QUAND LES FRÈRES S’IGNORENT - France Catholique
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Marie dans le plan de Dieu
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QUAND LES FRÈRES S’IGNORENT

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Que se passe-t-il donc en Yougoslavie ?1 Le treizième travail d’Hercule inventé par l’Histoire, à savoir la décommunisation, ne leur suffit-il pas qu’il leur faille encore se quereller et peut-être bientôt s’étriper ?2 Comment peut-on être Slovène ? Croate ? Serbe ? Macédonien ? Leur est-il si difficile de décider ensemble qu’à telle date tous voteront, éliront une Assemblée qui formera un gouvernement démocratique, lequel n’aura plus qu’à présenter sa candidature à l’Europe en gérant paisiblement le patrimoine commun ? Voilà ce que je pense souvent, Français moyen traditionnellement ignare en histoire, nul en géographie, et bien décidé à laisser à d’autres le soin de résoudre des énigmes probablement imaginaires. Eh oui, chers compatriotes. Cependant observez attentivement ce qui se passe à votre porte, à dix minutes de Trieste, à trente de Rome et de Brindisi. Car c’est à peu près ce qui se passe aussi, de nos frontières au Pacifique, sur toute l’énorme Eurasie à l’exception de la petite presqu’île où depuis des millénaires sont réfugiés les Germains, Celtes et Latins. L’Europe – plus son prolongement nord-américain – n’est qu’un petit esquif perdu dans le tempête, un miracle, comme dit Zinoviev. Mais les miracles, c’est rare, fugace. Il ne faut pas tenter l’Éternel en ne comptant que sur les miracles. Aide-toi, le ciel t’aidera. Et d’abord comprendre. Jusqu’à la Troisième République, jusqu’à la Première Guerre mondiale, toute la moitié sud de la France parlait encore des langues d’oc. De Bordeaux à la frontière italienne se succédaient des dialectes de cette langue où père se disait páïre, páyre, pa, páre, péire, pouèire, páï, pouère (Mistral, Trésor du Félibrige, vol. II, p. 460), où ciel se disait cián, ció, ciár, cièr, cié, cèr, cée, cèl, cèn (vol. I, p. 321). Certes je regrette la disparition de ces dialectes. L’un était la langue natale de mes parents, qui apprirent le français à l’école. Dante parlait le provençal comme le toscan. Il eut même d’abord l’idée d’écrire sa Divine comédie en provençal et c’est encore dans cette langue que s’exprime le troubadour Sordello (Purgatoire). Je le regrette d’un côté, car un enfant n’a pas plus de difficultés à apprendre deux ou trois langues à la fois qu’une seule. Il semble même qu’on apprenne mieux plusieurs langues à la fois qu’une seule3. Mais il n’y a pas longtemps qu’on le sait, et d’un autre côté, nous sommes bien heureux, nous autres Français, de nous comprendre tous dans la langue de Molière et d’ignorer les problèmes de la Yougoslavie. Ce n’est pas au hasard que j’ai choisi les mots père et ciel, les premiers mots du Notre Père, car les voici dans diverses langues slaves, transcrits en alphabet latin : père : otice, otce, ojcze, oce … (il y en a d’autres), ciel : nebesichu, nebesach, nebesich, niebiesech, nebesina, nebesata … (compliqués en outre par leur déclinaison)4. Tous des peuples qui (comme nous le latin) parlaient jadis la même langue ont cessé de se comprendre au haut Moyen Âge. Un seul peuple préhistorique en a enfanté une foule d’autres qui désormais ne voient ou plutôt n’entendent plus que leurs différences et sont aussi séparés que les Espagnols et les Français. Les linguistes seuls dressent encore l’oreille aux parentés. Et même quand elles restent reconnaissables les langues apparentées sont mutuellement ressenties comme d’insupportables charabias. D’ailleurs les Français, les Espagnols, les Anglais, les Allemands ne se sont-ils pas battus pendant des siècles sans reconnaître leur parenté ? Guerre de Cent Ans, de Louis XIV, Invincible Armada, ennemis « héréditaires » anglais puis allemands au XIXe siècle, guerres de la Révolution, du Nazisme… La liste est ininterrompue. Et soudain, depuis 1945, les armes se sont tues. Cela n’était jamais arrivé – pas une seule fois – depuis que nous enregistrons notre histoire5. Tout cela nous le savons, mais où en chercher la cause ? Il serait capital, si la recette