Quel est le maître mot de ces 2 000 ans d’histoire ?
Père Bernard Ardura : Le concept de développement. Ce qui est contenu en germe au début se développe et s’épanouit au cours des siècles. Nous, chrétiens, croyons que l’Église est continuellement accompagnée de l’Esprit Saint, ce qui explique le développement de la doctrine. La doctrine, ça ne s’invente pas ! C’est à partir du premier donné de la Révélation que, peu à peu, avec l’aide de l’Esprit Saint, se dessinent une évolution, une explicitation des contenus. C’est ce que nous enseigne l’histoire des dogmes, par exemple.
Comment cela ?
Prenons les deux dogmes les plus récents : l’Immaculée Conception, proclamée en 1854 par Pie IX et l’Assomption, proclamée par Pie XII, en 1950. Ce sont des vérités connues et admises par le peuple chrétien depuis des siècles, des convictions qui sont partagées sans que l’on ait besoin d’en faire un dogme. Puis vient le moment où l’on estime que la question est mûre, suffisamment partagée : elle peut alors être proclamée en tant que dogme. À d’autres moments, les dogmes sont destinés à fixer des concepts contestés. Face aux erreurs de Luther, le concile de Trente a, par exemple, rappelé le mode de présence du Christ dans l’Eucharistie : vraie, réelle et substantielle. Là encore, il s’agit d’officialiser ce qui est déjà cru, pratiqué et célébré dans la liturgie au fil des siècles.
Doit-on s’attendre à des « évolutions » de ces dogmes, comme l’affirment, ou le réclament, certains théologiens modernes ?
Les dogmes sont la formulation, à un moment donné, de ce qui est cru de façon certaine par l’Église d’une vérité de foi révélée par Dieu. On peut les développer, les approfondir, car les dogmes ne sont pas figés et improductifs et servent de base pour un progrès dans la compréhension des mystères de Dieu. Mais quand le dogme a été fixé, il l’a été dans des termes juridiques. On ne revient pas dessus, puisque nous croyons que le dogme n’a pu être formulé qu’avec l’assistance de l’Esprit Saint.
Peut-on aborder l’histoire de l’Église en faisant l’impasse sur le surnaturel ?
Celui qui prétend étudier l’histoire de l’Église doit, par honnêteté intellectuelle – même s’il n’est pas croyant –, connaître la nature de l’Église, comme la nature des relations entre la hiérarchie et les fidèles… Or, si l’on oublie tout ce qui relève de la nature sacramentelle, on passe à côté d’une réalité essentielle. On ne peut pas étudier, par exemple, le gouvernement de l’Église sans connaître le sens du ministère sacerdotal !
Retrouver l’entretien complet dans le magazine.
— Dictionnaire d’histoire de l’Église, Bernard Ardura, éd. du Cerf, 872 pages, 39 €.
— Dictionnaire d’histoire de l’Église, Bernard Ardura, éd. du Cerf, 872 pages, 39 €.