Depuis quelques jours, je m’interroge : vais-je me risquer à entrer dans le débat sur les Roms ? Que pourrais-je apporter d’original, de déterminant sur une question d’évidence difficile, plus que complexe ? Entre les deux camps qui s’affrontent, l’un au nom de la non-discrimination et du respect d’une population pauvre, l’autre au nom du réalisme et du refus du laxisme, la tentation serait de prendre une position médiane, appelée aussi de juste milieu. Je n’exclus pas d’ailleurs qu’une telle position ne soit autre chose qu’un échappatoire ou une lâcheté. C’est Jacques Maritain, qui parlait d’un « juste milieu d’éminence », signifiant qu’un jugement prudentiel dans une matière ardue gagnait à échapper aux passions et aux solutions médiocres.
Mais le risque est aussi d’attribuer des bons points aux champions des deux camps pour se tirer d’un mauvais pas. Mieux vaut donc affronter ces deux camps, ou mieux encore prendre le dossier à bras le corps pour tenter d’y voir plus clair. La formule n’est pas non plus forcément heureuse, car elle a un goût un peu bureaucratique ou technocratique. Rien ne remplace le face-à-face avec la population en cause. Nous avons, les uns et les autres, une petite expérience dans la rue avec ces personnes que l’on perçoit tout de suite comme nomades, ou pour reprendre une expression célèbre, « campée aux portes de la cité ». C’est ainsi qu’il y a un siècle et plus on définissait le prolétariat. L’expérience peut être encore plus proche, lorsqu’il s’agit de familles que nous rencontrons fréquemment et qui font appel à notre générosité.
Mais il y a le niveau politique, au-delà de l’interpersonnel. Les déclarations récentes de Manuel Valls montrent l’incertitude d’une action nationale ou européenne. En tout état de cause, il ne s’agit pas de stigmatiser, il s’agit de saisir le problème rom à la racine. À cette fin, on ne s’informera jamais assez. À ce propos, félicitations au Parisien pour l’excellent dossier qu’il a publié dimanche !