existe, si ce n’est pas un heureux hasard – le « miracle » de Zinoviev – que nous pussions l’expliquer de façon très claire aux peuples de l’Est, et aussi aux Israéliens et aux Arabes : « Écoutez, les amis, c’est très simple, nous avons trouvé le truc pour ne plus nous battre, le voici, faites comme nous ». Dans les faits, en effet, c’est très simple. Quelques hommes : Monnet, Robert Schumann, de Gasperi, Adenauer, de Gaulle, semblent tout expliquer. Ces hommes ont proposé des idées presqu’aussitôt unanimement admises : « Au lieu de nous ruiner à nous disputer nos richesses, partageons-les. Ne détruisons plus rien désormais, au contraire conjuguons nos savoirs et nos efforts à nous enrichir ensemble ». Évidemment ce ne peut être ce discours qui a fait descendre la paix sur l’Europe, puisque nos sages l’avaient tenu depuis des siècles, Rabelais, Thomas More, Bacon, Leibniz, l’abbé de Saint Pierre, Voltaire, sans autre effet que susciter la sympathie des rêveurs. Les vrais « réalistes » s’appelaient Frédéric, Jomini, Napoléon, Clausewitz6, qui nous expliquaient non pas comment éviter les guerres, mais comment les déclarer à point et les gagner. Que s’est-il donc passé en Europe après 1945 ? Je ne crois connaître aucune explication de notre soudain pacifisme. Ce n’est pas la lassitude : on peut citer vingt exemples de peuples qui se sont exterminés pendant des générations presque jusqu’à disparaître, guerre du Péloponnèse dans l’Antiquité, chez nous guerre de Cent Ans. Et combien ont réellement disparu ? La télévision y est peut-être pour quelque chose. Cela fait un choc de voir la rue d’une ville au nom imprononçable mais dont la foule et les visages sont « comme nous ». Tchernobyl, le tremblement de terre arménien ont plus fait pour désarmer les esprits que les excellents projets européens7. Mais « comme nous » est ambigu. C’est une constatation apaisante, peut-être pas tout à fait pure. Quand je vois M. Rafsanjani, l’actuel leader de la république des ayatollahs, je le trouve, non sans surprise, étonnamment « comme nous » (à vrai dire sans surprise, voir plus loin). Et inversement la télévision nous montre les Arabes dans la rue et nous à eux sans produire la même souhaitable catharsis. « Mitterrand assassin ! » Ce n’est pas que j’aime tellement M. Mitterrand, mais on augure mal que le Maghreb le qualifie ainsi au moment où la plupart des Français l’approuvaient. La télévision nous a émus de compassion et d’amitié pour les peuples de l’Est non pas en nous les montrant, mais en les révélant « semblables à nous ». C’est toujours, hélas, la même histoire. Nous sommes portés vers qui nous ressemble et la différence nous effraie. En quoi alors les peuples de l’Est sont-ils ressentis comme semblables à nous et ceux d’Afrique du Nord pas autant qu’il faudrait ? Difficile à dire sans un prudent examen. « Secrètes affinités » sans doute, mais lesquelles ?8 Les Romains acceptèrent volontiers des Empereurs de l’actuel Maghreb (Sévère). Mais ces maîtres d’Afrique parlaient latin, ils riaient aux comédies de Plaute, ils se reconnaissaient dans les fils d’Énée. La langue alors ? Objection : l’imbroglio balkanique où nous voilà renvoyés. Cet imbroglio, remarquons-le pourtant, est récent. La Yougoslavie déchirée faisait front contre les Ottomans. Ah, c’est compliqué. Il semble bien cependant que la raison dernière se cache dans les secrètes affinités linguistiques. Les Balkaniques se sentaient tous slaves contre les Turcs. La langue est l’expression la plus subtile des mécanismes mentaux. Regardez ce bon M. Rafsanjani : tout musulman, tout ayatollah qu’il est, il parle un patois de même origine que le français, l’allemand, le russe, tous patois indo-européens comme l’iranien9. Je me trompe peut-être. Dieu nous garde de ressusciter le mythe aryen ! Mais la folie meurtrière de Hitler n’était pas de dire que l’allemand est une langue indo-européenne, stricte vérité scientifique. S’il s’en était tenu là il aurait honoré les juifs d’Europe, dont le yiddish est lui-aussi indo-européen, et germanique de surcroît. Et il aurait pieusement recueilli et choyé les Tziganes, dernière vague de migrants indo-européens arrivée en Occident, au lieu de les