Hier, tous les moyens d’information étaient tournés vers Washington, où le nouveau président prêtait serment sur la Bible en reprenant un texte qui peut éventuellement se conclure par cette formule : « Que Dieu me vienne en aide. » Nous sommes très loin de notre République laïque, et cela pour des raisons qui tiennent aux origines même des États-Unis d’Amérique. J’ai repris à ce propos mon Tocqueville : « La religion, qui, chez les Américains, ne se mêle jamais directement au gouvernement de la société, doit donc être considérée comme la première de leurs institutions politiques ; car si elle ne leur donne pas le goût de la liberté, elle leur en facilite singulièrement l’usage. »
Bien sûr, un Tocqueville contemporain, voulant rendre compte de la situation actuelle des États-Unis, à l’heure du déchirement entre Trump et Biden, ne prendrait pas exactement la même analyse. Beaucoup de choses ont profondément changé, mais il y a des permanences évidentes, notamment dans l’ordre religieux. Joe Biden est le second président catholique après John Kennedy. Le nombre de catholiques a considérablement progressé depuis le XIXe siècle, où ils n’étaient qu’une faible minorité, pas toujours bien acceptée. Pourtant, Tocqueville notait déjà que leur intégration ne poserait pas de problème. Au contraire, pour lui : « Les catholiques étaient à la fois les fidèles les plus soumis et les citoyens les plus indépendants. »
Il n’est pas sûr que l’appartenance catholique de Joe Biden marque profondément son style de gouvernement car il est très opposé, par exemple, à l’ensemble des chrétiens pro-life. C’est sans doute sur ce point que Tocqueville devrait être sérieusement révisé, lui qui accordait la primauté aux mœurs familiales des Américains.