Une France américanisée ? - France Catholique
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Funérailles catholiques : un temps de conversion
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Une France américanisée ?

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Palais de justice de Paris

Palais de justice de Paris

© Arthur Weidmann / CC by-sa

La manifestation qui a eu lieu, mardi soir, aux abords du nouveau Palais de justice de Paris constitue un événement d’une singulière signification, non seulement à cause des violences auxquelles il a donné lieu. 20 000 personnes réunies alors que tout rassemblement de foule demeure interdit, c’est déjà un motif de réflexion. Mais c’est surtout la cause de l’événement qui s’impose par sa gravité. Il s’agissait, en effet, de protester, quatre ans après la mort d’Adama Traoré, contre la violence policière qui serait à son origine. Une farouche bataille judiciaire s’est engagée, à coup d’expertises et de contre-expertises, pour savoir si Adama est mort, oui ou non, du placage ventral dont il a été l’objet à la suite d’une arrestation musclée. La police refuse cette interprétation, alors que la famille désigne le racisme policier qui frapperait régulièrement des personnes en raison de leur peau noire.

Mardi soir, la sœur d’Adama, Assa Traoré, en s’exprimant devant la foule rassemblée, n’a pas hésité à annoncer que ce n’était que le début d’une offensive d’importance historique. Il est difficile de prendre parti dans une querelle aussi douloureuse. Comment ne pas comprendre le chagrin et la colère d’une famille endeuillée ? Mais par ailleurs, on peut aussi s’inquiéter des dimensions sociales, politiques et idéologiques d’une affaire qui provoque une émeute, à l’image de ce qui se passe aux États-Unis après la mort de Georges Floyd. Peut-on parler, en France, de racisme institutionnel, dont notre police serait coupable ? C’est déjà discutable. Mais les choses vont plus loin encore.

Le rapprochement avec les États-Unis est plus qu’inquiétant, car tout se passe comme si l’on voulait que la France entre complètement dans le modèle américain avec toutes les connotations d’une histoire marquée par l’esclavage, la lutte pour les droits civiques mais encore les tendances persistantes au suprémacisme blanc et les affrontements sanglants. Et cela correspond à toute une construction intellectuelle également importée d’outre-Atlantique, qui voudrait que « la domination blanche » structure notre société, et que celle-ci ne peut que se comprendre à partir de termes ethno-raciaux binaires, du type blanc-noir. Ainsi notre pays, dans cette logique, devrait participer à la grande bataille qui secoue en ce moment les États-Unis. Une France essentialisée raciste, c’est, pour moi en tout cas, un grand danger à éviter et, pour rester dans le même vocabulaire, à déconstruire d’urgence.

Chronique diffusée sur Radio Notre-Dame le 4 juin.