La récente et très polémique déclaration du maire écologiste de Grenoble de supprimer les fêtes chrétiennes du calendrier des jours fériés – rejetée par 73 % des Français selon l’Ifop –, aura eu au moins le mérite de faire émerger une autre proposition, au Sénat cette fois, afin d’inscrire les racines chrétiennes dans la Constitution française.
Utopie ? N’est-ce pas le lot des vraies bonnes idées que de paraître improbables, avant qu’elles ne s’imposent dans le débat comme une évidence ? Et qui pense que nous sortirons facilement des impasses actuelles, par la grâce d’un chef providentiel ou d’une nouvelle Jeanne d’Arc ? Bien sûr, nous ne sommes pas à l’abri d’un miracle. Mais en attendant, nous devons travailler dans le domaine temporel, dans la culture, les médias, la politique, pour que ce qui semble souhaitable devienne une réalité. Aide-toi et le Ciel t’aidera, comme le dit le bon sens populaire après La Fontaine.
Le précédent du Concordat
Au sortir de la tourmente révolutionnaire, qui avait notamment conduit aux massacres des Vendéens attachés à leur foi, Napoléon et le pape Pie VII, malgré leurs différends, ont eu la sagesse de s’entendre sur le Concordat de 1801. Lequel, dans son préambule, stipulait que « la religion catholique, apostolique et romaine, est la religion de la grande majorité des citoyens français ». Certes le catholicisme n’était pas mentionné sous la forme d’une « religion d’État », comme le souhaitait Pie VII, mais ce texte de compromis permettra à l’Église de retrouver toute sa place dans la société.
Or, aujourd’hui, la neutralité de l’État en matière de religion est considérée comme un « dogme » intouchable, brandi pour éviter le retour aux guerres de Religion, lesquelles remontent… au XVIe siècle ! Sauf que depuis, la donne a changé : l’islam est devenu la deuxième religion de France, et une enquête de mars 2023 montre que la transmission dans les familles musulmanes est beaucoup plus forte que chez les catholiques. Et il ne s’agit pas seulement d’une affaire de croyance privée, sur laquelle l’État n’aurait son mot à dire. Elle s’accompagne de choix culturels et anthropologiques – comme la place de la femme –, dont les pouvoirs publics doivent dire s’ils sont compatibles avec les droits de l’homme.
Dès lors, et pour éviter de monter les minorités les unes contre les autres comme le font ceux qui flattent le communautarisme religieux, il conviendrait de réfléchir d’urgence à une nouvelle forme de partenariat entre la religion historique de ce pays, l’Église catholique, et les pouvoirs publics. On se souvient qu’en 2004, l’intervention du président français, Jacques Chirac, avait empêché l’inscription des racines chrétiennes dans le projet de Constitution européenne, pour ne pas « privilégier une religion par rapport à une autre ». Erreur fatale – à ce projet de Constitution –, et qui reste une blessure du côté de l’Église : « Dieu s’est vengé », a même déclaré à ce sujet le pape François en 2019 ! Rien n’empêcherait, en théorie, que des discussions se déroulent au niveau de la France.
Encore faudrait-il au préalable que du côté des catholiques, il soit clair dans les esprits que toutes les religions ne se valent pas, du point de vue de l’histoire comme de la théologie : il ne peut pas y avoir de Révélation divine après le Christ. Sans orgueil, mais sans relativisme. Ce qui suppose de reprendre les bases d’un véritable catéchisme.