exterminer10. Il me semble en définitive que si la guerre est devenue impensable en Europe, c’est bien que les nouveaux médias nous révèlent des parentés jusque-là indécelables. Hitler a rendu fous des peuples qui ne se voyaient jamais et ne se connaissaient que par leurs langues mutuellement incompréhensibles. Hitler fut un produit de la radio. La télévision montre des visages où sans le vouloir ni le savoir s’exprime le secret des cœurs. Un Français qui a vu les foules de Leningrad (donnons encore pour un temps ce nom à la Ville de Pierre11 ne peut plus se battre contre des Russes. Et inversement. Un jour les Arabes et les Israéliens finiront par se voir et reconnaître leur lointaine fraternité… N’était-il pas de même notre frère, l’auteur inconnu de ce poème écrit dans une langue morte depuis des siècles : Jadis ne fut personne de plus cher à mon cœur que toi, Et plus tard non plus, personne de plus cher. Amour de toi, délice dans ton souffle et ta vie Jamais ne changeront, pour la vie. Ainsi pensais-je : avec mon bien-aimé je vivrai dans la joie Tout au long de ma vie sans feinte ni tromperie. Telle était ma pensée, connue du seul dieu Karman. C’est donc lui qui mit la mésentente Et me déchira ce cœur qui n’appartenait qu’à toi. Il t’a éloigné, il m’a séparée, il m’a donné toutes les tristesses en partage. La joie que j’avais en toi, il me l’a arrachée… Ne croirait-on pas un sonnet de Shakespeare ou de Louise Labbé ? C’est un poème tokharien, d’après une traduction du Pr J.P. Mallory12. Les Tokhariens étaient un peuple, et plutôt, nous dit-on, deux peuples qui vivaient il y a quinze, vingt siècles ou plus, dans le Bassin du Tarim au Nord du Turkestan chinois. Ils parlaient une langue où père se disait pacer, mère macer, sœur ser, frère procer, (cf. anglais brother), et auraient disparu sans laisser de traces si les Chinois n’avaient la précieuse manie de tout noter, par exemple que ces Tokhariens avaient la barbe et les cheveux « rouges », les yeux « verts », étaient « laids et barbus comme des singes » et fort adonnés à la boisson. Au Sud de la Sibérie orientale… De quoi rêver. Aimé MICHEL Chronique n° 483 – F.C. – N° 2301 – 5 avril 1991 Capture_d_e_cran_2014-11-10_a_12-28-10.png
Notes de Jean-Pierre ROSPARS du 20 janvier 2020

 

  1. Le mot Yougoslavie, qui signifie pays des Slaves du Sud, fut utilisé pour la première fois en 1860 par un évêque croate. Ce pays, alors divisé entre l’Autriche-Hongrie au Nord et l’empire ottoman au Sud (seul le Monténégro était indépendant depuis 1815), ne devint une réalité qu’en 1918 mais il fut à nouveau démembré en 1941 par les forces de l’Axe, Allemagne, Italie et Hongrie. Le Croate Josip Broz dit Tito (1892-1980), après avoir pris la tête de la résistance communiste pendant la Seconde Guerre mondiale, parvint à le réunifier avec Belgrade comme capitale en 1945, peu avant de rompre avec Staline en 1948. Tito disait : « La Yougoslavie a six Républiques, cinq nations, quatre langues, trois religions, deux alphabets et un seul parti. » Six républiques : au Nord, la Slovénie (Ljubljana), frontalière de l’Autriche, et la Croatie (Zagreb), frontalière de la Hongrie ; au centre, la Bosnie-Herzégovine (Sarajevo) à l’Ouest et la Serbie (y compris Voïvodine au Nord et Kosovo au Sud, capitale Belgrade) à l’Est, frontalière de la Roumanie et de la Bulgarie ; au Sud, le Monténégro (Titograd redevenue Podgorica), frontalière de l’Albanie, enfin la Macédoine (Skopje), frontalière de l’Albanie, de la Grèce et de la Bulgarie. Cinq nations et quatre langues : les Slovènes (catholiques, de langue slovène), Croates (catholiques, parlant serbo-croate), les Serbes et les Monténégrins (orthodoxes ou musulmans, également de langue serbo-croate), et les Macédoniens (orthodoxes, parlant macédonien). Trois religions : catholique (Slovènes et Croates), orthodoxe (Serbes, Monténégrins et Macédoniens), musulmans (surtout Bosniaques). Deux alphabets : latin (Slovénie, Croatie, Bosnie-Herzégovine) et cyrillique (Macédoine) ; les Serbes apprennent et utilisent couramment les deux alphabets même si l’administration favorise le cyrillique ; c’est l’inverse au Monténégro où c’est l’alphabet latin qui est actuellement favorisé.
