Une autre sorte de diversité scolaire - France Catholique
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« Ô Marie conçue sans péché »
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Une autre sorte de diversité scolaire

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Université de Purdue, Etats-Unis

Université de Purdue, Etats-Unis

Diversité, équité, et inclusion (DEI) ces trois mots sont devenus le « dieu » de l’université, y compris de nombreuses universités catholiques prestigieuses. Certains d’entre nous qui ont le privilège d’enseigner dans des universités moins prestigieuses trouvent cela humoristique, car cela fait des années que nous faisons la classe à des populations étudiantes diversifiées. Dans les institutions élitistes, on plastronne quand on a atteint le « point de référence » de quinze à dix huit pour cent de « minorités » et de personnes appartenant à des « groupes traditionnellement désavantagés ». Dans mon institution, cela fait des années que nous sommes une « majorité de minorités ».

Les familles de mes étudiants viennent d’Amérique latine, du Moyen Orient, d’Asie, et des Caraïbes. Quand j’étais moi-même étudiant, je crois qu’il y avait peut-être un « Smith » dans ma classe. Mais maintenant, j’ai au moins un ou deux Gonzalez, Perez et Nguyens dans chaque classe.

Quant à enseigner les membres des « groupes traditionnellement désavantagés », eh bien, nous sommes une université catholique, aussi en avons-nous beaucoup, de ces gens qui viennent d’un groupe dont certains pensent encore qu’on peut les dépeindre par stéréotypes négatifs : des catholiques. Pour ce qui est de « l’équité », la maxime d’Orwell est : « certains sont plus égaux que d’autres ». Pour beaucoup de gens, les catholiques « ne font simplement pas le poids » ; Ils sont simplement « en dehors du coup » ; ce sont des « trublions » et ils s’opposent trop souvent aux vues de ceux qui leur sont « supérieurs ». Mais non, ce ne sont pas des fanatique inculte ou quoique ce soit d’autre.

Ce qui m’amène à deux autres sortes de « diversités » trop souvent oubliées. La première, qui manque dans de nombreuses universités est très claire maintenant depuis de nombreuses années : la diversité des points de vue. Quelle que soit leur constitution raciale ou ethnique, les étudiants dans les institutions élitistes modernes viennent en général du même contexte éducatif – les collèges et lycées spéciaux pour élite – aussi attend-on généralement de leur part les mêmes « vues progressistes ».

Ecrivez quelque chose qui mette au défi le discours progressiste actuel dans votre dissertation d’entrée à l’université, et vous pourriez aussi bien la mettre à la poubelle et vous épargner l’affranchissement. Les élèves qui ont eu le bon contexte « préparatoire » et les bons conseils le savent, aussi cachent-ils leurs vraies opinions et apprennent-ils à opiner de la tête d’un air entendu quand ils entendent le baratin progressiste de leurs professeurs – tout à fait comme les citoyens d’Europe de l’Est avaient appris à le faire quand ils entendaient le charabia marxisant des apparatchiks dont l’approbation leur était nécessaire pour survivre.

Mais il existe une autre forme importante de diversité que presque personne ne remarque : la diversité d’âge. Nous les appelons les « étudiants non traditionnels ». Ce sont des étudiants qui ont dépassé le créneau habituel de 18 – 23 ans et qui sont revenus pour obtenir un diplôme universitaire après quelques années dans le monde du travail ou dans l’armée pour servir leur pays. Ces étudiants tendent à être plus impliqués dans leurs études car ils en comprennent la valeur. Et comme ils ont eu une expérience de la vie active, souvent ils apportent une vraie sagesse dans la classe.

Une année, j’étais professeur assistant dans une classe de philosophie en troisième cycle d’université, et l’un des sujets que nous étudiions était « le mal ». La plupart de mes élèves dans cette université haut de gamme admettaient qu’ils n’avaient pas beaucoup d’expérience du mal. A cette époque, j’avais une amie officier de police en ville. Elle m’a raconté des histoires. Elle connaissait le mal. Je lui ai dit que l’université devrait la payer pour venir dans ma classe.

Il y a assez longtemps, j’ai eu une classe où nous discutions l’Enéide de Virgile. J’ai demandé, « si vous étiez le père de Didon, est-ce que cela vous plairait qu’elle ait une aventure avec Enée ? »

J’avais dans la classe une jamaïcaine, mère de deux filles, et un pompier qui avait fait de nombreux séjours en Irak et qui avait neuf enfants. Aussi me suis-je tourné vers la Jamaïcaine et lui ai-je demandé ce qu’elle en pensait.

« Vous voulez vraiment savoir ce que je pense » dit-elle. « Bien sûr que je le veux » ai-je répondu. Et alors, elle s’en est prise à Enée. C’était délicieux. « Oh non, je ne laisserais jamais mes filles nulle part à proximité de lui ». « Mais c’est un héros » ai-je dit en plaisantant. « Oh, je les connais ces héros. Ils peuvent toujours aller au diable »

Quand je me suis tourné vers le père de famille et lui ai posé la même question, il est simplement resté assis tranquillement, les bras croisés, et il a secoué la tête : « Cela n’arrivera pas ». Les autres étudiants voient cela. Et ils comprennent.

Et vous aurez rarement autant l’occasion de vous amuser dans votre vie que si vous pouvez avoir dans votre classe une noire d’une quarantaine d’années. Elles rient beaucoup et sont toujours d’accord pour sermonner les étudiants au sujet de leur comportement : « Pas question que tu sortes avec un garçon comme cela ! »

Toute institution qui voudrait vraiment la diversité comme elle prétend le vouloir, pourrait y arriver si elle rendait plus facile son accès aux étudiants non-traditionnels. Presque tous mes étudiants non-traditionnels venaient de minorités.

Pourquoi n’avons-nous pas plus de ces merveilleux étudiants ? Ils sont un cadeau dans une salle de classe et ils tendent à être plus reconnaissants pour l’éducation qu’ils reçoivent. Réponse : l’aide financière est réservée aux 18 – 23 ans de vieille souche. Et quelle personne qui a une réelle sagesse du monde et une famille à élever s’endetterait de milliers de dollars pour payer ses études ?

Pour cela, il faut être un jeune blanc-bec de dix-huit ans.

Aussi est-il peut-être temps d’opérer un changement radical. Pourquoi concentrons-nous nos efforts sur les études de jeunes adolescents, moment où – en tous cas dans notre culture actuelle – ils sont souvent le moins capables d’en tirer profit (et dépensons-nous des millions par-dessus le marché) ? Pourquoi ne pas accorder aux jeunes quelques années pour acquérir une certaine expérience de la vie, peut-être construire une famille, et puis ensuite, les faire bénéficier d’une formation de culture générale catholique.

Certains des élèves les plus impliqués dans de nombreuses institutions étaient ceux qui revenaient de la deuxième guerre mondiale et allaient à l’université alors qu’ils avaient déjà femme et enfants.

Aussi, à mes élèves non-traditionnels, je dis : C’est un plaisir et un honneur de vous avoir dans ma classe. L’université devrait vous payer pour être ici. Mais malheureusement, ces choses là ne sont pas de mon ressort !