Sagrada familia : La grande tâche de la concorde et l’espérance de l’humanité - France Catholique
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Le martyre des carmélites
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Sagrada familia : La grande tâche de la concorde et l’espérance de l’humanité

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Pèlerinage en Espagne, deuxième diptyque : la « Sagrada Familia », au coeur de Barcelone, chef d’œuvre universellement connu, rencontre de la Création, de l’Ecriture et de la liturgie, dans une synthèse de pierre, de vitrail, de céramique, où les techniques les plus osées disparaissent derrière une puissante beauté. L’Espagne catholique dit sa joie par milliers, brandit ses calicots – « Benvenido ! » -, agite les drapeaux jaunes et blancs du Vatican, scande « Be-ne-dic-to » et « Viva el Papa ! ». Le Pape invite à la « grande tâche » de manifester que « Dieu est un Dieu de paix, de liberté, de concorde », et à voir dans la famille « l’espérance de l’humanité ».

Benoît XVI, a poussé l’immense portail de bronze où le Notre Père se lit en 50 langues, pour consacrer la nouvelle basilique, fondée en 1822 par une association catalane d’amis de saint Joseph – circonstance providentielle soulignent le cardinal Sistach et Joseph Ratzinger. Deux ans plus tard, Antoni Gaudi (1852-1926) était choisi pour être l’architecte en chef. Il en a fait une gigantesque et riche forêt de symboles accrochés à ces colonnes-arbres de 60 mètres. L’architecte en chef, Jordi Bonet i Armengol, a pu révéler quelques arcanes du temple inachevé. Il faudrait une douzaine d’années pour compléter la façade de la « gloire » après celle de la Nativité et de la Passion, surmontées de 4 tours (l’édifice en comptera 18), les sacristies et la tour centrale qui portera la croix dans le ciel à 170 mètres.

La Jérusalem céleste, la Cité de Dieu de l’apocalypse descend à la rencontre de la Cité des hommes pour que la Cité des hommes devienne Cité de Dieu, pour que, dit la liturgie de consécration, « les pauvres puissent trouver miséricorde, les opprimés obtenir la vraie liberté et tous les hommes se revêtir de la dignité d’enfants de Dieu. »

Benoît XVI y lit un symbole de l’amitié sainte: « Ici, sont unies la vérité et la dignité de Dieu à la vérité et la dignité de l’homme. Par la consécration de l’autel de cette église, gardant présent à l’esprit que le Christ est son fondement, nous présentons au monde Dieu qui est l’ami des hommes, et nous invitons les hommes à être amis de Dieu. »

« Telle est la grande tâche, a insisté Benoît XVI, montrer à tous que Dieu est un Dieu de paix et non de violence, de liberté et non de contrainte, de concorde et non de discorde. En ce sens, je crois que la consécration de cette église de la Sagrada Familia, à une époque où l’homme prétend édifier sa vie en tournant le dos à Dieu, comme s’il n’avait plus rien à lui dire, est un événement de grande signification. »

L’eau et la pierre. Au début de la célébration, le Pape a procédé à l’aspersion de la pierre du monumental autel de 7, 5 tonnes, aspersion rituelle qui rappelle les aspersions de l’Ancien Testament, et qui s’est ensuite prolongée par l’aspersion de l’assemblée, en souvenir de la purification baptismale. La célébration de la Parole a culminé dans le silence qui a prolongé les applaudissements suscités par l’homélie.

Pour la première fois, le credo d’une foule de six mille cinq cent baptisés a fait vibrer ces voûtes en mouvements ramifiés en hyperboles, paraboles, cônes et ellipses où danse la lumière. Pour la première fois les litanies y ont chanté les deux mille ans du pèlerinage de sainteté de l’Eglise.

L’huile. Puis le Pape s’est dépouillé de la chasuble d’or – il l’offrira à la basilique – et du pallium de laine du Bon Pasteur pour se ceindre d’un tablier blanc et oindre l’autel, à mains nues, d’une huile dorée, abondante. Chaque croix de la nouvelle basilique a ensuite été ointe à son tour.

Le parfum. Pour la première fois, les volutes de l’encens transparent sont montées de l’autel comme l’offrande du Christ pour l’humanité, comme la prière de l’Eglise pour le monde. Benoît XVI a déposé l’encens dans le brasier posé sur l’autel puis dans l’encensoir, avant de parfumer tout l’espace sacré, tandis que les turiféraires portaient le parfum du Christ au long des nefs pour encenser l’assemblée, temple de Dieu, pierres vivantes, des paroisses catalanes aux souverains d’Espagne.

Le lin, et les fleurs. L’autel a été revêtu des trois draps de lin liturgiques, d’une guirlande de fleurs, et de la croix.

