Radio Notre Dame, durant plusieurs jours, a sensibilisé ses auditeurs aux manifestations du « Parvis des gentils ». Ce bel événement requiert, en effet, l’intérêt de tous ceux qui ont adhéré au projet de nouvelle évangélisation développé depuis Vatican II. Il s’agit de tenir compte de ce qu’on appelait autrefois la déchristianisation de la France et des pays d’ancienne chrétienté. Désormais, les « gentils » se sont les Européens eux-mêmes, alors qu’en d’autres temps le mot désignait les populations sur d’autres rivages. Au treizième siècle, Saint Thomas d’Aquin rédige une Somme contre les gentils qui s’adresse d’abord aux musulmans pour les convaincre de la véracité des propositions de la foi chrétienne. Il s’adresse aussi aux juifs qui résident en partie dans les régions chrétiennes.
Mais pour l’essentiel, la situation a changé. Les chrétiens vivent aujourd’hui au milieu des gentils, c’est-à-dire, en quelque sorte au milieu de nations devenues étrangères ou païennes. L’expression peut d’ailleurs faire problème. J’ai entendu, sur notre antenne, Julia Kristeva contester l’expression avec des arguments intéressants. Les intellectuels athées, disait-elle, ne peuvent être considérés comme des gentils ou des païens, au sens ancien de ces termes. Car ils sont issus du monothéisme judéo-chrétien. Voltaire, Diderot et les philosophes des Lumières ont contesté le christianisme au sein même de la culture chrétienne dont ils étaient issus. La remarque est tout à fait justifiée. Je relève toutefois qu’elle concerne les intellectuels, ceux d’ailleurs auxquels s’adressent en priorité le Parvis des gentils. Car il y a une différence importante entre des personnes qui cultivent les disciplines de la pensée, et les personnes qui sont simplement ignorantes du christianisme, parce qu’elles ne l’ont pas reçu en patrimoine. Cette distinction s’impose en matière d’évangélisation. Il y a ceux qui ont tout à apprendre du message. Et il y a ceux qui ont une position philosophique qui les éloigne de la foi. Avec ceux là, il importe de trouver un terrain commun de réflexion comme Saint Paul tentait déjà de le faire à Athènes au premier siècle.
Chronique lue le 24 mars sur Radio Notre-Dame
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