  2. Après la mort de Tito en 1980, les minorités qui se sentent discriminées commencent à s’agiter, surtout au Kosovo. L’économie va mal, surtout au Sud, tandis que les Slovènes et les Croates, plus prospères, sont réticents à aider les républiques méridionales. Slobodan Milošević, président de la Serbie et nationaliste serbe, cherche à favoriser les Serbes ce qui favorise la montée du nationalisme dans les autres républiques de la fédération. Les élections libres de 1990, dans le sillage de la chute du Rideau de fer, donnent la majorité à des partis indépendantistes sauf en Serbie et au Monténégro (ce dernier restant communiste). En décembre, les Slovènes et les Croates votent leur indépendance par référendum et l’appliquent unilatéralement en juin 1991. Cette indépendance n’est pas reconnue par Belgrade mais l’armée fédérale doit capituler au bout de dix jours. Slovénie et Croatie sont reconnues par les pays européens en janvier 1992. En Bosnie-Herzégovine, les évènements prennent une tournure plus dramatique en février 1992, car le référendum qui décide l’indépendance est soutenue par les Croates et les Bosniaques, qui forment les deux-tiers de la population, mais rejetée par les Serbes, le tiers restant. Cette indépendance est reconnue par la Communauté européenne puis les États-Unis. Les Serbes de Bosnie, dirigés par Radovan Karadžić, font alors sécession, déclarent leur indépendance (qu’aucun pays ne reconnait), et leur armée commandée par Ratko Mladić commence le siège de Sarajevo, qui deviendra le plus long de l’histoire récente avec 1348 jours (plus long que le siège de Leningrad, voir note 10), s’empare des principales villes et zones peuplées de Serbes, et y pratique le nettoyage ethnique. L’OSCE (Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe) et l’ONU interviennent militairement pour protéger les civils dans certaines enclaves mais n’empêchent pas le massacre de Srebrenica en juillet 1995 (8000 Bosniaques exécutés par l’armée serbe de Bosnie), qui sera qualifié de génocide par le Tribunal pénal international. L’OTAN intervient alors directement contre l’armée des Serbes de Bosnie et appuie en août 1995 l’opération de reconquête menée par les Croates à Krajina (d’où 80 000 Croates, 80% de la population, avaient été expulsés en 1991), ce qui provoque l’exil de 200 000 Serbes et la mort de 1200 civils serbes selon l’ONG Veritas. Les accords de Dayton en décembre 1995 mettent fin au conflit qui aura fait près de 100 000 morts (dont 65 000 Bosniaques, 30 000 Serbes de Bosnie et 7300 Croates). À peine le foyer bosniaque éteint, un autre s’allume au Kosovo. En 1991, un référendum conduit à déclarer l’indépendance du Kosovo et Ibrahim Rugova en devient président, mais cette indépendance n’est pas reconnue par la communauté internationale, ce qui de facto revient à admettre que le Kosovo fait toujours partie de la Serbie. La Guerre du Kosovo commence en 1996 et oppose les deux principales communautés, les Serbes (minoritaires) et les Albanais (majoritaires, dont 90% sont musulmans sunnites). L’Armée de libération du Kosovo (UÇK) commet des attentats contre l’armée et la police serbes. Début 1998, Milošević répond par l’élimination des familles des terroristes supposés, ce qui provoque une insurrection générale. La pression de l’armée yougoslave (serbe) provoque un exode massif d’Albanais kosovars tandis que les Kosovars persécutent les Serbes (on parle d’un million de déplacés et de 10 000 morts côté Albanais, de 1200 tués et 2300 kidnappés côté serbe, de 220 000 Serbes, Tsiganes, Gorans et Turcs expulsés, et de nombreuses maisons et églises détruites). De mars à juin 1999, l’OTAN force le retrait des troupes serbes par des frappes aériennes en Serbie. Le statut d’État indépendant du Kosovo n’est toujours pas reconnu à ce jour en dépit des pressions européennes et américaines, car la Serbie soutenue par la Russie considère que ce territoire est le « berceau du peuple serbe ». Les tensions se poursuivent malgré la présence des soldats de l’OTAN et des fonctionnaires de l’UE et de l’ONU. L’économie ne décolle pas, paralysée par les pannes électriques et parasitée par des maffias se livrant aux trafics de drogue et d’organes et au détournement de l’aide internationale. Depuis juillet 2019, suite à un renforcement de la surveillance sur la frontière avec la Serbie en vue d’éviter la contrebande, les Serbes du Kosovo manquent de nourriture et de médicaments, et refusent l’aide des Kosovars par crainte d’être empoisonnés. Le Tribunal pénal international de l’ex-Yougoslavie (TPY), instance judiciaire de l’ONU située à La Haye, a jugé de 1993 à 2017 les personnes présumées responsables des crimes de guerre commis dans les Balkans (assassinat, torture, viol, réduction en esclavage, prise d’otages, destruction de biens, etc.). Cent-soixante individus, dont de nombreux dirigeants politiques ou militaires (chefs d’État, Premiers ministres, ministres de l’intérieur, chefs d’état-major, chefs de l’armée et de la police) ont été mis en accusation. Le TPI a établi que le massacre de Srebrenica était un génocide (à savoir « tout acte commis dans l’intention de détruire, en tout ou en partie, un groupe national, ethnique, racial ou religieux ») et que les membres des forces armées serbes de Bosnie avaient utilisé le viol pour répandre la terreur (les détails sont accablants, voir par ex. sur le site du TPY https://www.icty.org/fr/press/viol-collectif-torture-et-r%C3%A9duction-en-esclavage-de-femmes-musulmanes-pour-la-premi%C3%A8re-fois-le). La plupart des affaires portées devant le Tribunal ont concerné des crimes commis par des Serbes et des Serbes de Bosnie, mais des crimes perpétrés contre les Serbes ont également été jugés. Des trois Serbes les plus notoires, Slobodan Milošević, président de la Serbie (1989-1997) puis de la République fédérale de Yougoslavie (1997-2000), est arrêté le premier en 2001 et transféré à La Haye où il meurt en prison d’un infarctus du myocarde en 2006 avant l’achèvement de son procès. Radovan Karadžić, président de la République serbe de Bosnie (1992-1996), arrêté en 2008, est reconnu coupable du génocide de Srebrenica et condamné à l’emprisonnement à perpétuité (2014, 2019). Ratko Mladić, chef de l’armée de la République serbe de Bosnie, le « boucher des Balkans », est arrêté le dernier en 2011. Reconnu coupable en 2017 pour son rôle dans le massacre de Srebrenica, le bombardement de Sarajevo et le nettoyage ethnique en Bosnie, il est également condamné à perpétuité.
