Afin de stigmatiser l’intervention de Frédérique Vidal, ministre de l’Enseignement supérieur, à l’encontre de l’islamo-gauchisme, Jean-Luc Mélenchon a dénoncé une « police de la pensée ». Formule aussitôt rejetée par la ministre, qui au contraire se réclame de la totale liberté de recherche à l’université. Bien loin de vouloir, par son enquête, brider de quelque façon cette liberté, Frédérique Vidal entend protéger le pluralisme à l’encontre de la tentation de la pensée unique. L’expression « police de la pensée » appartient à George Orwell, le grand romancier anglais, qui, dans 1984, s’était employé à dévoiler les mécanismes du totalitarisme, singulièrement dans l’assujettissement des esprits, par le biais du sinistre ministère de la Vérité.
Au moment où le roman est écrit, « police de la pensée » et « ministère de la Vérité » ne peuvent désigner que l’Empire soviétique. Mais il est destiné à éclairer d’abord l’opinion occidentale, et c’est un écrit de combat qui s’insère dans un débat avec des intellectuels fascinés par le mythe communiste. Sommes-nous sur le point de retrouver un débat d’une telle intensité dans des conditions différentes et sur des objets d’une autre nature ? C’est bien possible, d’autant que l’enjeu est vraiment civilisationnel et suscite des oppositions radicales. Cette police de la pensée dénoncée par Mélenchon, elle l’est également par l’autre camp qui argue de manœuvres d’intimidations et d’obstruction pour qui n’entre pas dans les cadres d’une pensée obsédée par les concepts de race, de genre, et plus généralement par une analyse de société dominée par la dénonciation des discriminations, renouvelant ainsi le schéma marxiste de domination de classe. Ainsi le climat actuel peut-il rappeler le climat des années d’après-guerre, celui de l’époque d’Orwell.