Vous voulez des gens en marge de la société, des négligés, des invisibles ?
Dimanche dernier, j’attendais dans un bistrot un de mes anciens étudiants, un de mes préférés, avec sa femme que je n’avais pas encore rencontrée. Ils attendaient leur premier enfant. Tandis que j’attendais, j’ai jeté un coup d’œil vers une autre table et j’ai vu quelque chose de remarquable.
C’était un garçon et une fille qui venaient de s’asseoir. Ils ne devaient pas avoir plus de vingt ans, et ils auraient même pu n’en avoir que seize. Lui n’était pas un Monsieur muscle, mais il était grand et bien tourné, comme on disait autrefois, rasé de près et sans tatouages. Elle était mince et jolie, avec des cheveux longs et noirs. Tandis qu’il lui parlait, ses joues étaient rouges de joie, et il souriait d’une oreille à l’autre. Elle lui souriait en retour d’un sourire joyeux et doux. Peut-être qu’ils arrivaient à ce bistrot, droit de l’église, comme moi. Ils étaient lumineux d’innocence.
Ils auraient pu être des parents d’autrefois, qui n’avaient pas encore conclu que le délice qu’ils éprouvaient dans la compagnie l’un de l’autre était vraiment de l’amour, qui n’avaient pas encore décidé de faire durer toujours cette compagnie, et n’avaient pas encore scellé leur amour et leurs vœux par le don total de leurs cœurs et de leurs corps.
Alors, qu’est-ce qu’ils avaient de remarquable ? Lecteur – ami, quand avez-vous vu un tel couple pour la dernière fois ?
Puis, mon jeune ami et sa femme sont arrivés. Lui, n’avait eu aucune idée de Dieu jusqu’au jour où il fit l’expérience d’une vision soudaine et bouleversante pendant l’été qui a précédé sa première année d’études supérieures. Il a passé cet été-là à lire la Bible et à se lancer avec toute sa volonté dans un style de vie nouveau. Il y a de cela sept ans. Il a travaillé comme garde côte, un travail très dur physiquement, de la Nouvelle Ecosse jusqu’aux îles Falkland, et de la République Dominicaine jusqu’à la méditerranée. A bord, ils n’ont même pas un aumônier ni une petite chapelle, d’après ce qu’il me dit, et parfois et il arrive qu’un des matelots se moque de lui quand il le voit s’agenouiller pour prier. Je ne pense pas que la moquerie n’ait jamais été très sérieuse cependant, parce que ce jeune homme a ce que l’on pourrait appeler une formidable présence. Et aussi parce que cela lui est égal.
Donc, j’ai bavardé avec eux, de leurs projets, et il la couvrait d’un regard fier et protecteur, et elle le regardait avec admiration et délice. Et de nouveau j’avais devant les yeux la pureté, droite et juste, bien qu’elle ait traversé la fumée de ce monde amer.
Pourquoi est-ce si rare de voir des gens comme cela ?
Je remarque que le Président américain s’est assuré que lors de sa visite à la Maison Blanche, le pape François rencontre un homme représentant un groupe qui est à présent toujours au centre de l’attention. Même quand on descend dans les profondeurs du journal, dans les pages sportives elles-mêmes, ils sont là.
Il ne se passe pas de jour sans qu’on entende parler de leurs problèmes, leurs demandes, leurs accusations, leur histoire culturelle en grande partie inventée, etc. Parfois, comme c’est le cas de l’homme que le Président a élevé à une brève célébrité, ils rejettent avec mépris les enseignements de l’Eglise. Parfois ils suivent fièrement ces enseignements mais réclament que tout le monde les applaudisse pour cela, et les remarque, et même change sa manière d’élever ses enfants à cause d’eux.
J’en suis fatigué. Et je deviens carrément furieux quand je considère les gens dont le bien être n’intéresse jamais personne.
Pensez au garçon et à la fille à l’autre table. Maintenant, trouvez-moi une seule habitude sociale, une seule ordonnance locale, ou loi de l’Etat, une seule œuvre courante de littérature étudiée au lycée, un seul auguste discours en provenance des hauteurs épiscopales, une seule session de prélats réunis en conseil, une seule institution sociale, le moindre conseil de la part des professeurs de « santé », une seule parole d’encouragement ou d’orientation ou de louange de la part des medias ou des amateurs d’art ou de ces imbéciles bavards de l’académie, qui montrerait pas même de la gratitude pour leur pureté, mais simplement la conscience que de tels jeunes gens existent.
Qui fait la moindre attention à eux ?
C.S. Lewis, un jour, a écrit que si nous comprenions vraiment le sens des choses, nous verrions que toute la politique, l’économie et la technologie n’existent que pour qu’un couple d’amis puissent bavarder à loisir à propos de bons livres ; et je dirais plutôt, pour qu’un père et un mère puissent s’asseoir tranquillement sur le pas de leur porte en regardant leurs enfants jouer, ou qu’un garçon et une fille, complètement absorbés l’un par l’autre, puissent déjeuner dans un bistrot sans penser une seule fois à des choses impudiques, sordides, impitoyables, licencieuses ou basses.
Et je pourrais en dire autant à propos de nos directives pastorales en ce qui concerne la jeunesse et le sexe. Voilà les gens que nous devons aider, et ne considérons pas qu’ils vont survivre à l’assaut quotidien de mensonge et de méchanceté. Nous voulons que tous les bistrots de toutes les petites villes du pays aient la grâce d’entendre le rire de jeunes amoureux innocents. Que faisons-nous pour que cela soit ?
Je pourrais le dire comme cela : Pourquoi faisons-nous tout ce que nous pouvons pour nous assurer que de tels jeunes soient aussi rares que des diamants ? Si nous donnons toute notre attention à des gens dont les désirs physiques sont désordonnés, souriant à Sodome, et faisant bonne figure à Gomorrhe, disant avec hypocrisie et sans cœur que nous voulons être charitables, nous rejoignons implicitement la bande de leurs camarades de lycée qui se moquent d’eux. Nous affirmons implicitement que ce sont des imbéciles. Et, à Dieu ne plaise, il peut même arriver que ces quelques derniers innocents l’approuvent.
Marginaux ? Venez voir le village déserté.
Pour aller plus loin :
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