La malheureuse Haïti sera-t-elle secourue par l’humanité entière, rassemblée enfin positivement à l’enseigne de la mondialisation ? On ne peut en exclure l’idée à l’heure où tous les médias – présents sur place avant les secours – diffusent à tous les points du globe la tragédie en tous ses aspects. Nous ne sommes pas seulement informés précisément des effets du séisme, en nombre de morts, de blessés, de destructions de biens matériels. L’aide s’organisant, on commence à planifier la reconstruction totale d’un pays. Mais l’attention sera-t-elle assez soutenue dans quelques mois ou années pour que l’effort de solidarité se structure efficacement ? Déjà, une polémique s’est déclarée à propos du rôle des États-Unis et des conséquences d’une arrivée aussi massive de leurs forces armées et de leur logistique.
On ne peut être naïf au point de penser que les rapports de force vont céder face aux principes de la morale humanitaire. Si la générosité du président Obama et de ses collaborateurs ne peut être mise en doute, elle n’abolit pas leurs soucis qui concernent la sécurité des États-Unis dans la région, ne serait-ce que par le biais d’un possible exode qui rejetterait sur la côte de Floride des centaines de milliers de boat-people. Comment oublier par ailleurs les interventions militaires précédentes décidées par les présidents des États-Unis dans le but de modifier le régime politique d’Haïti ? Dans l’immédiat, nous n’en sommes pas là et l’on peut espérer que la conférence internationale qui doit se tenir prochainement, permettra de surmonter les rivalités et d’aménager un accord entre partenaires en vue de la restauration de l’économie haïtienne.
Faut-il rappeler que la France a des liens particuliers avec ce petit pays qui appartient à la francophonie et n’a pas oublié une histoire douloureuse ? Bien sûr, la traite négrière à l’origine du peuplement haïtien est loin, tout comme les événements tumultueux qui ont accompagné notre rupture au XIXe siècle. Nous serions toutefois coupables si nous nous estimions indemnes d’une dette morale qui défie le temps. La visite annoncée à Port-au-Prince de Nicolas Sarkozy devrait être l’occasion d’un décisif engagement. Enfin, nous ne pouvons que saluer ce pays de foi, qui pleure l’archevêque de Port-au-Prince, tant de prêtres, de séminaristes, de religieux ! C’est aussi une Église qui est à reconstruire et nos frères et sœurs catholiques sont en droit d’espérer que notre solidarité leur permettra de retrouver au plus tôt les sanctuaires perdus. Haïti a faim et soif. Il faut donner à manger, à boire à ses habitants, leur rendre un toit. Mais il convient aussi de répondre à la faim et à la soif spirituelles d’un peuple qui survivra parce qu’il a une inextinguible espérance.
Pour aller plus loin :
- Le défi du développement des peuples et le pacte de Marrakech - la fuite en avant des Nations Unies
- Liste des ouvriers pastoraux, Evêques, Prêtres, Religieux, Religieuses et Laics tués en 2011 et 2010
- HAITI : MOBILISONS NOUS. PRIERE ET AIDE D’URGENCE
- LA « MODERNITÉ » : UN CENTENAIRE OUBLIÉ
- Le rite et l’homme, Religion naturelle et liturgie chrétienne