On se souvient peut-être que le 1er mai dernier, place Saint Pierre, le pape François a évoqué avec tristesse la situation des travailleurs de l’industrie textile du Bangladesh, qui travaillent pour des salaires misérables dans des conditions épouvantables. C’est l’effondrement d’un immeuble délabré de Dacca qui a éveillé l’attention sur ces travailleurs dont on découvre que le sort dépend étroitement de nos pays, qui importent massivement des vêtements fabriqués dans ces pays dits émergents, dans le cadre des processus des échanges mondiaux. Les défenseurs de la mondialisation expliquent que ce développement du commerce international est à l’origine d’un développement vertigineux des nations les plus pauvres. L’exemple du Bangladesh serait significatif. Grâce au textile qui représente les trois quart de ses exportations, il est devenu le second exportateur du monde dans ce secteur. Il a diminué de près d’un tiers son taux de pauvreté en vingt ans et bénéficie d’un taux de croissance de 6 %.
Mais il y a un revers de la médaille que met en évidence Élisabeth Dufourcq dans une tribune du Figaro paru hier. Le millier de cadavres de femmes alignés sous bâche devant leur immeuble effondré devrait secouer nos bonnes consciences. « Il s’agit, écrit l’ancienne secrétaire d’État à la recherche, d’un déséquilibre écrasant : d’un côté le marché aux fringues ; de l’autre des conditions féroces. Entre les deux, à chaque étape de la chaîne des ventes, le culte de la valeur ajoutée d’un coût humain terrifiant. » On a appris ces jours derniers que la chaîne Leclerc, touchée par le scandale, allait être contrainte de réexaminer le système auquel elle participe.
N’avons-nous pas connu un type équivalent d’exploitation lors de la première révolution industrielle dans nos pays d’Europe ? La croissance économique s’est fait à rude prix humain, notamment celui du travail des enfants. Faut-il rappeler que le combat pour le respect de la dignité humaine concerne l’ensemble des réalités sociales. Si la défense de la famille nous retient en ce moment en France, elle ne nous empêche nullement de nous occuper par ailleurs des déséquilibres de l’économie et de leur coût humain. Ceux qui font croire le contraire dénaturent notre engagement qui concerne tout l’homme et n’ignore aucune atteinte à la justice. Le pape François se charge de nous le rappeler à chacune de ses interventions.