  3. Le plurilinguisme a eu longtemps mauvaise presse en France, sans doute parce qu’il s’agissait de combattre l’usage des langues dites régionales et d’asseoir la primauté du français. Le déclin relatif de la France et du français dans le monde, à la suite notamment des deux guerres mondiales, a conduit à mettre en question cette conception très jacobine de la langue et à recevoir les arguments en faveur du plurilinguisme (les linguistes distinguent le plurilinguisme qui concerne les individus et le multilinguisme qui concerne les territoires). Peuvent bénéficier de cette tolérance, non seulement les locuteurs des langues régionales, mais aussi les immigrés venus de pays non francophones, même si le sujet continue de diviser et de véhiculer des inquiétudes souvent mal fondées. Dans les premiers mois après leur naissance, les bébés ont la capacité de distinguer une très large gamme de sons, qu’ils soient ou non présents dans la (ou les langues) parlées autour d’eux. Par la suite, l’enfant perd cette aptitude en se spécialisant sur les sons des langues qu’il entend. Un enfant exposé à une seule langue sera donc capable de différencier et reproduire un moins grand nombre de sons qu’un enfant plurilingue. Après l’âge de vingt ans environ, l’apprentissage d’une deuxième langue, notamment d’un point de vue phonétique, devient plus difficile. Une des critiques adressées à l’apprentissage simultané de deux ou plusieurs langues par un jeune enfant est qu’il provoquerait des retards de développement du langage, si bien que son vocabulaire, par exemple, serait moindre que celui d’un enfant monolingue du même âge. C’est vrai mais uniquement si l’on considère une seule des langues, pas si l’on compte tous les mots connus dans chacune des langues. Tout se passe comme si l’étendue du lexique à un âge donné était fixée et distribuée entre les diverses langues, d’où un retard pour chacune prise séparément par rapport à un enfant monolingue. Bien entendu, le vocabulaire total va se répartir entre les différentes langues selon le temps d’écoute et de pratique de chacune d’elles. De plus, tous les enfants étant différents, bien que les étapes du développement soient les mêmes pour tous, ils commencent à parler à un âge variable (entre un et trois ans) et leurs acquisitions progressent à un rythme également variable, indépendamment du nombre de langues et de leur ordre d’acquisition (simultané ou séquentiel). Une autre source d’inquiétude est le « mélange » des langues. Or, mélange ne signifie pas nécessairement confusion. L’enfant recourt à un mot d’une autre langue lorsqu’il ne le connaît pas dans la langue qu’il souhaite utiliser, ou simplement lorsqu’il est plus simple à prononcer. La structure d’une langue influence la manière dont elle est acquise. Par exemple, les premiers mots utilisés par un enfant français sont des verbes (donne, viens), alors que ce sont des noms s’il est anglais. Un enfant turc fait des phrases complexes dès 2 ans, bien avant un petit Anglais, parce qu’en anglais le sens d’une phrase est déterminé par sa structure, alors qu’en turc, elle est déterminée par des déclinaisons régulières. Une étude effectuée à l’hôpital Necker sur 47 enfants de moins de 7 ans ayant des troubles du langage conclut que le plurilinguisme « ne semble pas être un facteur prédisposant à l’apparition d’un trouble spécifique du langage ». Les troubles observés résulteraient plutôt des difficultés psychologiques qui fragilisent les familles migrantes par suite de leur déracinement et du changement éventuel de profession et de statut social des parents. Le bilinguisme peut venir compliquer la tâche chez des sujets déjà fragilisés. (https://www.cairn.info/revue-la-psychiatrie-de-l-enfant-2008-2-page-577.htm).
