Le Pape François et l’Imam Ahmed al Tayeb de la mosquée Al Azhar du Caire ont signé dimanche à Abu Dhabi une déclaration conjointe sur « la Fraternité humaine pour la paix mondiale et la coexistence commune » : cette démarche constitue une étape capitale dans le dialogue entre chrétiens et musulmans.
Le Pape et l’Imam d’Al Azhar, qui représente les Sunnites (soit 85% des musulmans), demandent aux responsables politiques, économiques et culturels du monde entier d’œuvrer à « une culture de la tolérance, de la coexistence et de la paix » et d’intervenir « pour mettre fin aux guerres, aux conflits, à la dégradation environnementale et au déclin culturel et moral » du monde actuel.
Ce document considère que les « vrais enseignements des religions » invitent à « défendre les nouvelles générations de la domination de la pensée matérialiste, du danger des politiques de l’avidité du profit effréné et de l’indifférence, basée sur la loi de la force et non sur la force de la loi ».
Il appelle à « la diffusion de la culture de la tolérance, de l’acceptation de l’autre et de la coexistence entre les êtres humains ». Estimant que cela contribuerait à « réduire de nombreux problèmes économiques, sociaux, politiques et environnementaux ».
Le Pape et l’Imam soulignent que le terrorisme qui « menace la sécurité des personnes, aussi bien en Orient qu’en Occident, au Nord ou au Sud » (…) « n’est pas dû à la religion », mais « à l’accumulation d’interprétations erronées des textes religieux, aux politiques de faim, de pauvreté, d’injustice, d’oppression, d’arrogance ». C’est pourquoi ils appellent à cesser, non seulement tout soutien matériel ou financier aux réseaux terroristes, mais aussi le soutien apporté « par la couverture médiatique » qui sert de caisse de résonance à leurs entreprises de déstabilisation psychologique.
Ce texte considère que la relation entre Occident et Orient « est une indiscutable et réciproque nécessité », utile « afin que tous les deux puissent s’enrichir réciproquement de la civilisation de l’autre, par l’échange et le dialogue des cultures ». Le Pape et l’Imam estiment, d’une part que « l’Occident pourrait trouver dans la civilisation de l’Orient des remèdes pour certaines de ses maladies spirituelles et religieuses causées par la domination du matérialisme » ; et d’autre part « que l’Orient pourrait trouver dans la civilisation de l’Occident beaucoup d’éléments qui pourraient l’aider à se sauver de la faiblesse, de la division, du conflit et du déclin scientifique, technique et culturel ».
La déclaration insiste sur le combat à mener pour défendre la dignité de la femme, son droit à l’instruction, au travail et à « l’exercice de ses droits politiques », tout en la protégeant de l’exploitation sexuelle et « du fait de la traiter comme une marchandise ou un moyen de plaisir ou de profit économique ». Elle affirme aussi l’importance « des droits fondamentaux des enfants à grandir dans un milieu familial, à l’alimentation, à l’éducation et à l’assistance », comme la nécessité d’empêcher « toute pratique » qui viole leur dignité. Elle appelle à « considérer comme un crime le trafic de leur innocence ». Et elle présente comme « une exigence religieuse et sociale » la protection « des droits des personnes âgées, des faibles, des handicapés et des opprimés ».
Le Pape et l’Imam soulignent en particulier « combien la famille est essentielle, en tant que noyau fondamental de la société » : à leurs yeux, « attaquer l’institution familiale, en la méprisant ou en doutant de l’importance de son rôle, représente l’un des maux les plus dangereux de notre époque ».
Leur déclaration commune dénonce aujourd’hui « une détérioration de l’éthique », et « un affaiblissement des valeurs spirituelles et du sens de la responsabilité ». Ceci à l’heure où se manifestent les signes d’une « troisième guerre mondiale par morceaux »…
Le Pape François et l’Imam Ahmed al Tayeb souhaitent faire connaître ce texte aux autorités politiques du monde entier, ainsi qu’aux responsables économiques et culturels en mesure d’en relayer le message.
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