Un jour noir pour les socialistes, un vote sanction. Ce n’est pas seulement la droite qui affirmait cela hier, mais les dirigeants socialistes eux-mêmes. Impossible de se réfugier derrière les quelques places fortes emblématiques conservées et qui attestent d’ailleurs d’un phénomène sociologique et idéologique curieux. Ce sont les grandes villes les plus bourgeoises qui manifestent leur ancrage socialiste, alors que des villes à la population plus ouvrière ou plus modeste passent à droite. Cela fait déjà un certain temps que l’on s’attache à définir cette nouvelle catégorie inventée, me semble-t-il, par un sociologue américain astucieux : les bobos, les bourgeois bohèmes, qui tout en bénéficiant d’une situation assez confortable se reconnaissent dans des références libertaires. Il y aurait lieu d’ailleurs d’affiner les observations, car il est possible que dans un même milieu social un nouveau clivage s’installe, avec des groupes qui refusent la dérive idéologique et sociétale et se musclent dans une attitude de résistance.
Peut-être convient-il aussi d’admettre que les lignes bougent à tous égards et que même les vainqueurs ne sont pas forcément complètement à l’aise, ne serait-ce que pour imposer un programme alternatif sur le terrain économique et s’assurer d’une cohérence intellectuelle qui reste problématique. La gauche n’est plus vraiment la gauche, comme l’a montré un critique aussi avisé que le philosophe Jean-Claude Michéa et en regard, qu’est-ce que la droite ? Une droite divisée entre ceux qui se réclament d’un libéralisme orthodoxe et ceux qui se tournent vers l’électorat capté par le Front national.
Il y a aussi cette réalité fondamentale que le pays va mal, que le pouvoir en place se trouve encore plus fragilisé alors qu’il était déjà dramatiquement impopulaire. L’heure est donc à un réexamen global, auquel devraient se livrer ceux qui ont des convictions solides et un vrai sens du bien commun.