  4. Comme le raconte l’archéologue et linguiste américano-irlandais James Patrick Mallory, en illustrant son propos par les mots de cette prière, Aimé Michel suit l’exemple de deux illustres prédécesseurs : « dès 1813, ce remarquable touche-à-tout qu’était Thomas Young forgea le terme “indo-européen” dans la revue qu’il fit du Mithridate d’Adelung – lequel était une tentative (en plusieurs volumes) pour repérer les affinités qui pouvaient exister entre les différentes langues du monde, à partir de la comparaison de diverses traductions du Pater » (À la recherche des indo-européens. Langue, archéologie, mythe, trad. par J.L. Giribone, Seuil, Paris, 1997, p. 14). Thomas Young (1773-1829) s’est illustré, en physique, par sa définition du module de Young et, surtout, sa fameuse expérience des fentes de Young qui lui permit de découvrir et d’interpréter les interférences lumineuses (voir la chronique n° 293, en particulier la note 6).
  5. Qu’il n’y ait pas eu une seule décennie sans guerre en Europe occidentale depuis le Xe siècle semble bien vérifié par l’article « Liste de guerres » de Wikipédia.
  6. Sur Clausewitz, voir note 9 de n° 374.
  7. La catastrophe nucléaire de Tchernobyl (26 avril 1986) est dans toutes les mémoires. Contrairement à celle de Fukushima (mars 2011), elle n’est pas liée à une catastrophe naturelle, mais la conséquence de défauts de conception du réacteur et d’erreurs humaines dans la conduite de celui-ci lors d’un exercice de sécurité. Quant au tremblement de terre du 7 décembre 1988 en Arménie, il fait l’objet de la note 3 de n° 456.
  8. Dans la chronique n° 406, Ce que je voudrais dire au grand corbeau, on trouvera d’autres réflexions sur ces affinités et suspicions. A. Michel y note l’« impression de recul que nous éprouvons quand nous croyons percevoir chez certains peuples l’arrière-pensée que la femme est un être inférieur, respectable, certes, mais à condition d’être tenu sous clé, irresponsable, et vaguement impur. Il y a là un fait aussi profond qu’indéfinissable, peut-être la vraie source du racisme. Le racisme n’est pas fondé sur la race au sens populaire, comme on peut le constater par la fréquentation des peuples indo-européens de confession islamique (Iraniens), ou, au contraire, sémites de confession chrétienne (Libanais). L’Européen, débarqué la veille dans une foule musulmane, échappe rarement à une panique sourde, inexplicable, vaguement coupable, et qui s’évanouit aussi inexplicablement quand il voit, par exemple en Tunisie ou en Égypte, des couples se promener la main dans la main. Ce geste si simple, mais qui en dit si long, le convertit à l’amitié et à la confiance plus vite et plus radicalement que toute démonstration. »
  9. La langue officielle de l’Iran est le persan (qui se dit « farsi » en persan). Le persan est également majoritaire en Afghanistan (dari) et au Tadjikistan (tadjik). C’est une langue minoritaire dans plusieurs autres pays. En Iran et en Afghanistan, le persan s’écrit avec l’alphabet perso-arabe, qui est une variante de l’alphabet arabe, et avec l’alphabet cyrillique au Tadjikistan. Le persan est l’une des 86 langues du groupe indo-iranien reconnu par les linguistes, aussi appelé indo-aryen. Outre le persan et ses 120 millions de locuteurs, les deux langues indo-iraniennes les plus parlées sont le pachto (ou pachtoune) et le kurde. Le pachto est parlé par 45 millions de locuteurs en Afghanistan (où il est la seconde langue officielle avec le dari) et au Pakistan (-stan signifie pays dans les langues indo-iraniennes) ; il s’écrit en alphabet arabe modifié. Il s’est différencié du persan avant le VIe siècle AEC. Le kurde est parlé par 44 millions de locuteurs, principalement en Turquie (région la plus peuplée), Syrie, Irak et Iran mais il n’est pas unifié (nombreux dialectes). Il s’écrit en alphabet latin (Turquie et Syrie), arabe (Irak et Iran) et cyrillique (dans les poches kurdes d’Arménie et de Géorgie). Les linguistes distinguent une dizaine de groupes de langues indo-européennes. Outre l’indo-iranien, ce sont : le grec, l’albanais, l’arménien, l’italique, le celtique, le balto-slave, le germanique, auxquels s’ajoutent des groupes de langues disparues : anatolien (hittite) et tokharien. Les langues indo-européennes sont parlées actuellement par 3,2 milliards de personnes (langues maternelles), ce qui en fait de loin la plus grande des familles linguistiques. La moitié des 20 langues les plus parlées dans le monde sont indo-européennes.
