Diverses crises traversent l’Église et notre pays. Vous avez remarqué que, régulièrement, nous ne mettons pas ces actualités à la une, comme le font les autres médias. Certains nous ont écrit leur « incompréhension ». Notre silence est-il un déni ? Une indifférence ? Une inconscience coupable ?
Non, bien sûr. L’information brute et immédiate est accessible sur tous les médias et réseaux sociaux. Dès lors, qu’apporterions-nous de plus ?
Ce que vous attendez de votre journal, c’est d’abord une analyse en profondeur des enjeux de ces crises, de leurs causes, leurs conséquences, mais aussi des remèdes. De même que la justice ne se rend pas du jour au lendemain, que les jurés ne rendent leur verdict qu’après s’être retirés loin des médias et des groupes de pression, de même, nous ne voulons ni nous tromper ni vous tromper. Mais au contraire, vous donner un autre son de cloche, une autre manière de juger.
Parfois même, le silence est une indication à demeurer prudents. Et il est aussi permis de se poser la question, sans pour autant tomber dans le complotisme : quand toutes les ondes tiennent le même discours, qui leur a appris cette hymne à l’unisson ? Ne peut-il y avoir un chef d’orchestre caché, et à quelles fins ?
Aller à la racine des crises
Nous ne sommes ni meilleurs, ni plus intelligents. Mais notre souhait est d’aller à la racine des crises que traverse l’Église : les diverses réformes liturgiques, les événements remettant en cause sa sainteté par des déviances morales, financières, et doctrinales ; les questions éthiques aussi, avec leurs conséquences, économiques, sanitaires, politiques, qui engagent nos choix et nos libertés. Dans chacune de ces situations, notre premier mouvement, suivant en cela l’Évangile, est de ne pas nous précipiter. Les jugements hâtifs sont rarement bons, la vindicte publique toujours détestable. Au cours de sa Passion, Jésus se tait. Il n’en rajoute pas : même Judas qui le trahit par un baiser, il l’appelle « mon ami ». Attitude de compassion et d’amour, de silence et d’invitation au désert, partagée par sa mère.
De même, nous prenons le temps de vous donner une véritable espérance. En effet, la manière de transmettre l’information fait vite sombrer dans le pessimisme. À l’inverse, notre espérance est celle qui prend en compte la parole de Jésus à Pierre : « Tu es Pierre et sur cette pierre, je bâtirai mon église. Et la puissance de la mort ne l’emportera pas sur elle… » C’est notre certitude.
L’exemple des saints
Tout en portant un regard lucide sur les difficultés actuelles, nous sommes convaincus qu’aucune crise ni déviance ne fera jamais disparaître l’Église du Christ. Nos pères n’ont pas été épargnés : croisades, islam conquérant, guerres de Religion, idéologies, immoralités de la papauté ou du clergé, pestes et épidémies, confusions liturgiques… Les saints aussi nous apprennent à réagir : au XIVe siècle, Brigitte de Suède transmet les paroles de Jésus : « Maintenant l’impiété et la superbe règnent, et ma Passion est comme oubliée et négligée. » C’est un avertissement. Au même siècle, Catherine de Sienne : « À la lumière de la foi, je suis forte, constante, persévérante. » Au XVIe, Charles Borromée : « Dieu nous a envoyés vers vous pour faire tomber les écailles de vos yeux et pour que nous vous aidions à vous lever. » Thérèse d’Avila, à la même époque : « Que rien ne te trouble, que rien ne t’épouvante. (…) Dieu seul suffit. »
Animés par cette espérance, nous reviendrons dans les semaines et les mois à venir sur tous ces sujets. Mais autrement. En mettant en lumière les grandes figures, les initiatives de prière et de pénitence, qui ont permis à l’Église de se relever. Le Christ lui-même le dit : « Il y a des démons qui ne se chassent que par la prière et le jeûne. » Et ailleurs, il ordonne à ces démons de se taire, même s’ils disent la vérité. Car ils ne cherchent pas à glorifier Dieu.
Comme l’a dit justement Jeanne d’Arc, « le Christ et l’Église, m’est avis que c’est tout un ». Qui lance des pierres à l’Église atteint le Christ. Dans les années 1970, le cardinal Garrone a eu cette phrase admirable, pour affirmer son attachement à l’Église dispensatrice de grâce, face à tous ceux qui voulaient la quitter : « Je crois en l’Église, que je n’en sois jamais séparé. »
C’est dans cette perspective que nous voulons nous placer, à notre humble mesure. Merci de nous faire confiance.