J’ai précédemment affirmé dans ces colonnes qu’en raison de l’acceptation massive de la contraception et du « droit » implicite à la sexualité sans procréation, toutes les tentatives actuelles de bloquer l’avortement et le « mariage » homo sont semblables à une réorganisation de la disposition des transats sur le pont du Titanic. Je concluais avec l’exhortation de l’archevêque Chaput aux prêtres de son diocèse de surmonter leur peur du rejet et de rendre claire la position de l’Église Catholique sur la contraception dans leurs homélies.
Mais j’ai commencé à m’interroger : « dans leurs homélies ? » Quel passage de l’Écriture pourrait être approprié ? Un prêtre a une grande latitude dans l’interprétation des lectures de la messe du dimanche, mais il ne devrait pas forcer sur l’interprétation.
Par exemple, je me souviens d’une homélie de notre ancien curé sur Luc 2:17, qui parle de récolter le blé et de brûler l’ivraie dans un feu « qui ne s’éteint pas » – présentant le texte comme une leçon sur « l’ouverture ». Une autre sur Matthieu 18:15-20, où Jésus dit à ses disciples de traiter les pécheurs récalcitrants comme « des païens et de publicains », était devenue une admonestation à être « compatissant et prompt à pardonner ». Une troisième, sur Marc 1:21 et versets suivant, où Jésus expulse un esprit mauvais dans une synagogue, était devenue une condamnation du racisme. (J’ai oublié quel passage exact avait incité un autre prêtre de paroisse à prêcher que Vatican II enseigne qu’il n’est plus nécessaire de convertir au catholicisme les gens d’autres religions.)
Mais un prêtre consciencieux désirant suivre les avis de l’archevêque Chaput voudrait attendre que la lecture appropriée du Nouveau ou de l’Ancien Testament soit proclamée à la messe. Car l’homélie du prêtre, depuis Vatican II et depuis les instructions papales concernant le Novus Ordo Missae, doit être spécifiquement consacrée à révéler le sens des Écritures.
Comment alors un pasteur peut-il couvrir une catéchèse de base dans le cadre de ces recommandations ? Plus spécifiquement, Baker écrit :
Dans la liturgie révisée, comment le prêtre peut-il donner une présentation systématique et cohérente de la doctrine de l’Église sur le Credo, les commandements, les sacrements dans le cadre d’un cycle de trois ans de lectures des Écritures ?… Il y a peu ou pas de liens entre les lectures d’un dimanche et celles du dimanche suivant. Il en résulte que de plus en plus de catholiques ne savent tout simplement plus ce qu’enseigne leur Église sur des questions aussi basiques que le péché originel, le péché mortel et le péché véniel, l’Incarnation, la Trinité, le Ciel, l’Enfer, le Purgatoire, la Présence Réelle, la résurrection des corps et le reste.
Il mentionne cependant que la Homiletic and Pastoral Review (revue d’homélies et de pastorale) essaie d’incorporer ces instructions systématiques dans les homélies qu’elles publient régulièrement comme ressource pour les prédicateurs.
Le Novus Ordo de la messe est le résultat de changements initiés à Vatican II, mais découlant de demandes d’une réforme liturgique dans les décennies précédentes. Il y avait, disaient les réformateurs, un manque de participation des assemblées au cours de la messe (les gens ne faisant que se tenir debout ou s’agenouiller, réciter leur chapelet, etc.) ; il y avait des moments de silence, quand le prêtre à l’autel, tournant le dos aux fidèles, récitait les prières latines de l’ordinaire de la messe ; à peu près personne ne comprenait le latin, même si chacun pouvait suivre la traduction dans son missel ; et les liturgistes ne devraient-ils pas essayer de redonner vie aux pratiques originelles de l’Église des premiers temps, comme indiqué dans les Épîtres et les écrits patristiques ?
Et il y avait la réunion de nombreux spécialistes au concile – à savoir des réunions avec des protestants. Il y avait un grand optimisme quant à la réussite de l’œcuménisme, et la première étape pouvait être liturgique – éliminer des éléments de la messe non essentiels qui pouvaient être un obstacle à la réunification ; un rappel concret de « la prêtrise des laïcs » et de l’idée de « peuple de Dieu ; mettre l’accent sur la Bible ; et adopter un langage rejoignant l’alternative protestante à la messe, le « repas du Seigneur. »
La Constitution sur la Liturgie Sacrée, Sacrosanctorum concilium, de Vatican II, de même que la mise en œuvre personnelle des directives de cette Constitution par le pape Paul VI, a ouvert la voie à l’usage du langage vernaculaire dans la liturgie de même qu’au remplacement de l’autel par une table pour « le repas du Seigneur ». Aucune directive spéciale ne fut donnée aux prêtres de faire face à l’assemblée (coram populo) plutôt que de faire face à l’autel (ad orientem). Mais cette pratique a été plutôt rapidement adoptée durant les années 70, en même temps que le remplacement de l’autel par une table.
Beaucoup d’entre nous qui ont prêté attention au Novus Ordo de la messe depuis Vatican II sont conscients de nombre « de rajouts liturgiques » qui vont bien plus loin que ce que la Constitution de la Liturgie du pape Paul VI avait envisagé : à savoir l’extension du Baiser de Paix, avec le prêtre se déplaçant à travers toute l’église pour saluer les gens, l’extension de la prière universelle avec un diacre circulant dans l’église pour rassembler les intentions personnelles ; la présence quasi ordinaire dans le sanctuaire de concélébrants ; les enfants invités à entourer l’autel durant la consécration ; un langage « ouvert » tout au long de la messe, même pour parler de Dieu, et le remplacement des hymnes traditionnelles par des chants insistant sur les aspects horizontaux de la communauté et de la présence au repas du Seigneur plutôt que sur la relation verticale avec Dieu.
Fort heureusement, il y a encore des paroisses dans lesquelles de telles « rajouts » ne prévalent pas. Mais même dans le contexte d’une Novus Ordo respectueux, comment un prêtre peut-il suivre l’exhortation de l’archevêque Chaput de prêcher sur la contraception et les autres doctrines de foi et de morale ?
Comme l’indique le père Baker, il est possible, avec de l’organisation, de coordonner l’instruction catéchétique avec les homélies du dimanche. Mais il ne devrait pas être nécessaire, par exemple, d’attendre un an que le texte approprié des Écritures apparaisse à la messe du dimanche. Il faut davantage de flexibilité ; et quand un problème urgent vient au premier plan, le prêtre devrait avoir la liberté de proposer… un sermon à l’ancienne mode.
Howard Kainz est professeur émérite de philosophie à l’université de Marquette.
Illustration : Le pape François célèbre la messe tourné vers l’orient
Source :http://www.thecatholicthing.org/2015/09/05/reflections-on-the-novus-ordo-mass/
Pour aller plus loin :
- Liste des ouvriers pastoraux, Evêques, Prêtres, Religieux, Religieuses et Laics tués en 2011 et 2010
- 5 - Le prêtre et la messe
- A propos du projet de loi espagnol sur l’avortement
- L'archevêque Mgr Chaput et nous autres Étrangers
- Dénoncer les abus sectaires dans la vie consacrée et passer l’épreuve en union au Christ Epoux