Vies Passées et Réincarnation - France Catholique
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« Ô Marie conçue sans péché »
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Vies Passées et Réincarnation

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Un jour, j’ai rencontré une jeune femme très douée dont le nom de famille était Avila. Elle m’a dit que dans sa famille on disait parfois en plaisantant que leur arrière-arrière-grand -tante était Thérèse d’Avila. Mais ils ne savaient absolument pas si c’était vrai. Ils pouvaient tout aussi bien descendre de Pedro d’Avila, l’ivrogne de la ville. Ou les deux. Votre ascendance, comme votre famille éloignée, présentent souvent un mélange.

On m’a demandé une fois si je descendais du célèbre capitaine John Smith sauvé par les prières de Pocahontas. J’ai dit : « Un gars qui agace tellement les gens qu’ils veulent le tuer et doit être sauvé par les efforts héroïques d’une femme dévouée : cela ressemble à un de mes parents. » Mais comme Mademoiselle Avila, je n’en ai aucune idée.

Mon hypothèse au sujet de mes ancêtres, c’est qu’ils consistent en un tas de bons-à-rien depuis l’origine des temps. Je pense quelquefois : Mon arrière-arrière-arrière –dix-fois à la puissance quinze arrière-grand-père était Adam, celui qui a tout gâché au commencement. Beaucoup de gens ne le savent pas, mais son nom complet était Adam Smith, mais pas le gars des sciences économiques. Je me retrouve dans une longue lignée de pécheurs et de ratés. Cela a du sens pour moi. Cela m’aide à donner du sens au monde.

Ce qui n’a pas autant de sens pour moi, c’est la notion de vies passées. Quand quelqu’un dit : « Dans une vie passée, j’étais un brillant médecin, » je me demande : « Bon, mais est-ce que cela va vous aider à l’école de médecine maintenant ? » Les gens affirment souvent que dans une de leurs « vies passées » ils étaient un roi ou une reine importante. Les gens disent rarement : « Dans ma vie passée, j’étais un violeur ivre et j’ai été poignardé par une femme que j’attaquais dans une rue de Chicago, alors je dois faire pénitence. »

Une chose qui rend les notions occidentales ersatz de la réincarnation dénuées de sens (par opposition aux notions orientales plus sérieuses et moralement impliquées) c’est que vous oubliez tout de votre vie passée. Vous devez traverser le fleuve Léthé, le fleuve de l’oubli. Ceci est essentiel parce que nous ne nous rappelons généralement pas une vie passée.

Walker Percy discute la perspective d’oublier sa vie dans son livre Lost in the Cosmos/Perdu dans le cosmos. Un homme se réveille ; il est amnésique. Il rencontre une femme entièrement nouvelle qui l’embrasse, de nouveaux enfants intéressants et une nouvelle maison. Ce sont des histoires sur la fatigue de soi-même.

Cette vue fait de la réincarnation un ultime recommencement. Mon ardoise est nettoyée et je recommence. Je me débarrasse de moi-même, deviens quelqu’un d’autre, et me dépêche de gâcher une autre vie. La souffrance que j’ai causée continue, mais je l’oublie simplement et continue à vivre, ardoise propre. Nous ne pouvons rien apprendre par les erreurs de nos vies précédentes si nous ne nous les rappelons pas, s’il n’existe pas de manière d’accumuler la sagesse.

Cette notion occidentale ersatz de la réincarnation est individualiste et ne comporte aucune idée sérieuse de responsabilité morale, elle s’accorde d’une manière suspecte avec les tendances de la culture moderne de gauche. La vue orientale est beaucoup plus rigoureuse moralement ; vous pourriez être réincarné pour le mal que vous faites en limace ou « intouchable ». Vous êtes même responsable des choix que vous ne vous souvenez pas avoir faits en tant que personne que vous n’aviez pas idée que vous étiez. Ceci présente ses propres problèmes, mais c’est une vue sérieuse.

Pourtant, si j’oublie tout ce que j’ai jamais appris, tous ceux que j’ai jamais aimés, quel était le but de cette vie ? Pour moi, c’est la plus grande crainte de toutes. J’ai vécu une vie, et elle est partie. Je ne me souviens de rien ; mes expériences et mes relations sont toutes oubliées, perdues. Et les gens à qui je me suis lié par amour, ils sont partis aussi.

Nous avons besoin d’une notion de ce qu’est la vie après la mort pour que cette vie ait un sens. Mais nous avons aussi besoin d’une idée de la vie après la mort qui ne rende pas cette vie vide de sens.

Pour moi, cela donne plus de sens à cette vie, la vie que je dois vivre à ce moment-même, d’affirmer que mon premier parent a été créé bon, « à l’image de Dieu, » mais qu’il a choisi le mal. Ainsi je découvre en moi-même une division : le bien que je veux faire, je ne le fais pas, et le mal que je ne veux pas faire, je le fais. J’entends « Aime ton prochain comme toi-même » et je dis « C’est comme ça que je veux vivre. » Mais je ne le fais pas. Je deviens égoïste. Alors quoi maintenant ?

La notion chrétienne de la vie après la mort implique la rédemption du péché et la résurrection du corps dans la communion des saints. Je suis uni à ma Source d’Amour. Mais, précisément parce que Dieu est une communion de personnes dans l’amour, le Père n’effaçant pas le Fils ni l’Esprit – unité parfaite dans la diversité, diversité dans l’unité – les chrétiens peuvent croire que nous pouvons être unis à Dieu et aux saints et ne pas nous perdre. Plutôt, je garde tout ce qui est vraiment moi, y compris mes souvenirs et mes relations, sans le péché qui m’oblitère.

Si je traverse une rivière, je veux que ce soit une rivière de purgation. Il y a des résultats du gâchis de mon ancêtre Adam Smith dont je voudrais me débarrasser. Pas des souvenirs ; pas même des souvenirs de péché : j’ai appris par eux et la grâce de Dieu m’a porté à travers eux, alors il faut que je les garde. Mais toutes ces mauvaises dispositions qui m’ont empêché d‘aimer les autres complètement – cupidité, égoïsme, colère, amertume, cruauté, cynisme, paresse, égocentrisme – je serais heureux de m’en débarrasser. En fait, je ne pense pas que je serai vraiment heureux avant de m’en débarrasser moi-même.

Je ne cherche pas une autre vie à gâcher. Je préfère garder celle-ci – et la vivre pleinement.

Source : https://www.thecatholicthing.org/2017/08/02/past-lives-and-reincarnation/

Mercredi 2 août 2017.

Image : Les eaux du Léthé dans les plaines de l’Elysée par John R.S. Stanhope, 1889 (Manchester Art Gallery, Manchester, Angleterre)
(Traduit par Charlotte)