Il a toujours été de la plus haute probabilité que le bébé Alfie Evans meure à l’hôpital, avec ses parents à son chevet. Toutes les batailles en justice, les tweets du Pape, les veillées de prière et les armées de soutien pour le bambin britannique n’étaient guère susceptibles de changer cela. Les miracles arrivent, mais il y a une raison pour qu’on les appelle miracles. Il n’était guère probable que les médecins en Italie (ou n’importe où ailleurs) aient pu faire plus que les médecins de Liverpool.
Quand les médecins d’Alfie auraient épuisé leur science, quand rien de plus ne pourrait être fait, le pauvre corps d’Alfie lui ferait défaut et il mourrait. La vie est sacrée, mais la mort n’est pas la pire des choses. Elle vient pour chacun d’entre nous.
Cependant, ce qui a commencé comme un conflit entre les parents d’un enfant et ses médecins à propos d’un traitement est devenu un différend d’ordre juridique sur qui pouvait parler dans l’intérêt d’Alfie. Les médecins et les juges étaient tellement sûrs de savoir ce qui était le mieux pour Alfie.
Peut-être que les médecins avaient raison et qu’on ne pouvait rien faire de plus pour ce patient pour qui ils ne pouvaient même pas établir un diagnostic.
Le juge peut bien avoir eu le droit de dire que la loi pouvait se permettre de donner aux médecins d’Alfie des prérogatives qui de droit appartenaient à ses parents. S’il y a jamais eu un lien proclamant la vérité du droit naturel et de l’autorité, c’est bien celui des parents avec leurs enfants.
C’est un exercice mental intéressant que de comparer les réactions à l’affaire Alfie avec une autre controverse concernant les limites de l’autorité civile et les droits des parents : la célèbre affaire Mortara, au XIXe siècle. Un enfant juif qui avait été baptisé par une servante bien intentionnée fut enlevé à ses parents, en conformité avec la loi vaticane. De nos jours, il est tenu pour acquis qu’il était injuste d’usurper les droits naturels des parents d’Edgardo Mortara. Pourtant beaucoup de gens qui croient cela croient également qu’il était juste pour le Royaume-Uni d’usurper les droits des parents en vue de garantir que Alfie Evans meure à l’hôpital.
Rien de tout cela n’a plus réellement d’importance maintenant. Voyez-vous, les médecins, les juges – ils connaissaient l’intérêt de l’enfant, ils étaient impartiaux. Pas comme les parents d’Alfie, qui ne sont pas médecins. Ou avocats. Ou diplômés d’université. Les parents sont assez charmants dans leur genre, mais ce sont des amateurs. La loi se tourne vers les experts, qui eux savaient de quoi le garçonnet avait besoin. D’autres tentatives de diagnostic étaient hors de question. Alfie ne devait en aucun cas être déplacé de cet hôpital qui refusait tout traitement hormis les soins palliatifs. Si ses parents essayaient de l’emmener, ils se feraient arrêter.
Tous les médecins de la Reine et tous les juges de la Reine n’ont jamais compris ce qui n’allait pas chez Alfie. Ils étaient tout à fait certains qu’il serait incapable de respirer par lui-même. Ils lui ont enlevé son respirateur, mais il a respiré par lui-même. Durant cinq jours. Est-ce que cela a ébranlé la certitude des mandarins ? Non. Les médecins pensaient qu’il était possible que Alfie fasse une crise d’épilepsie si on le transportait à Rome. Ils craignaient qu’il ne survive pas au voyage. C’était mieux qu’il meure à Liverpool.
Dans son intérêt, bien évidemment.
Bien qu’ébranlés par les plaidoyers de plus en plus désespérés des parents d’Alfie, et par la clameur de ses soutiens partout dans le monde – le pape François a soutenu les plaidoyers des parents d’Alfie, il a même procuré un hélicoptère pour le transport à Rome – les mandarins ont toujours refusé de céder. La science médicale et la loi leur donnaient le pouvoir de déterminer ce qui était le mieux pour Alfie, et donc, comme pour en donner la preuve, Alfie est mort dans un hôpital de Liverpool pour éviter le risque de mourir dans un hôpital de Rome.
Margaret Tatcher a eu cette phrase célèbre : « Ce qu’on nomme société n’existe pas : il y a des individus, hommes et femmes, et des familles ». C’était une vue plutôt étriquée de la vie sociale, mais de la façon dont l’affaire Alfie Evans s’est déroulée, on se demande si elle avait grossi le trait. Y a-t-il juste des individus et leurs intérêts – et l’Etat qui emploie des experts pour instruire ces derniers en égard aux premiers ?
Les catholiques savent mieux, ou le devraient. Le pape François a saisi ce qui était en jeu dans l’affaire Evans – il a rencontré le père, Tom, et tweeté son inébranlable soutien. Les déclarations de l’épiscopat d’Angleterre et du pays de Galles étaient principalement inspirées de la pastorale je-ne-prends-pas-parti, en d’autres mots, elles étaient molles et de pure forme. Certains catholiques – l’écrivain anglais biographe du pape Austen Ivereigh par exemple – étaient indignés, assurant que les protestations contre l’abrogation des droits parentaux étaient d’une manière ou d’une autre une preuve de la contagion libertaire venue de l’Eglise Américaine.
Le pape Léon XIII écrivait dans Rerum Novarum : « L’affirmation que le gouvernement civil devrait avoir la possibilité de s’introduire dans la famille et d’exercer un contrôle poussé sur les foyers est une grande et pernicieuse erreur. » Le pape Léon, il faut le noter, n’était ni Américain ni libertaire.
Quand les ministres de la loi, prétendant agir dans l’intérêt d’un individu, isolent cet individu des liens familiaux, qui sont les fondements de la société humaine, la loi ayant été primitivement mise en place pour les protéger, ils font violence à l’individu, à la famille et à la société. De nouveau, le pape Léon l’exprime très bien : « Si les citoyens, si les familles, entrant dans une association ou un compagnonnage, en viennent à subir une entrave dans cette communauté plutôt qu’en obtenir une aide, à voir leurs droits attaqués plutôt que défendus, la société serait à bon droit vue comme une objet d’exécration plutôt que de désir. »
Alfie Evans a été traité – non comme une personne dans sa plénitude, fils d’un père et d’une mère – mais comme un individu dénudé dont la dignité se résume à « ses intérêts » et qui est l’objet des bons soins des forces impersonnelles de l’État. L’État se rend lui-même objet d’exécration.
Fils adopté par le Père par son baptême, Alfie est maintenant à l’abri de la violence qui lui a été faite ; la violence faite à sa famille, ses parents, sa nation est peut-être un péché bien plus grave.
Illustration : Alfie Evans
Source : https://www.thecatholicthing.org/2018/04/30/an-object-of-detestation/
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Le petit Alfie Evans est-il mort naturellement, ou a-t-il été poussé à mourir ? Il a reçu quatre médicaments non identifiés avant son dernier souffle…
http://leblogdejeannesmits.blogspot.fr/2018/05/alfie-evans-mort-naturelle-medicaments-avant-mourir.html