, comme l’a été Munich, ville emblématique de l’accueil allemand aux migrants. C’est plus de 100000 personnes, hommes, femmes, enfants qu’il eut fallu recevoir, en inventant et créant dans la plus extrême urgence les moyens de leur donner un toit et de les nourrir. L’État, la ville, l’administration, tous les services auraient été désarçonnés. Donc, rien de plus légitime de la part de la République fédérale d’Allemagne que le désir de partager la tâche à l’échelle de l’Europe, non sans avoir, au préalable, défini quelques principes de base de l’action à mener.

Il y eut, en effet, un moment d’euphorie, qui fit croire que l’Allemagne, dans un accès de générosité, était prête à ouvrir ses frontières à toute cette masse de réfugiés. Mais il fallut se résoudre très vite à refouler cette nouvelle illusion lyrique, pour parler comme André Malraux. Non, l’Allemagne ne donnerait pas asile à tout le monde, elle choisirait selon ses propres critères ceux qu’elle garderait sur son territoire et ceux qu’elle renverrait chez eux. On pense notamment à toute une main d’œuvre venue des Balkans, qui pour ne pas être victime d’une guerre inexpiable, n’en souffre pas moins d’une véritable déshérence économique et sociale dans ses pays d’origine.

Bien sûr, il fallait se concentrer sur la question immédiate, et il fallait le faire à l’échelle de l’Europe, qui, du coup, se trouvait brutalement au pied du mur. On semble découvrir aujourd’hui que l’Union européenne, bruxelloise pour dire les choses rapidement, est en manque d’identité, faute d’un véritable projet politique commun. Mais on aurait dû s’en apercevoir plus tôt. Il n’y a pas d’identité de vue en ce qui concerne la politique étrangère ou la défense, domaines essentiels. On accuse les égoïsmes nationaux, mais n’est-ce pas la construction actuelle qui est coupable, en bonne partie, de favoriser l’égoïsme, pour avoir tout conçu en terme d’économie, de marché, de libre échange ? L’Europe est victime de sa propre faiblesse constitutive.

Chronique diffusée sur Radio Notre-Dame le 16 septembre 2015.