« Un mystère occulté » - France Catholique
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Noël : Dieu fait homme
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« Un mystère occulté »

Le Samedi Saint, jour de silence où le Christ est au tombeau et descend aux enfers, est d’une saisissante actualité selon le Père Daniel Ange, auteur de « Le Samedi Saint. Nous y sommes ! » (Salvator).
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La mise au tombeau, Giotto, vers 1305, chapelle Scrovegni, Padoue, Italie.

La mise au tombeau, Giotto, vers 1305, chapelle Scrovegni, Padoue, Italie.

Comment vous est venue l’idée de ce nouvel ouvrage ? Daniel-Ange : Ce livre m’habite depuis déjà 40 ans. Car ce mystère du Samedi Saint est, hélas, quasi complètement occulté dans l’Église, toute cette journée étant pratiquement occupée, parfois fiévreusement, par la préparation de la Vigile pascale, avec ses baptêmes. De plus, la théologie latine, contrairement aux Églises orientales, l’a très peu développé, encore moins célébré. Du moins jusqu’au très riche exposé du Catéchisme de l’Église catholique (n°633-4). Ce livre renoue donc avec la grande Tradition théologique, homilétique [la rhétorique appliquée à la foi, NDLR] et liturgique orientale. Pour l’écrire, j’ai été aidé fraternellement par le hiéromoine Macaire de Simonos Petra, du Mont Athos, où j’ai eu l’immense grâce de travailler certains passages. Pourquoi dites-vous que notre temps est celui du Vendredi et du Samedi Saint ? Le mystère du Samedi Saint a une double actualité, saisissante et bouleversante, qui rejoint ce qu’ont vécu les disciples, il y a près de 2 000 ans, entre la crucifiante mort du Seigneur Jésus et son exaltante Résurrection. Tout s’était alors écroulé pour eux. Tout avait sombré dans un abîme de déréliction, de désespoir, d’angoisse et de peur mortelle. Sur la route d’Emmaüs, les disciples l’ont eux-mêmes avoué à Jésus : « Nous avions espéré en lui… » : l’espérance est passée au passé. Elle a été enterrée, lorsqu’ils ont vu Jésus mort. Or, aujourd’hui, je constate qu’une multitude de baptisés sont anachroniques : leur foi reste bloquée au soir du Vendredi Saint. Ils vivent comme si Jésus était un sage relativement sympa du passé, dont nous allons, tôt ou tard, retrouver les ossements en Judée. Bref, il est bel et bien mort. Ils ne croient pas en sa résurrection. Conséquence : c’est le désespoir. Plus personne ne peut nous sauver ni nous conduire au Ciel. Il ne reste que désolation, abandon, déréliction. Oui, beaucoup de catholiques en restent à la solitude mortelle du Vendredi Saint, qu’évoquent nos églises ce jour-là : il n’y a plus ni fleurs, ni flammes ; les statues, fresques et icônes sont – normalement – voilées de violet et, pire que tout, il n’y a pas de messe, et la porte du tabernacle demeure ouverte, désespérément vide… Voilà à quoi ressemble la foi de nombreux catholiques à mes yeux… Quelles sont les conséquences concrètes de cette perte de foi en la résurrection ? Ce désert spirituel a été ravageur avec le Covid, aggravant l’isolement, le manque de relations sociales ; provoquant l’abandon des mourants, décédés sans aucune présence familière et réconfortante, et enterrés de manière indigne… Et n’oublions pas non plus les jeunes, criant leur désespoir . Comment en sommes-nous arrivés là ? Pourquoi toutes ces souffrances ? L’amour se refroidit, il est oublié, rejeté, car nous vivons dans le collapse généralisé de la foi – le Fils de l’homme trouvera-t-il encore la foi sur la terre quand il viendra ? Les conséquences sont immenses. Tous les repères sont dynamités : vérité-erreur, mal-bien, tout est devenu flou. Nous baignons en plein chaos. C’est le combat des derniers temps, celui de l’idolâtrie du sexe et du fric. Et, pire, c’est ce que Jean-Paul II diagnostiquait comme « l’apostasie silencieuse de l’homme qui se croit heureux sans Dieu ». Retrouvez intégralité de l’entretien dans le magazine.
—  samedi_saint.jpgLe Samedi Saint. Nous y sommes ! Daniel-Ange, éd. Salvator, février 2022, 266 pages, 20 €.