« Redécouvrir le sens chrétien des mots » - France Catholique
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« Redécouvrir le sens chrétien des mots »

Charpentée par la foi chrétienne, la langue française relie nos contemporains à leurs racines. Aujourd’hui menacée, sa défense n’en est que plus urgente, selon Pascal-Raphaël Ambrogi, haut fonctionnaire et terminologue, auteur du Dictionnaire culturel du christianisme.
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En quoi le vocabulaire chrétien est-il indispensable pour connaître notre culture ? Pascal-Raphaël Ambrogi : Notre langue est bercée par le christianisme. Rien de plus normal, quand on sait que la foi chrétienne a modelé le continent et irrigue véritablement la mémoire de la France. Que l’on soit croyant ou non, impossible d’ignorer l’environnement catholique, son histoire, ses œuvres, les pierres qui font les églises ! Jusque dans notre langue : le « lavabo » que nous avons dans notre salle de bains n’est pas qu’un simple objet en faïence. Le mot est un verbe latin, le premier mot de la prière Lavabo inter innocentes manus meas, « Je laverai mes mains pour être compté parmi les innocents », que le prêtre récitait autrefois pendant l’offertoire… Pensons aussi à des mots comme « judas » pour les œilletons, un « tollé » qui correspond au cri lancé par la foule à Pilate pour exiger la crucifixion du Christ – Tolle, tolle, crucifige eum (Jn 19, 15), littéralement « supprime-le, supprime-le, crucifie-le » —, ou encore un « capharnaüm », qui tire son nom de la ville citée dans l’Évangile où Jésus est assailli par une foule de malades. Notre langue recèle également nombre d’expressions et proverbes idiomatiques : « Tout travail mérite salaire » dérive de « l’ouvrier mérite son salaire » (Lc 10, 7) ; « être aux cent coups » renvoie au compte à rebours des cent coups de cloches qui annonçaient les vêpres dans les monastères ou encore « pauvre comme Job », qui évoque la figure éponyme de l’Ancien Testament. Ces exemples révèlent que l’enracinement de la langue française dans la foi chrétienne est clair et que la Bible est une des sources de la construction de la langue. Un lexique s’est forgé au long des siècles et habite encore nos discours. Ce qui est grave, c’est la rupture avec le sens des mots et leur étymologie, car cette dernière nous fait remonter le temps jusqu’à nos racines. Notre langue est-elle menacée par le « wokisme » ? Cette offensive pseudo-culturelle qui nous vient des États-Unis est un grand danger, mais elle est ancienne et passe en effet par la destruction de notre langue française. Le plus spectaculaire réside dans les attaques portées contre l’Histoire et ses grandes figures, au mépris du contexte et au prix d’anachronismes… Mais l’attaque la plus perfide et la plus efficace reste celle portée à la langue, notamment par l’introduction d’une forme d’écriture dite « inclusive », de pronoms personnels qui n’existent pas ou, plus récemment, par la simplification du changement de patronyme. Car la première des valeurs à détruire, c’est celle qui va au-delà du simple individu : la famille. Le but de tout cela, c’est de ne retrouver que « l’individu », qui s’épanouit par la consommation et l’assouvissement de ses désirs. Nous faisons face aussi à l’émergence d’une nouvelle langue commune, un « anglo-américain » qui se remarque aussi bien via les anglicismes que nous entendons partout autour de nous, que par les slogans de marques françaises élaborés en anglais. Tout cela contribue à nous couper de nos racines et constitue un obstacle à la communication entre les êtres. Retrouvez l’intégralité de l’entretien dans le magazine.
—  dictionnaire_culturel_christianisme.jpgDictionnaire culturel du christianisme, Pascal-Raphaël Ambrogi, éd. Honoré Champion, 1 040 p., 39,90 €.