Surprise ! La Réforme a eu lieu ! - France Catholique
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Le martyre des carmélites
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Surprise ! La Réforme a eu lieu !

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La revue Atlantic s’aperçoit de la Réforme, en gros cinq siècles trop tard!

Le journaliste Joshua Green signale que l’obédience à laquelle adhère la candidate à la présidence (des États-Unis) Michele Bachmann, le Synode évangélique Luthérien du Wisconsin, pense que Martin Luther avait raison au sujet de la papauté catholique. Imaginez ! des Luthériens qui croient aux idées de Luther ! Bizarre, non ? Il se peut que la semaine prochaine la revue Atlantic révèle à ses lecteurs que le Pape est catholique, que les méthodistes adhèrent aux idées de John Wesley, ou que le grand schisme a brouillé les relations entre catholiques et orthodoxes.

Chapeau de l’article de Green: « L’Église de Michele Bachmann déclare que le Pape est l’Antéchrist » ; cependant Michele Bachmann et sa famille ont cessé de fréquenter cette église luthérienne depuis deux ans. Green, semble-t-il, a de la peine à comprendre les nuances les plus élémentaires d’adhésion à une église, les grandes différences entre dénominations, et le maintien sur les registres d’une église abandonnée depuis des années au profit d’une autre.

Il n’est pas étonnant que, selon lui, Martin Luther « a rompu avec l’Église catholique », étant excommunié par le Pape Léon X (disons, selon un néologisme populaire : Luther était « mal perçu »). Ainsi, selon la logique propre à Green, s’il avait été employé par la revue Atlantic en 1521, le titre de l’article aurait pu être: « L’Église de Martin Luther déclare que Martin Luther n’est pas un membre de L’Église de Martin Luther.»

Compte-tenu de l’acception populaire et de la description de l’Antéchrist reprise par nombre de films (Tel La malédiction) ainsi que l’eschatologie des indulgences citée dans Late great planet earth (« L’ultime grande planète terre ») de Hal Lindsey et dans le bestseller Left behind (« Distancé »), le passage tiré de la déclaration doctrinale du Synode évangélique Luthérien du Wisconsin est plutôt effrayant.

Extrait de la déclaration doctrinale du Synode évangélique Luthérien du Wisconsin, cité par le blog de la revue Atlantic : « comme l’Écriture nous apprend que l’Antéchrist sera révélé et nous dit comment le reconnaître, et comme cette prophétie a été pleinement réalisée au cours de l’histoire et par le développement de la Papauté romaine, c’est l’Écriture qui nous révèle que la Papauté c’est l’Antéchrist.»

Voilà pourquoi, à mon avis, M. Green s’est emparé de cette histoire. Il y a trouvé une occasion de diffamer Madame le Député Bachmann et de creuser un fossé entre deux familles dont elle avait de bonnes chances de recueillir les suffrages : les Évangélistes conservateurs et les Catholiques pratiquants. Comprendre ce que « Antéchrist » signifiait pour Luther et ses émules réformateurs (y-compris Jean Calvin, Thomas Cranmer et John Knox) et comment ils employaient ce terme dans le domaine artistique était le cadet des soucis de M. Green.

Si M. Green avait bien travaillé à l’école, il aurait su où se renseigner. Pour sûr, ça aurait demandé un véritable effort, plus grand que gratter une paire de références sur le moteur de recherche de son « iPad ». Il aurait pu trouver une référence lumineuse dans l’ouvrage: Building Unity: Ecumenical Dialogue with Roman Catholic Participating in the United States (Refaire l’unité — Dialogue œcuménique avec la participation de l’Église catholique Romaine aux États-Unis) Jeffrey Gross et Joseph Burgess éditeurs, publié par la presse catholique.

Voici un passage des remarques des participants luthériens :

Contemplant la position historique luthérienne au sujet de la papauté, nous nous sommes rendu compte que les premiers réformateurs ne rejetaient pas ce que nous avons appelé la mission de Pierre, mais plutôt la papauté historique telle qu’ils s’y opposaient à cette époque. Traitant le Pape d’Antéchrist, les luthériens primitifs se référaient à une tradition datant du onzième siècle. Il n’y avait pas que des dissidents et des hérétiques, il y avait aussi des saints pour traiter l’Évêque de Rome d’Antéchrist quand ils voulaient fustiger ses abus de pouvoir.

Il reste encore, évidemment, bien des questions théologiques chez les luthériens de notre temps, qui continuent à soutenir l’opinion de Luther sur la papauté. Pour mesurer et comprendre ces questions — même si on n’y attache pas grande importance — le Synode évangélique Luthérien du Wisconsin a publié sur son site web un document doctrinal de neuf pages, comportant des citations de Luther.

Naturellement, en tant que catholique je pense que Luther était dans une erreur profonde. Mais je comprends aussi que si vous prenez la théologie au sérieux, avec un contenu cognitif réel, vous trouverez qu’il exclut certaines croyances, tout en incluant d’autres. C’est pourquoi l’Église catholique affirme que les dénominations protestantes, telle la dénomination luthérienne, ne sont pas de véritables Églises. Cette opinion résulte incontournablement de la croyance catholique en la succession apostolique.
Quelques exemples flagrants: les Baptistes ne considrent pas le baptême des tout-petits comme légitime, le Judaïsme pense que la doctrine chrétienne de la Trinité est contraire à l’enseignement de la Bible, l’Église orthodoxe d’Orient interdit à ses fidèles de recevoir la Communion dans les églises unies à Rome, les musulmans refusent à Jésus d’être appelé Fils de Dieu, et l’Église presbytérienne orthodoxe « croit que le sacrifice papal de la messe est la pire des injures abominables faites à l’unique sacrifice du Christ, unique propitiation pour tous les péchés des élus. »

On ne voit pas bien ce que M. Green s’attend à trouver au cours de ses enquêtes dans les églises, synagogues, ou mosquées fréquentées par des personnalités politiques. Dans une nation de croyants sincères, citoyens dont le gouvernement garantit la liberté religieuse comme d’autres libertés élémentaires, pourquoi M. Green s’étonne-t-il de découvrir des opinions religieuses variées, et que ceux qui ont ces opinions les défendent contre les critiques ?

Par conséquent, gémir au sujet d’opinions religieuses divergentes dans le pays — et décrire ces divergences d’une façon aussi brutale et peu charitable comme le fait M. Green est une attaque implicite contre les libertés constitutionnelles qui tolèrent même ce genre d’attaque.

Source : http://www.france-catholique.fr/ecrire/?exec=articles_edit&id_rubrique=67&new=oui