Un drôle de rêve - France Catholique
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Le martyre des carmélites
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Un drôle de rêve

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Fermons les yeux un instant, et formons un rêve. Je vous l’accorde : un rêve abracadabrantesque, pour reprendre une formule rimbaldienne. Le cardinal André Vingt-Trois, archevêque de Paris et président de la conférence des évêques de France va devoir se rendre tour à tour à la convention de l’UMP et au congrès du Parti socialiste, afin de bénir tous les délégués et leur adresser un message d’encouragement dans l’exercice de leur mission civique. Vous rouvrez les yeux et vous dites : rêve inutile, utopique et peut-être même dangereux, propre à nous inspirer des idées en rupture avec notre laïcité publique. Certes, je ne vous contredirai pas là-dessus. Mais il se trouve que ce rêve n’est pas tout à fait un rêve, puisqu’il consiste dans la transposition de ce qui se passe dans un pays qui n’en est nullement troublé, en l’adaptant pour le nôtre, où cela risquerait de chambouler toutes les idées reçues.

Oui, cela se passe aux États-Unis. Le cardinal Dolan, archevêque de New-York, s’est rendu à la convention du Parti républicain, pour prononcer à la tribune une bénédiction finale. Avant de bénir les délégués le cardinal a prononcé une très roborative allocution, où il a associé les convictions les plus enracinées du christianisme aux origines et aux fondements de la nation américaine. Le même cardinal sera présent à la convention du Parti démocrate qui décide de la seconde candidature présidentielle de Barrack Obama. Oui, d’évidence nous sommes dans un autre monde, une autre culture. Et pourtant, nous autres Français ne faisons-nous pas partie avec nos frères américains d’une communauté de nations libres, attachées à des principes constitutionnels voisins ? La séparation du spirituel et du temporel est inscrite dans les constitutions française et américaine.

Seulement voilà, la religion est un élément constitutif du pacte américain, comme l’avait déjà bien vu Alexis de Tocqueville. Nous, depuis notre Révolution, sommes en délicatesse à propos des relations de l’Église et de l’État, même si bien du chemin a été parcouru depuis 1905. Je ne veux pas insinuer que la situation américaine est idyllique, car elle est marquée elle aussi de nombreux conflits. Mais il est important de savoir qu’il y a d’autres conceptions, d’autres pratiques que la nôtre. N’en déplaise aux radicaux de gauche, l’Église peut avoir toute sa place dans le débat public.

Chronique lue sur Radio Notre-Dame le 4 septembre 2012.