Sainte Geneviève, ancrage spirituel - France Catholique
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Funérailles catholiques : un temps de conversion
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Sainte Geneviève, ancrage spirituel

Mgr Matthieu Rougé, évêque du diocèse de Nanterre où naquit la sainte, vers 420-423, et Madame Pauline Poujeaux, Présidente de l’Association des Dames de Sainte Geneviève, ont bien voulu répondre à nos questions. Ces interviews ont été réalisées dans le contexte de la Neuvaine annuelle de Sainte Geneviève qui se déroulait du 3 au 11 janvier 2019, et de l’actualité brûlante des revendications exprimées par les « gilets jaunes ».
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Sainte Geneviève est la patronne de Paris et du diocèse de Nanterre. Que vous apporte-t-elle ?

Mgr Matthieu Rougé (MR) : La maison natale de sainte Geneviève, à proximité de la cathédrale de Nanterre, enracine notre jeune diocèse dans la profondeur de la tradition chrétienne. L’audacieux témoignage de foi et de charité de cette jeune femme consacrée constitue comme une synthèse de la vocation contemporaine de notre Église.

Pauline Poujeaux (PP) : Elle est pour moi, pour nous toutes, un modèle de vie active, d’intelligence bien employée, de simplicité dans la vie quotidienne malgré la grande richesse. Je me suis engagée à son service, afin que ne s’éteigne pas le souvenir et la reconnaissance des parisiens. Comment ? En parlant d’elle à chaque occasion possible, en soulignant son action, en expliquant que le culte qui lui est rendu est vivant de nos jours, en  participant activement à ce culte.

Sainte Geneviève : vérité historique ou légende ?

MR : La vie de sainte Geneviève a fait l’objet de beaucoup de travaux historiques qui mettent en lumière les aspects sûrement authentiques. Beaucoup d’historiens pensent d’ailleurs que la presqu’île de Gennevilliers, le méandre de la Seine au cœur duquel se situe Nanterre, est sans doute le véritable lieu de naissance de la ville de Paris.

PP : Il est incontestable que Geneviève a vécu à Nanterre et Paris au Ve siècle, qu’elle est mêlée à l’histoire de France : invasion d’Attila en 451, blocus de Paris vers 470 – 580, amitié avec Clotilde et influence sur Clovis. Si on prend le mot légende dans le sens : ce que l’on doit dire à son sujet, voilà les bases. Une vie écrite 20 ans après sa mort contient des références historiques vérifiables, et bien sûr une part de “merveilleux”. Mais n’oublions pas que les miracles accomplis par sainte Geneviève : guérisons physiques, expulsion de démons, guérisons spirituelles sont exactement dans l’esprit de ceux que le Christ a accomplis.

Quelles sont les qualités de sainte Geneviève ?

MR : L’enracinement spirituel, l’audace et la charité.

PP : Je rajouterai le courage et même l’intrépidité, la modestie…

Quelle est la partie de sa vie qui vous marque le plus ?

PP : Son engagement politique. En particulier, toutes les fois où elle est allée affronter des personnes a priori plus fortes qu’elle : les hommes de Paris se préparant à fuir devant Attila, le roi Childéric et le roi Clovis.

MR : Ce qui me semble le plus significatif et fécond pour aujourd’hui est la synthèse de sa consécration et de son engagement pour la cité : la dynamique de la foi agissant par la charité (Galates 5, 6) s’est véritablement incarnée dans sa vie.

Depuis quelques semaines, l’actualité en France est plus ou moins insurrectionnelle : la crise, l’augmentation de la pauvreté, la baisse des salaires… La France et Paris semblent en danger. Quelle serait la réponse de sainte Geneviève ? De quel côté serait-elle : du côté des gilets jaunes ?

PP : Sainte Geneviève a toujours (je cite les litanies) compati aux souffrances des petits ; pour autant, difficile de répondre à cette question, de quels gilets jaunes s’agit-il ? De ceux qui ont fait des demandes légitimes et ont obtenu un résultat ? De ceux qui s’obstinent et attaquent l’économie de notre pays ? De ceux qui cassent ou incitent à casser ?

MR : Je pense, qu’il est hasardeux de se livrer à la « sainteté-fiction ». Mais l’esprit de sainte Geneviève me semble suggérer de cultiver à la fois la sérénité, la lucidité (pour comprendre les souffrances qui s’expriment si violemment) et l’action (pour répondre de manière profonde aux véritables enjeux contemporains, qui ne sont pas seulement matériels).

La vie de Sainte Geneviève est marquée par la prière, le jeûne et des actes héroïques. C’est ce qui manque le plus aujourd’hui à l’Église de France : de risquer sa Foi ?

MR : Ce à quoi nous sommes appelés, en tout cas, c’est à aller plus loin et dans l’enracinement spirituel et dans l’engagement missionnaire et caritatif, sans jamais opposer ces dimensions constitutives de l’identité chrétienne authentique.

PP : Pourquoi dire que dans l’Église de France on ne risque pas sa Foi ? Tant de personnes prient pour d’autres intentions que leurs intérêts personnels, jeûnent non pas pour maigrir mais pour purifier leur vie, font des actes héroïques même si au quotidien cela ne se voit pas. Les actes héroïques ne sont pas forcément spectaculaires, il peut s’agir d’actes très simples qui demandent beaucoup de courage.

Qu’attendez-vous de 2019, et surtout qu’allez-vous faire de plus (ou de moins) qu’en 2018 ?

PP : J’attends l’imprévu et la sérénité nécessaire pour y faire face. Je ne décide pas de faire plus ou de faire moins en ce qui me concerne, je fais le vœu que nous soyons plus nombreux à être convaincus que ce ne sont pas les discussions, les indignations, les projets chimériques qui changeront le sort chroniquement difficile de notre pays – et du reste du monde – mais notre prière confiante.

MR : J’attends beaucoup du Seigneur en 2019 mais c’est Lui qui choisit sa manière de nous combler. Je lui demande cependant, comme Jésus nous en a donné la consigne, d’envoyer des ouvriers dans la belle et abondante moisson du diocèse de Nanterre. 2019 sera ma première année pleinement épiscopale et elle sera pleinement dédiée à la découverte du diocèse qui m’est confié pour en devenir vraiment le pasteur que le Seigneur a voulu lui envoyer.