Une analyse girardienne de la crise intégriste - France Catholique
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Le martyre des carmélites
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Une analyse girardienne de la crise intégriste

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Fort heureusement, les crises finissent par s’estomper. Parfois elles laissent des traces. Que restera-t-il dans quelques mois de celle que nous venons de vivre ? Ce qui est sûr, c’est que nous avons intérêt à analyser ce qui vient de se passer au-delà même des faits et des controverses, longuement rapportés par les médias. C’est pourquoi je me permettrai d’utiliser la méthode de René Girard, parce qu’elle me paraît appropriée pour saisir le dynamisme d’un mouvement qui ne cesse de monter en puissance jusqu’à une sorte d’exaspération maximum.

Au point de départ il y a un scandale, le scandale Williamson, mais il serait de peu de portée émotionnelle à lui seul. Pour qu’il acquière une véritable force évocatrice, propre à entraîner l’indignation, il faut qu’il soit associé au pape lui-même. Le scandale, c’est bien que Benoît XVI réintroduise un négationniste dans l’Église. Peu importe que l’information soit complètement manipulée, qu’elle résulte, comme l’a dit Laurent Joffrin, d’un hasard médiatique. C’est elle qui va entraîner une énorme poussée d’adrénaline à laquelle à peu près personne n’est capable de se soustraire.

C’est le mécanisme mimétique qui fait monter la puissance, chaque média débordant l’autre pour mieux s’insérer dans la vague de plus en plus gigantesque. Et toujours selon René Girard, un tel mécanisme est toujours en rapport avec une victime émissaire, contre laquelle, toute la violence se concentre. Williamson était un trop petit personnage pour être cette victime, bien qu’authentique coupable. C’est Benoît XVI qui concentre en sa personne toute la vindicte, quoi qu’évidemment non coupable. Mais Girard l’a toujours dit : le bouc-émissaire est toujours incarné par l’innocent. Toutes les censures de la conscience tombent, empêchant de voir les choses avec lucidité. D’autres facteurs jouent également pour stigmatiser la cible. Mais ici il faut faire intervenir le facteur proprement allemand.

Toute l’affaire a été montée en Allemagne. C’est le Spiegel qui est à l’origine de la manipulation. C’est cet hebdomadaire qui fut le premier au courant de l’interview de Williamson à la télévision suédoise au mois de novembre. C’est lui qui tout à fait consciemment lança l’attaque la plus violente contre le pape allemand, en le rendant arbitrairement et indûment coupable du scandale. A la une, il exhibait la photo de Benoît XVI avec un titre d’une rare agressivité : Un pape allemand qui fait du mal à son Église. On ne se rend peut-être pas compte suffisamment chez nous de la force symbolique d’une telle attaque. C’est l’inconscient criminel de la nation allemande qui est en cause, c’est aussi la fracture de la Réforme avec l’hostilité farouche d’une moitié de l’Allemagne à l’égard de Rome. L’intervention de la chancelière Angela Merkel, elle-même fille d’un pasteur luthérien, a profondément blessé une partie de l’opinion du pays et déclenché les réactions les plus vives des responsables catholiques de la C.D.U. Le germaniste Édouard Husson remarque à ce propos qu’une telle attaque contre le pape était inimaginable de la part d’Helmut Kohl, a fortiori de Konrad Adenauer. Ajoutons enfin que l’élection de Joseph Ratzinger a provoqué dans le pays des phénomènes étranges, qui relèvent d’une sorte de psychanalyse collective. Comment dire ? C’est à la fois de l’amour-haine, de difficiles transactions de l’âme allemande avec elle-même.

C’est la violence allemande qui a porté la contagion à travers toute l’Europe et même le monde, d’une façon qui paraîtra disproportionnée, lorsque l’émotion se sera émoussée. Car, qui a cru un seul instant sérieusement qu’il pouvait y avoir chez le pape la moindre complaisance pour le négationnisme ? Il n’empêche que le soupçon a couru, s’est insinué jusqu’à se révéler clairement chez certains caricaturistes comme Plantu dans le Monde ou certains amuseurs comme Stéphane Guillon. Alors là l’inconscient se révélait dans toute sa crudité, et Joseph Ratzinger n’était que l’héritier des jeunesses hitleriennes dont il fut membre dans sa jeunesse. Ignominie, avait dit le cardinal Lustiger au moment de l’élection de Benoît XVI, lorsque certains médias s’étaient aventurés sur ce terrain douteux. Qu’importe. La violence mimétique permet tout, on s’en sera aperçu une nouvelle fois avec cette crise extrêmement révélatrice.

http://vatican-integristes.blogs.la-croix.com/?p=167#more-167