  10. Les Tsiganes ont été ainsi appelés lorsqu’ils sont arrivés en Grèce au XIVe siècle du mot grec athinganos qui signifie « intouchable ». La région de Grèce où ils séjournèrent fut qualifiée de « Petite Égypte » ce qui leur valut le nom d’Égyptiens déformé en Gitans (Gipsies en anglais). Ceux qui vinrent en France au XVe siècle venaient de Bohème et on les appela Bohémiens. Eux-mêmes s’appellent Roms (« homme » en hindi), d’où Romani Cel (déformé en Romanichel) qui, en tsigane veut dire « groupe d’hommes ». Leur nom de Manouches vient du tsigane mnouch (qui signifie homme ou moustache). L’expression « Gens du voyage » souvent utilisée pour les désigner en langue administrative est ambigu parce que la majorité d’entre eux ne sont pas Roms et que seulement 15% des Roms français sont itinérants. Au XVIIIe, les études linguistiques montrèrent que leur langue, le romani ou tsigane, dérivée du sanscrit, est apparentée aux langues du Nord de l’Inde (hindi, rajasthani) dont il a en commun 60 % du vocabulaire de base. Cette langue indo-iranienne est actuellement en grand danger d’extinction en raison de l’assimilation des Roms dans leurs pays d’accueil. En Europe, dès le XVe siècle, on les tient pour indésirables : ceux qui ne se sédentarisent pas sont emprisonnés, envoyés aux galères et dans les colonies, voire exécutés. Louis XIV fait envoyer tous les Bohémiens mâles aux galères sans procès. Au XXe siècle, des années 30 aux années 70, la Suisse et la Suède tentent de limiter leur reproduction par stérilisation et enlèvent leurs enfants pour qu’ils soient rééduqués dans des familles d’accueil. Pendant la Seconde Guerre mondiale, Himmler organise leur internement puis leur extermination (entre 50 000 et 80 000 Tsiganes meurent dans les camps) ; en France, 6 000 d’entre eux sont internés dans plusieurs camps aux conditions précaires (saleté, promiscuité, sous-alimentation) dont le dernier n’est fermé qu’en juin 1946. La stérilisation des femmes roms est pratiquée en Tchécoslovaquie de 1970 à 1990. En raison des unions mixtes, il est difficile de savoir qui est Rom. Il y en aurait une dizaine de millions dans le monde, non compris ceux qui vivent en Inde, dont les trois-quarts vivent en Europe. Ils sont plus d’un demi-million en Roumanie, ex-Yougoslavie, Espagne, États-Unis, Hongrie, Turquie, Brésil et Argentine, et nombreux en République tchèque et Slovaquie. En France, actuellement, il y aurait entre 200 000 et 350 000 Roms dont 20 000 venus d’Europe de l’Est et des Balkans dans les années 1990 ; Ces derniers vivent dans des campements et des bidonvilles (il y en aurait 400 environ, dont les 2/3 sont en région parisienne), en raison d’une crise du logement et de discriminations (en Espagne, où ils sont allés en plus grand nombre, ils arrivent à se loger normalement). On les accuse de pratiquer la prostitution infantile, d’utiliser des mineurs pour les cambriolages et les vols à la tire, d’être impliqués dans les vols de métaux (câbles, etc.) et des violences urbaines (Moirans 2015, Castres 2017), d’occuper illégalement des terrains, etc. De 2010 à 2013, sous Sarkozy puis Hollande, des opérations de démantèlement des camps ont été mises en œuvre et leurs occupants reconduits dans leurs pays d’origine. Depuis 2014, le marché du travail leur étant entièrement ouvert, la situation des jeunes immigrés Roms roumains et bulgares a commencé à s’améliorer. (https://lejournal.cnrs.fr/articles/qui-sont-vraiment-les-roms-de-france).
  11. Aimé Michel annonce ici, avec trois mois d’avance, le résultat du référendum du 13 juin 1991 par lequel les habitants de Leningrad décident de changer le nom de leur ville. Gorbatchev plaide pour le maintien de Leningrad mais c’est peine perdue : à presque 55% les habitants votent en faveur de Saint-Pétersbourg. Le changement de nom est officialisé le 1er octobre. Lorsque le tsar Pierre le Grand fonde la ville en 1703 et y déplace sa capitale, il montre son souhait d’ouvrir l’empire russe sur la Baltique et l’Europe. Malgré les difficultés, car la zone est marécageuse et vient d’être reprise à la Suède dans une guerre qui va durer jusqu’en 1721, les travaux vont bon train : une dizaine de milliers de travailleurs et de serfs y laissent leur vie. Le projet sera poursuivi par ses successeurs qui font de la ville, pour presque deux siècles, le principal centre politique et intellectuel de Russie et le second centre industriel après Moscou. En 1914, Nicolas II change Saint-Pétersbourg, trop germanique à son goût, en Petrograd mais il est renversé par la Révolution de mai 1917. Le long déclin de la ville commence car les Bolcheviques, craignant la menace allemande, préfèrent installer leur capitale à Moscou. En 1924, à la mort de Lénine, ils appellent la ville Leningrad, mais ce nom ne deviendra courant qu’avec son siège de 900 jours par les Allemands et les Finlandais de 1941 à 1944 où le tiers de ses 2,5 millions d’habitants meurent de faim et de froid. Aujourd’hui, avec plus de 5 millions d’habitants, Saint-Pétersbourg demeure la deuxième ville de Russie et un important centre industriel, culturel et touristique mais elle est en déclin relatif. De 1990 à 2010, la ville comptait plus de décès que de naissances mais le solde naturel est positif depuis lors.
