Qui ose gagne - France Catholique
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La justice de Dieu
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Qui ose gagne

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Avant que John Wayne ne fasse connaître les Bérets Verts aux Américains et avant que les Navy SEAL (forces spéciales de la Marine) ne captivent l’Amérique par leurs exploits, la Grande-Bretagne avait sa propre force d’élite pour les opérations spéciales, le Special Air Service, ou SAS. Datant de 1941, la devise du SAS est simplement : « Qui ose, gagne »

C’est vrai. Nous considérons parfois que l’audace est une vertu humaine (ou comme un vice plus ou moins admirable, comme dans le terme « daredevil », casse-cou), opposée d’une certaine façon à la vertu plus surnaturelle de prudence, que l’on considère habituellement aujourd’hui comme de la précaution.

Mais l’audace bien comprise est en réalité le courage en action, piloté par la prudence, cette dernière guidant toutes les vertus. Et tous ceux qui croient que l’audace de nos forces spéciales d’opérations n’est pas guidée par une prudence rigoureuse n’ont jamais assisté à l’entraînement consciencieux et à la préparation méticuleuse que requiert toute mission.

En tant que catholiques, il nous faut avoir à l’esprit l’audace en toute époque et partout. Il existe des indications et des exemples d’audace dans toute la Bible : Abraham se lance dans son aventure, Jacob défie le Seigneur dans une lutte corps à corps, les Apôtres défient l’autorité pour exprimer la vérité.

Tous les défis ne se terminent pas bien, évidemment : Adam et Eve l’ont découvert lorsqu’ils ont mangé du fruit défendu. Il y a une distinction vitale et de la plus grande importance entre les défis éclairés par l’amour de Dieu et par la prudence, qui entraînent le don de soi, et ceux inspirés par l’orgueil et l’égoïsme sous une forme ou une autre.

Mais les saints parlent de l’audace tout au long de l’histoire de l’Église : leurs vies témoignent inévitablement d’une forme d’audace. L’Église recherche des preuves de vertu héroïque lorsqu’elle examine un dossier de béatification. L’héroïsme et l’audace vont de pair.

Dans sa Prière Universelle, le pape Clément XI prie ainsi : « Rend moi prudent quand j’élabore des projets courageux, quand je prend des risques. Le bienheureux cardinal Newman nous dit : C’est là que se trouve la noblesse de la foi, dans le fait que nous avons le cœur pour oser quelque chose. »

L’audace prend des formes nombreuses, qui n’impliquent pas toutes le courage physique. J’ai été frappé en lisant The Catholic Thing cette semaine. Hadley Arkes (voir : Historique juif et jeunes prêtres) fête le second anniversaire de son entrée dans l’église catholique avec une chronique sur sa retraite en compagnie d’un groupe de jeunes prêtres.

Sa décision d’entrer dans l’Église a été, évidemment, un acte audacieux. Mais je pense moins ici à ses racines Juives, qui constituent à bien des égards une base « naturelle » et essentielle pour la foi Catholique, qu’à la réaction de ses collègues professeurs de l’université de Amherst.

Et les jeunes prêtres dont parle Hadley, ceux qui vont garantir « que l’Église, au cours de cette génération à venir, sera vigoureuse, énergique et joyeuse », sont engagés dans un réel défi : s’attaquer aux conventions du moment et consacrer leurs vies au service des autres.

Entrer dans l’Eglise, ou y revenir après s’en être un temps éloigné (Voir la chronique de Francis Beckwith d’hier,Je suis allé à confesse, je n’avais pas le choix), peut être un réel moment d’audace, en particulier si cela oblige à changer des habitudes de pensée profondément ancrées en soi, ou si cela soulève par la suite des objections dans la famille et chez les amis. Cela peut également être le cas si l’on effectue une démarche de réconciliation avec un ami ou un parent avec lequel on s’est brouillé.

Se marier et avoir des enfants, exemples de dons de soi à n’en pas douter, c’est audacieux et intimidant : nous prenons des engagements sérieux, sans savoir ce qu’en seront les conséquences. À notre époque d’abondance exceptionnelle, l’histoire du jeune homme riche, qui refusa le défi plutôt que d’abandonner ses possessions, apparaît encore plus significative.

Les disciples, qui avaient renoncé à leur famille et à leur profession quand ils ont reçu l’appel du Christ, se sont parfois demandé ce qu’ils auraient en retour – si le défi en valait la peine.

Et il arrive que la prière soit un acte audacieux. À la messe, dans le Rite de Communion, le prêtre introduit la Prière du Seigneur en ces termes : « Comme nous l’avons appris du Sauveur, et selon son commandement, nous osons dire… » Pour ceux qui n’ont jamais prié ou qui sont dans un désert de sécheresse spirituelle, le fait simplement de lever les yeux sans désespoir peut exiger de l’audace.

A toute époque et en tout lieu, l’Église est mise au défi d’annoncer l’Évangile jusqu’aux extrémités de la terre. Mais les époques ont chacune leurs propres formes de démarches audacieuses que les fidèles sont appelés à accomplir.

Aujourd’hui, et probablement à l’avenir, il faudra que les catholiques en Amérique osent exprimer les vérités du Magistère. Dans certains cas, cela nécessitera de rappeler à la nation l’attitude des Pères fondateurs (la plupart non catholiques) par rapport à la loi naturelle et à la croyance en Dieu : selon eux, celle-ci est essentielle pour garantir une liberté ordonnée et sans licence. Cela exigera des discussions sur les devoirs qui précèdent les droits légitimes.

Dans d’autres situations, cela nécessitera d’affirmer avec fermeté les vérités de la culture de vie : sur l’avortement, la recherche médicale incontrôlée, le transhumanisme, les dangers principaux de l’état moderne administratif et bureaucratique, et d’autres menaces concernant la personne humaine et l’opportunité de choisir une vie authentiquement bonne.

L’audace viendra lorsqu’il s’agira d’affronter probablement de plus en plus les cris et les réactions d’intimidation, considérés comme de la « tolérance ». Ces réactions finiront probablement par être autre chose que des réprimandes verbales ou des menaces de justice (bien que, pour l’instant, il y ait une abondance de gens, catholiques ou non, prêts à apporter leur aide.)

Alors que ceci est un phénomène nouveau dans le contexte Américain, l’Église a déjà connu cela. Dans de nombreux endroits du monde aujourd’hui, exprimer la vérité en parole ou en actes nécessite d’avoir véritablement du courage et de prendre des risques.

Le bienheureux pape Jean-Paul II, qui a osé s’opposer à la machine totalitaire qui était sans doute la plus grande et la plus redoutable de l’histoire, a expliqué en des termes célèbres comment procéder : « N’ayez pas peur de pénétrer dans l’inconnu. Avancez simplement sans avoir peur et en sachant que je suis avec vous, et que donc il ne peut rien vous arriver de mal ; tout est bien, très bien. Agissez ainsi avec une foi et une confiance entières. » Un thème récurrent de son pontificat, c’était : « N’ayez pas peur. »

Qui ose, gagne.


 
Joseph R. Wood est un ancien conseiller à la Maison Blanche qui a travaillé sur la politique étrangère, y compris les relations avec le Vatican.

Source : http://www.thecatholicthing.org/columns/2012/who-dares-wins.html