Reconnaître le visage du mal - France Catholique
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La justice de Dieu
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Reconnaître le visage du mal

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Les criminels en col blanc peuvent être très astucieux. En 1979, Albert Spaggiari, un cerveau du crime, et sa bande passèrent deux mois à percer un tunnel de 8 mètres aboutissant à la salle des coffres d’une banque de Nice. Ils passèrent quatre jours à vider les coffres, tout un week-end. Ils laissèrent derrière eux  un message : « Sans haine, sans violence, sans armes. » Je me rappelle aussi avoir lu à l’époque une addition qui n’a pas été reprise aujourd’hui : « Nous apprécions les jolies filles. » C’était le bon temps !

Les voleurs de banque ont leurs pratiques pour éviter d’être capturés. Les voyous fuient la scène de leurs crimes. Quand les terroristes ne se font pas exploser, ils tentent de se mêler à la foule sans laisser de traces. La plupart des criminels sont capables de reconnaître le mal et ses conséquences plus facilement que ceux d’entre nous, enfermés dans nos tours d’ivoire.

L’animateur de CNN Don Lemon exprime vraiment cette sensibilité de tour d’ivoire quand il a rapporté récemment l’horrible histoire de cette victime ligotée et bâillonnée à Chicago. Une vidéo de Facebook Live a montré la victime traumatisée, battue, balafrée, sous la menace d’un couteau pendant qu’on entendait les agresseurs dire : « F…les Blancs » et « F…Trump ». Lemon a dit que cet acte n’était pas « le mal », ajoutant que ceux qui l’avaient perpétré avaient « eu chez eux de mauvais exemples ». C’est probablement vrai, mais ce n’est pas toute la vérité.

L’animateur de CNN n’est pas le seul. Beaucoup de prêtres catholiques semblent aussi être incapables de reconnaître le mal dans les actes les plus monstrueux. En recherchant sur internet les commentaires qu’ont faits sur des actes terroristes des prêtres d’un certain âge, on s’aperçoit qu’ils suivent un incontestable cliché. Ils dissocient presque toujours les actes des terroristes islamistes dissocient de la « religion de paix ». Fréquemment – en dépit du fait évident que beaucoup d’islamistes comme Osama ben Laden vivent dans l’aisance – c’est le chômage et la privation économique qui sont mis en cause. La solution habituellement implique un vigoureux appel au « dialogue » (avec qui ?). On ne parle jamais de punition et de mesures justes pour protéger les individus et la société. Pourquoi une telle réponse, totalement déconnectée de la réalité ?

Le problème du chômage, des difficultés économiques, et la nécessité d’un « vrai dialogue » existent. Mais ces réalités toujours présentes dissimulent en grande partie la cause la plus évidente d’actes profondément mauvais et la nécessité d’y répondre en justice. L’incapacité à voir le mal – et notre capacité à choisir le mal – je crois, est le résultat d’une érosion de la foi catholique. Et cette érosion peut être trouvée même parmi les hommes d’église d’un certain âge.

Un évêque de Floride récemment retraité a écrit un message d’adieu, comme cela se fait souvent maintenant, en insistant sur le fait que la jeunesse s’est éloignée de l’Eglise. Son récit (dans lequel il ne mentionne jamais le nom de Jésus) inclut ce passage qui illustre l‘ambiguïté et du manque de confiance dans l’Evangile.

« L’Eglise est en train de perdre un pourcentage alarmant de la plus jeune génération… Ils ne seront fiers de leur Eglise que quand nous serons capables d’inclure dans les problèmes de la vie beaucoup plus que le « droit à la vie » limité à l’avortement. Ils sont installés dans leur tolérance et leur acceptation de ce qu’on a considéré autrefois comme des styles de vie alternatifs… Il est triste que cette génération n’ait pas vu son Eglise aborder avec force et de façon réaliste beaucoup d’autres sujets que l’avortement, l’euthanasie et l’immigration. »

C’est le langage de nos politiques démocrates, non la morale de l’Evangile et du catholicisme. Et Il est difficile de blâmer un jeune de ne pas être terrifié par le « problème » de l’avortement quand des prêtres le réduisent à un problème parmi d’autres. (Il est notable que l’évêque associe « l’immigration » – un problème vraiment politique – aux actes intrinsèquement mauvais de l’avortement et de l’euthanasie). Heureusement nous avons beaucoup de laïcs engagés qui ont montré le caractère vraiment moralement atroce de l’industrie de l’avortement, en soufflant sur les braises encore rouges du langage de la morale catholique.

L’effet global de cette subtile mais réelle perte de confiance dans l’Evangile est indubitable : une incapacité institutionnelle croissante à reconnaître cette véritable horreur du mal aussi bien qu’une incapacité à s’attaquer au mal comme ambassadeurs du Christ. Beaucoup de prêtres catholiques, sciemment ou non, ont fini par devenir de simples fonctionnaires politiques. Ils répondent comme des politiques aux pressions de groupes d’intérêts.

Un ami prêtre m’envoyait récemment ceci :

« Ce matin en me promenant je pensais à l’Ancien Testament qui enseignait que l’homme juste est celui qui, entre autres choses «  ne s’est pas laissé corrompre pour faire tort à l’innocent… » Pourtant les catholiques en général […] se sont laissé corrompre pour détourner les yeux quand l’avortement a été légalisé pour faire avancer la révolution sexuelle et pour gagner la faveur des plus hauts échelons de l’élite culturelle. Ainsi 59 millions d’innocents (aux Etats-Unis en tout cas) ont été échangés pour trente pièces d’argent. J’ai désespéré d’entendre un supérieur religieux considérer ce crime contre l’humanité pour ce qu’il est.

La plupart d’entre nous « dans les professions d’aide et assistance » rencontrons à notre porte des gens dans le besoin et nous pouvons effectivement nous laisser « corrompre » par nos propres « espaces de sécurité ». Bien sûr la plupart des professionnels de tout niveau vivent dans des tours d’ivoire, raisonnablement sûrs et séparés des rues ; et nous n’avons pas besoin de nous en excuser. Mais devrions certainement être reconnaissants pour la sécurité de nos tours. Et le moins que nous puissions faire est de prendre en pitié les victimes du crime.

Nous pourrions aussi honorer les policiers et personnel d’entretien – et tant d’autres – qui travaillent dans les quartiers déshérités et ceux qui combattent le bon combat dans tous ces endroits chauds du monde. Nous commencerions à les honorer en essayant de nous représenter le mal qu’ils endurent et appeler franchement le mal par son nom.

C’est seulement alors que nous pourrions répondre, avec la grâce de Dieu, avec la miséricorde chrétienne tempérée par la justice divine.

https://www.thecatholicthing.org/2017/01/12/recognizing-the-face-of-evil/