Sans doute ne vivons-nous pas, en France, dans une situation à l’iranienne. Là-bas, une répression féroce s’abat sur la population, et surtout des femmes en lutte pour leurs libertés élémentaires. Si l’on fait le tour de la planète, malheureusement, le sentiment prévaut que la violence continue à régner sur des régions loin d’être régies par un État de droit. Néanmoins, à suivre certaines controverses hexagonales, on peut penser que l’on assiste à une recrudescence d’une virulence qui, pour être d’abord verbale, n’en affecte pas moins l’équilibre moral et affectif. Elle met en péril ce que le grand sociologue Norbert Elias appelait « la civilisation des mœurs ». Cette notion, capitale, suppose une attention à ce qui constitue l’existence sociale en ce qu’elle a de plus intime et de plus formateur, notamment dans le domaine de l’affectivité.
Et pour parler franchement, la virulence actuelle d’un certain féminisme va très au-delà de ce que peut avoir de nécessaire une promotion de la femme, celle que préconisait une Édith Stein dans l’entre-deux-guerres. Le projet qui conduit à déconstruire le type masculin va très au-delà de la nécessaire défense à l’encontre de certaines violences intra-conjugales. Car il s’inscrit dans un contexte idéologique, qui produit ses ravages dans l’ensemble des pays occidentaux, à la suite des évolutions de la société américaine. Le sociologue britannique Douglas Murray peut aller jusqu’à désigner « une arme de destruction massive » qui s’attaque aux fondements de l’humanisme occidental. On désigne sous le terme de wokisme, cette offensive mondiale qui, sous prétexte d’éveiller les consciences aux discriminations et au racisme, ravage nombre d’universités et s’introduit jusque dans les entreprises. Divers courants confluent ainsi en une stratégie dite « intersectionnelle » qui peut produire des dégâts considérables. Celui qui se réclame de la théorie du gender, c’est-à-dire de la séparation de l’identité et du corps sexué, aboutit à une véritable épidémie auprès des adolescents qui s’interrogent sur leur propre genre.
Il n’est pas inutile de s’interroger aussi sur la présence d’une certaine contestation wokiste à l’intérieur du christianisme, lorsqu’on voit des sociologues inspirés par Bourdieu – courant critique qui insiste davantage sur le conflit – s’ériger en réformateurs de l’institution. Certains n’hésitent d’ailleurs pas à souhaiter ouvertement une implosion de l’Église.
Un amour caritatif qui guérit
Face à cette maladie généralisée qui s’en prend à l’ensemble du corps social, il est urgent de réfléchir aux moyens propres à protéger les fondements d’une civilisation. Car s’il est question de révolution, on ferait bien de se souvenir de la formule de Mao Tse Tung : elle « n’est pas un dîner de gala ». Elle est porteuse d’une violence destructrice.
Ce pourrait être le moment de se rappeler de la différence évangélique qui permet de corriger les dysfonctionnements sociaux en ce qu’ils peuvent avoir de discriminatoires, mais aussi d’infuser dans la civilisation des mœurs cet amour caritatif qui guérit et favorise les conditions d’un bien commun supérieur.
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