La lumière. L’oraison demande que « brille dans ce temple la lumière du Christ pour que tous les peuples parviennent à la vérité ». Le diacre, recevant la flamme des mains du pape, a allumé les sept grands cierges de l’autel, et douze séminaristes ont répandu cette lumière dans l’assemblée.

L’orgue. Pour la première fois l’orgue – si présent dans l’architecture des tours où joue le vent – a soufflé dans ses 1492 tuyaux resplendissants, pour joindre ses voix à celle du peuple de Dieu.

« Que signifie faire la dédicace de cette église ? s’est demandé le pape. Au cœur du monde, sous le regard de Dieu et devant les hommes, dans un acte de foi humble et joyeux, nous avons élevé une imposante masse de matière, fruit de la nature et d’un incalculable effort de l’intelligence humaine qui a construit cette œuvre d’art. Elle est un signe visible du Dieu invisible, à la gloire duquel s’élancent ces tours, flèches qui indiquent l’absolu de la lumière et de celui qui est la Lumière, la Grandeur et la Beauté mêmes ».

Gaudi, a-t-il rappelé, se nourrissait de « trois grands livres », en tant qu’homme, croyant et architecte : « le livre de la nature, le livre de la Sainte Écriture et le livre de la Liturgie ».

« Ainsi, il a uni la réalité du monde et l’histoire du salut, comme elle nous est racontée dans la Bible et rendue présente dans la Liturgie. Il a introduit dans l’édifice sacré des pierres, des arbres et la vie humaine, afin que toute la création converge dans la louange divine, mais, en même temps, il a placé à l’extérieur les rétables, pour mettre devant les hommes le mystère de Dieu révélé dans la naissance, la passion, la mort et la résurrection de Jésus Christ. »

C’est aussi ce qui fait son actualité : « Il collabora de manière géniale à l’édification d’une conscience humaine ancrée dans le monde, ouverte à Dieu, illuminée et sanctifiée par le Christ. Et il réalisa ce qui est aujourd’hui une des tâches les plus importantes : dépasser la scission entre conscience humaine et conscience chrétienne, entre existence dans ce monde temporel et ouverture à la vie éternelle, entre la beauté des choses et Dieu qui est la Beauté. Antoni Gaudí n’a pas réalisé tout cela uniquement avec des paroles, mais avec des pierres, des lignes, des superficies et des sommets. »

Gaudi lui-même, « ouvrant son esprit à Dieu, a été capable de créer dans cette ville un espace de beauté, de foi et d’espérance, qui conduit l’homme à la rencontre de Celui qui est la vérité et la beauté même » .

Ce temple extraoridinaire dédié à la Sainte Famille de Nazareth – grâce à saint José Manyanet y Vivès – a aussi fait résonné cet appel bien au-delà de ses portails : « L’Église demande des mesures économiques et sociales appropriées afin que la femme puisse trouver sa pleine réalisation à la maison et au travail, afin que l’homme et la femme qui s’unissent dans le mariage et forment une famille soient résolument soutenus par l’État, afin que soit défendue comme sacrée et inviolable la vie des enfants depuis le moment de leur conception, afin que la natalité soit stimulée, valorisée et soutenue sur le plan juridique, social et législatif. Pour cela, l’Église s’oppose à toute forme de négation de la vie humaine et soutient ce qui promeut l’ordre naturel dans le cadre de l’institution familiale. » L’église deviendra tout à l’heure basilique. Sous les applaudissements, le cardinal archevêque de Barcelone Lluís Martínez Sistach lira la bulle papale. Les protestations et les insultes ont beau ne pas déarmer, à l’angélus, le pape redira que la famille est « l’espérance de l’humanité ».

Enfin, la beauté appelle la sainteté et la charité effective: « Contemplant avec admiration ce saint espace d’une beauté fascinante, avec tant d’histoire de foi, je demande à Dieu qu’en cette terre catalane se multiplient et se fortifient de nouveaux témoins de sainteté, qui offrent au monde le grand service que l’Église peut et doit rendre à l’humanité : être une image de la beauté divine, une flamme ardente de charité, un canal pour que le monde croie en Celui que Dieu a envoyé (cf. Jn 6, 29). » A la suite de Gaudi qui avait fondé, avec le curé, une école pour les maçons du chantiers et pour les enfants pauvres du quartier.

La procession d’offrande a pu commencer, entraînant la liturgie dans le mystère du sacrifice, de la Présence et de la communion. Un chœur généreux de 800 voix murmure: « Panis angelicus », le pain des anges devient le « pain des hommes », « réalité admirable », le Christ se fait « pauvre et humble serviteur » et transforme invisiblement l’univers symboliquement rassemblé entre ces nefs.

NB

Des photos sur le site du Figaro

http://www.lefigaro.fr

http://www.latribune.fr/

L’homélie du dimanche matin sur le site de La Croix

http://www.la-croix.com/Homelie