En contemplant Louis XIV, c’est nous-mêmes que nous contemplons. À une époque où la crise d’identité emporte individus et nations dans un désarroi dont seuls profitent les manipulateurs de peuples, il est nécessaire de se regarder dans ce qu’on a de meilleur. Oublions les images toutes faites, allons à l’homme tel qu’il fut, dans son temps.
Le petit garçon né des amours difficiles de la belle Anne d’Autriche et du triste Louis XIII devient roi à 5 ans. En tant que roi, il est doublement orphelin : orphelin de père, le roi défunt ; orphelin de Richelieu, le Premier ministre qui, par son père et à ses côtés, avait mené la guerre en France et hors de France.
Abaisser les grands
Deux principes avaient gouverné la politique du « Roi juste et du Cardinal » : abaisser les grands, abaisser la maison d’Autriche. Danger intérieur et guerre civile se conjuguent avec le danger extérieur d’étouffement par les grandes puissances. Toute la politique capétienne est contenue dans ce double mouvement de la sécurité extérieure pour la paix intérieure et du souci de la justice sociale afin de ne pas laisser proliférer dans le pays des germes d’une double insécurité. Qui dira que les choses ont changé ? La maison d’Autriche a fait place aux États-Unis. Les grands ont fait place aux féodalités de groupes, toujours en coquetterie avec la grande puissance menaçante.
Une régence est souvent une catastrophe. Les grands relèvent la tête, trop heureux de sentir qu’elle n’est pas coupée. La guerre extérieure reprend. Pendant quinze ans, la reine et Mazarin vont essayer de sauver l’acquis. Protéger le roi, protéger le royaume. Naviguer, ne pas couler jusqu’à la majorité réelle. L’enfant royal, déjà pénétré de sa majesté, sera ainsi, pendant quinze ans, ballotté d’angoisses en trêves, de fronde en misère, d’un château à l’autre, dans une atmosphère de détresse. Il s’en souviendra toute sa vie.
Un moment d’équilibre
À la prise du pouvoir par Louis XIV, l’état du royaume est tel qu’on a l’impression qu’il doit tout recommencer. Pourtant, ce self made man ne part pas de zéro. Malgré la faute du temps, de la famine, des guerres, des régences, des frondes, d’Hugues Capet à Louis XIV, la France a gagné en taille, en unité, en art de vivre, en conscience. Une communauté a été créée et s’est perfectionnée.
Louis arrive au moment où, par l’effort accumulé des générations, des fruits paraissent, quasi parfaits. Il semble, à ce moment, que le temps doive s’arrêter pour contempler, immobile, l’instant qui résume en lui-même le meilleur de ce qui fut avant lui. Des hommes, des images, des mœurs, des bâtiments incarnent cette immobilité sereine, avant que le décor ne s’efface et que l’incertitude recommence. Louis XIV est arrivé à ce moment. Il a puissamment contribué à le faire jaillir.
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