Quand tout vacille : l'heure des saints - France Catholique
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Funérailles catholiques : un temps de conversion
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Quand tout vacille : l’heure des saints

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Thérèse d'Avila, basilique N.-D. de Genève.

Thérèse d'Avila, basilique N.-D. de Genève.

© Fred de Noyelle / Godong

«Le monde est en feu. » Cette interpellation des consciences de sainte Thérèse d’Avila, au XVIe siècle, n’a pas pris une ride : on croirait ces lignes écrites pour notre temps ! Que ce soit à l’extérieur du pays, sur cette Terre sainte à nouveau déchirée par la violence et le risque de montée aux extrêmes, ou en France, avec un terrorisme islamiste dont le pouvoir temporel semble impuissant à prévenir les récidives.

Chez la grande réformatrice du Carmel, le bouleversement du monde d’alors, lié aux grandes découvertes, s’ajoute à la confusion des esprits et au renversement des certitudes, au contact de la modernité naissante et de la Réforme protestante qui divise l’Europe et la France : « On voudrait en finir avec son Église ! », s’exclame-t-elle. Là encore, le parallèle avec notre époque est éclairant : les interrogations et inquiétudes développées autour du synode mettent en cause, de manière aiguë, un certain rapport à la modernité – célibat sacerdotal, ordination des femmes, autorité et pouvoir hiérarchique…

Réarmement moral et spirituel

Face à l’ampleur des défis spirituels et temporels, ce fut le trait de génie de la grande Thérèse que de proposer une voie originale pour retrouver Dieu, et œuvrer ainsi à un véritable réarmement moral et spirituel, avant même d’être culturel ou politique ! En l’occurrence, une descente en profondeur vers l’intériorité, vers ce Château intérieur où Dieu se fait « plus intime que l’intime de moi-même », comme le disait saint Augustin.

Chez elle, nulle introspection autocentrée, mais le souci de se reconnecter avec la source de la grâce, et ainsi de contribuer à changer le monde extérieur, grâce à ses religieuses réformées qu’elle voyait comme les « soldats d’élite » d’une guerre spirituelle pour le salut des âmes : « Ayez pitié de tant d’âmes qui se perdent », supplie-t-elle le Christ. Le monarque de l’époque, Philippe II d’Espagne, l’avait bien compris, lui qui appuya la réforme du Carmel, afin de promouvoir un réel et profond renouvellement de la foi, dans la lignée du concile de Trente.

Mais quand l’autorité est défaillante et n’assure plus son rôle de protection, vient alors le temps de la sainteté, de la mystique. « Le plus grand risque pour les catholiques n’est pas d’abord de se marginaliser politiquement, mais surtout, de se banaliser spirituellement », écrivait Charles Péguy. C’est-à-dire de s’affadir et de se fondre dans l’esprit du monde. À des heures critiques de l’histoire, la flamme spirituelle a été entretenue par des veilleurs, telles les Carmélites de Compiègne s’offrant sur l’échafaud pour la paix religieuse en France, au point culminant de la Terreur. Ou encore, plus proche de nous, le témoignage du millier de chrétiens de Gaza…

Dans sa dernière lettre apostolique, le 15 octobre, le pape François met en lumière l’actualité de la petite Thérèse de Lisieux, lointaine disciple de sa grande sœur d’Avila. Celle qui a été surnommée la « sainte des Poilus » durant la Grande Guerre est un modèle de confiance en Dieu, souligne le pape. Face à la montée de l’athéisme, elle est aussi celle qui s’offrit pour le salut des âmes par la prière et le sacrifice, dans le quotidien de sa vie. Cette mobilisation-ci est à la portée de chacun d’entre nous.

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P.-S. : Une lecture pour approfondir : Carmel et défi politique, Éditions du Carmel, 2019, 17 €.