« Rien de plus naturel que La Fontaine » - France Catholique
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Funérailles catholiques : un temps de conversion
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« Rien de plus naturel que La Fontaine »

À l’occasion des 400 ans de la naissance de Jean de La Fontaine (1621-1695), le comédien Fabrice Luchini évoque son attachement au fabuliste, dont les Fables parlent si bien de nous. Il livre aussi son regard sur le christianisme contemporain.
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Fabrice Luchini

Fabrice Luchini

© Robin Nitot

Vous récitez souvent des Fables de La Fontaine dans vos spectacles. Quelle est l’origine de cette prédilection ?

Fabrice Luchini : C’est la partition qui était exigée par mon professeur, Jean-Laurent Cochet, il y a 45 ans : il imposait une scène classique, une fable de La Fontaine, et à partir de l’exécution de la fable, Jean-Laurent Cochet pensait qu’un acteur était armé techniquement pour résoudre tous les problèmes de toutes les langues possibles, c’est-à-dire Racine, Corneille, Molière ; et évidemment après les contemporains. Car la langue de La Fontaine alterne une rigueur absolue qui fait penser à la contrainte du XVIIe siècle, avec une liberté orale. Pour Cochet, La Fontaine a été tout le temps ânonné, récité… Lui a trouvé une technique pour résoudre le problème de cette narration.

Quel est le talent spécifique de La Fontaine ?

Il n’y a jamais de rhétorique dans La Fontaine, et sa rime n’est pas mécanique. C’est un moment un peu unique dans l’histoire de la littérature parce qu’au fond, c’est un moment où il ne sait pas lui-même ce qui lui est arrivé : ses Contes sont moins exceptionnels, ses pièces de théâtre ne sont pas très bonnes… Viennent alors soudainement ces Fables géniales, qui sont une adaptation ! La Fontaine a adapté Ésope, qui était illisible, lourd, pesant. Le génie de La Fontaine est un génie d’adaptateur. Mais ce n’est pas rien d’adapter, dans son cas, c’est même réinventer. Il a une fable qui commence par :


« Un Lièvre en son gîte songeait
(Car que faire en un gîte, à moins que l’on ne songe ?)
Dans un profond ennui ce Lièvre se plongeait :
Cet animal est triste, et la crainte le ronge. »

C’est l’illustration du confinement si l’on veut l’analyser de façon « sociétale », mais il y a une autre fable du confinement : L’Ours et l’Amateur des jardins :


« Certain ours montagnard, ours à demi léché »

(Il s’interrompt.) Il y a tout La Fontaine là-dedans !
« À demi léché », on ne sait pas s’il est bien léché, mal léché, il est « à demi léché » :


« Confiné par le sort dans un bois solitaire,
Nouveau Bellérophon vivait seul et caché :
Il fût devenu fou… »

(Il s’interrompt à nouveau.) Et là, La Fontaine a une phrase qui s’adapte très bien au confinement :


« … la raison d’ordinaire,
N’habite pas longtemps chez les gens séquestrés. »

Voyez comme c’est léger ! Ça n’appuie jamais, comme disait Gide. Rien n’est plus naturel que La Fontaine. Le lecteur n’a pas compris ? Ce n’est pas grave, La Fontaine avance, on va ailleurs ! Il n’y a pas à essayer de connaître la philosophie de La Fontaine, s’il était un auteur chrétien ou non… il n’est que l’adaptateur d’une morale et d’une pensée qui ne viennent pas de lui mais des Anciens, des humanistes, de l’Antiquité, du fin fond des âges…

Retrouvez l’intégralité de l’entretien dans le magazine.