Que devrions-nous faire ? - France Catholique
Edit Template
« Ô Marie conçue sans péché »
Edit Template

Que devrions-nous faire ?

Copier le lien

J’ai maintes et maintes fois été ainsi interrogé par des laïcs catholiques : « que puis-je faire pour aider à résoudre la crise de l’Église ? ». Ma réponse : « Priez et agissez. » Selon moi, agir consiste à faire entendre votre mécontentement à l’Épiscopat américain, au Saint-Siège, et aux catholiques de votre connaissance..

La prière est toute-puissante, Dieu veut que nous Lui adressions nos prières pour obtenir les grâces nécessaires afin d’éliminer le mal qui envahit l’Église à présent. Nos prières nous rappellent que nous sommes entièrement soumis à Dieu, et que Dieu veut que notre amour pour Lui se traduise par le doux devoir d’implorer Son aide.

Nous devons également intervenir auprès des pasteurs de l’Église afin qu’ils identifient les sérieux problèmes rencontrés et agissent pour les résoudre.

Le découragement se répand au fil de la longue histoire des agressions sexuelles couvertes par l’Épiscopat. C’est bien compréhensible, mais il faut faire face, car le découragement risquerait de devenir une excuse à l’inaction
.
Les laïcs peuvent en général exercer une grande influence sur leurs pasteurs.
Les évêques ont besoin du soutien de leurs ouailles comme du soutien des pouvoirs publics qui sont sensibles à l’adhésion totale des catholiques envers leurs évêques. Si les pouvoirs publics ont le sentiment que le troupeau est hostile à ses pasteurs, ils exerceront leur autorité pour contraindre les pasteurs à respecter les lois.

La publication du scandale McCarrick et les révélations concernant le comportement épiscopal malsain concernant des prêtres fautifs en Pennsylvanie ne provenaient pas d’évêques ouvrant leurs archives. Ces révélations avaient pour sources les conclusions d’enquêtes légales bénéficiant d’un large soutien populaire.

L’affaire McCarrick s’est répandue parce que l’archevêché de New York décida de proposer des compensations financières aux victimes d’abus sexuels commis par des membres du clergé en échange d’un renoncement à engager des poursuites contre l’archevêché au cas où l’État de New York le permettrait (désormais inévitablement, suite aux dernières élections donnant au Sénat de l’État la majorité aux Démocrates).

Alors que pour certains il s’agit d’une agression contre l’Église (qui ne touchera vraisemblablement pas des enseignants du public), cette possibilité est la réplique compréhensible au grand nombre de personnes susceptibles d’avoir été victimes d’agressions sexuelles de la part de prêtres au cours de leur jeunesse.

Ces victimes ont droit à compensation pour la souffrance infligée par des prêtres sous la responsabilité d’évêques qui par négligence toléraient ces forfaits, en particulier malgré des antécédents de forfaits sexuels commis par des prêtres autorisés à poursuivre l’exercice de leurs fonctions en paroisses ou dans des écoles.

Le fond de tout ce récit provient de la pression de l’opinion exercée pour soutenir l’action légale afin de faire la lumière. Si le journal Boston Globe n’avait pas persuadé un juge de l’État du Massachussetts d’ouvrir ses dossiers sur l’affaire du Père John Geoghan, les horreurs commises dans l’archevêché de Boston seraient restées cachées. Et les prêtres prédateurs en paroisses et écoles auraient continué à bénéficier de la protection épiscopale, à l’abri des sanctions légales et canoniques.

La décision du juge en faveur du Globe bénéficia d’un vaste soutien populaire. Le cardinal Law sentit le devoir de démissionner car privé du soutien de la population catholique de Boston.

Mais le scandale soulevé par cette première affaire aux États-Unis ne fut pas compris par Rome. D’évidence, le Saint-Siège a échoué, ne voyant pas que la situation aux États-Unis nécessitait un examen sérieux.

La perturbation au sein de l’archevêché de Boston n’était pas un cas isolé. Le Saint-Siège aurait dû mesurer l’absolue nécessité de l’envoi par le Pape d’enquêteurs dans tous les diocèses américains afin de mettre en lumière les comportements criminels de membres du clergé et de mettre les jeunes à l’abri des agressions de prêtres semblables à ceux qui avaient été démis dans l’archevêché de Boston. Il ne suffisait pas de laisser chaque diocèse agir seul pour faire le ménage, comme les informations récentes l’exigeaient.

L’inaction de 2002 a son écho, hantant l’Église en 2018. Les laïcs sont vraiment écœurés par les révélations quasi-quotidiennes d’agressions sexuelles commises par des prêtres et par la protection épiscopale dont ils semblent bénéficier.

Les laïcs ne font pas confiance à leurs évêques pour faire la police. Ils ne peuvent comprendre pourquoi le Saint-Siège n’a pas réagi plus nettement, mais a fait barrage au plan de réformes établi par la conférence des évêques pour éradiquer la corruption et restaurer la confiance.

À présent, le rôle des laïcs consiste à voler au secours de l’Église par la prière et par l’action. La pression exercée sur la hiérarchie n’a rien d’une rébellion ni d’un manque de loyauté. C’est une forme d’intervention fraternelle à l’attention de ceux — y-compris S.S. François — qui ont besoin d’être secoués afin d’agir plus vite et plus efficacement pour mettre au jour et arracher ce mal qui gangrène l’Église.

S.S. François a lui-même battu sa coulpe à propos de sa récente défense véhémente de l’évêque Chilien Barros, maintenant limogé. Sans la pression populaire, il est peu vraisemblable qu’il aurait agi aussi vigoureusement.

La situation aux États-Unis est critique, non seulement à cause des événements survenus, mais en raison des répercussions en d’autres contrées. L’Église s’en sortira-t-elle ? Sera-t-elle purifiée par ses responsables, ou faudra-t-il une intervention coercitive gouvernementale ?

Seul, le Pape a le pouvoir d’inciter les évêques à écarter les responsables de cette culture d’immunité qui a laissé libre cours aux fauteurs de crimes sexuels derrière un rideau d’indemnités, de mutations et de mensonges.
Alerter le Saint-Père et le Vatican par des démarches individuelles ou collectives est un puissant moyen pour servir le Seigneur et promouvoir le véritable bien de l’Église.

– 19 novembre 2018.

Illustration : Christ, le bon Pasteur – Lucas Cranach le jeune, vers 1540 [Angermuseum, Erfurt, Allemagne]

Source : https://www.thecatholicthing.org/2018/11/19/what-should-we-do-2/