Emmanuel Macron, en inaugurant l’ouverture des restaurants du cœur, s’est montré plutôt dur à l’égard d’une Marocaine, qui demandait son aide pour une régularisation de sa présence en France. Rappelant la formule célèbre de Michel Rocard « Nous ne pouvons pas accueillir toute la misère du monde », il a signifié que notre générosité ne pouvait aller au-delà des réfugiés dont la vie est en danger dans leur pays d’origine et qui nous réclament un droit d’asile légitime. Ces propos ont provoqué quelques protestations à gauche, de la part de ceux qui déplorent un manque de sensibilité à l’égard de cette misère du monde. Honnêtement, et a fortiori pour des chrétiens sans cesse secoués par le Pape à ce sujet, la question est éminemment délicate. Lorsqu’on est investi, en plus, de la responsabilité d’un chef d’État, il n’est pas possible de considérer les phénomènes migratoires, en écoutant que ses élans du cœur.
J’ai souvent rappelé la dimension géopolitique d’un défi considérable. On sait aussi que l’opinion publique est très sensibilisée par les récents événements. L’Allemagne de la généreuse Angela Merkel s’en trouve complètement déstabilisée. Et puis il y a la situation actuelle du pays qui doit être prise en compte. Avant même d’envisager les futures vagues migratoires, il convient de faire face aux difficultés considérables de certains quartiers, considérés comme les territoires perdus de la République. Je viens de lire à ce propos dans la revue Éléments une étude sur la ville de Marseille, proprement affolante, avec des communautés qui s’ignorent ou se haïssent. Est-il vrai qui si Marseille n’a pas explosé, c’est qu’il y règne un « ordre narcotique » sur lequel veillent les trafiquants, soucieux que ne soit pas perturbée une activité qui génère des dizaines de millions d’euros ?
Parallèlement, il y a d’autres témoignages qui plaident pour une sortie de ce traumatisme. Ainsi dans Libération, une enseignante de banlieue explique comment elle parvient à faire progresser une classe qui accumule tous les handicaps, obtenant la reconnaissance des parents. En tout état de cause, il s’agit de partir des réalités, même les plus éprouvantes, pour tenter de faire vivre tout ce pays, en s’appuyant sur toutes les ressources possibles, les premières étant nos ressources humaines.
Chronique diffusée sur Radio Notre-Dame le 23 novembre 2017.