« Un rapport européen accuse la France. » Selon des experts de la Commission européenne, il y aurait lieu de s’inquiéter de l’accroissement des violences racistes, antisémites et islamophobes, en France, alors qu’on assisterait en même temps à une banalisation des discours racistes. J’avoue que ce genre d’accusations a le don de me hérisser le poil. Non que je mette en doute l’existence de pratiques condamnables, que je réprouve moi-même. Mais je suis indisposé par une propagande qui donne le sentiment que le peuple français serait sinon raciste, du moins tenté de succomber à certains travers. Les titres des journaux sont explicites. C’est bien la France qui est accusée. Et quand on parle de la France, on désigne forcément le peuple français en général. Et là, pardon, mais ça ne passe pas. Cette culpabilisation implicite d’un sujet collectif m’indigne, car elle pourrait bien être le reflet d’un racisme inversé.
Le peuple français serait suspect, par principe. Et dès lors tous les maux possibles pourraient lui être imputés. Cela rejoint d’ailleurs un certain discours sociologique, lui-même uniformément accusateur. Toutes les difficultés du pays seraient dues à la mauvaise nature d’une population de Dupont-Lajoie forcément haineuse à l’égard d’autrui. Il y aurait donc une sorte de racisme en France, un racisme anti-immigré, un racisme blanc. L’imprécision d’analyse du rapport européen conforte cette impression dans la mesure où aucune étude sérieuse n’est formulée sur l’origine des actes antisémites ou anti arabes. Je crains que ce genre de procès n’aggrave plutôt qu’il n’arrange nos problèmes, dont la nature est singulièrement complexe. Si l’on veut en avoir une idée un peu plus précise, qu’on aille voir le dernier film de Cheyenne-Marie Caron intitulé Patries. On sera infiniment mieux instruit des difficultés de cohabitation qui ne sont pas unilatérales.
Pour nos procureurs, il n’est qu’un moyen de combattre notre racisme indélébile, c’est l’aggravation de notre législation pour motifs racistes ou homophobes. La boucle est bouclée. On retrouve là ce que Philippe Muray appelait « l’envie du pénal ». Pour mettre le peuple au pas, il faut, disait-il, « le mettre au pas de loi ». L-o-i. Triste illusion, remède illusoire.