  12. Aimé Michel a traduit ce poème d’après la version anglaise de James P. Mallory (In search of the Indo-Europeans, Thames and Hudson, Londres 1989, p. 57). Remarquons que dans sa traduction le survivant est une femme qui pleure son bien-aimé, alors que dans la traduction française du livre par J.L. Giribone (p. 69, voir note 4) c’est un homme qui écrit « avec ma bien aimée, je vivrai heureux jusqu’au terme de mon existence ». Comme la traduction française a été vérifiée par Mallory, on peut supposer que l’ambiguïté du texte anglais sur le genre était absente dans l’original tokharien. Les manuscrits tokhariens furent découverts dans le bassin du Tarim au Turkestan chinois, une des régions les plus mal connues au monde, parsemées d’oasis cernées de steppes arides. Dans ces oasis ou à proximité se développèrent puis déclinèrent des villes et des États sur l’ancienne route de la soie reliant la Chine à l’Europe. Ces ruines furent explorées par des archéologues occidentaux à la fin du XIXe et au début du XXe siècle. L’un d’entre eux, un Anglais d’origine hongroise, Aurel Stein, apprit en 1907 lors de sa première visite de la ville de Tongshua, alors prospère, qu’une bibliothèque secrète venait d’être découverte par un prêtre taoïste dans une grotte servant de monastère et entretenue par une petite communauté bouddhiste. Stein parvint à convaincre le prêtre de lui donner accès à la bibliothèque et de lui vendre un certain nombre de ses documents. Plus tard, l’orientaliste français Paul Pelliot en acquit de nombreux autres. En étudiant cette masse de documents et d’autres découverts dans des villes voisines, rédigés avec des alphabets et dans des langues déjà connus, on découvrit des textes de deux langues apparentées et jusque-là inconnues, qu’on appela tokhariens A et B. Ces textes étaient rédigés dans un alphabet de l’Inde du Nord et ils ont pu être rapidement les déchiffrés car ils étaient parfois bilingues et souvent des traductions de traités de magie ou de médecine en sanscrit. Ils comportaient aussi une correspondance monastique (les Tokhariens contribuèrent à diffuser le bouddhisme en Chine), des écrits comptables sur feuilles de palmier et papier, et des permis caravaniers sur tablettes de bois, le tout daté des VIIe et VIIIe siècles de notre ère. On comprit que le tokharien A était à cette époque en passe de devenir une langue morte réservée à la liturgie, contrairement au tokharien B qui était une langue vivace utilisée au moins par les administrateurs civils et religieux de l’État tokharien alors peuplé d’une centaine de milliers d’habitants selon les recensements chinois. Mais la découverte la plus extraordinaire fut que ces deux dialectes n’étaient pas indo-iraniens, alors que les Tokhariens étaient entourés par des locuteurs iraniens. En fait, c’est avec les langues européennes que les similitudes étaient les plus grandes, au point qu’un des premiers indo-européanistes déclara qu’il s’agissait d’une langue celtique. On en déduisit que les Tokhariens étaient originaires d’Europe centrale et avaient parcouru plus de 4000 km pour rejoindre leur territoire historique au Ier millénaire AEC, à contre-courant des migrations connues. J.P. Mallory n’adhère pas à cette thèse et pense que la séparation du proto-tokharien et des langues proto-européennes s’est produite à une période plus ancienne (au IIIe millénaire, avant les migrations indo-iraniennes) et dans une zone plus proche (à 1000 km au nord du bassin du Tarim), où ont été découverts des vestiges archéologiques indo-européens. Sur cette langue tokharienne, on pourra lire les présentations de Colin Renfrew dans L’énigme indo-européenne (Flammarion, 1990, pp. 83-88) et de James P. Mallory dans À la recherche des indo-européens (Seuil, Paris, 1997, pp. 68-76), ainsi que l’article Wikipédia « Tokhariens » (qui fournit quelques développements récents sur les analyses génétiques de momies tokhariennes), « Aurel Stein » et « Paul Pelliot » (la vie de savants du genre « Les Aventuriers de l’Arche perdue »).