Dans la morosité ambiante, rien ne vaut la célébration d’un anniversaire pour se donner du coeur à l’ouvrage: c’est ainsi que, mercredi 15 octobre, la CFTC a fêté les 50 ans de son maintien comme centrale chrétienne et la CFE-CGC les 70 ans de sa naissance. Née en 1919, la CFTC, qui entend bien garder sa place de centrale représentative, commémorera son centenaire en 2019. Dans l’immédiat, au moment où la CFDT va célébrer les 50 ans de sa fondation – les 6 et 7 novembre 1964, à l’issue d’un congrès extraordinaire, la CFTC se transforme en CFDT, par un vote à une majorité de 70% qui abandonne la référence aux principes de la morale sociale chrétienne -, la CFTC veut faire la démonstration qu’elle a eu raison de se maintenir et qu’elle est « irremplaçable ».
Le 6 novembre 1964, une minorité de militants conteste le fait qu’une majorité puisse remettre en question substantiellement le pacte fondateur de la CFTC. Dans un communiqué, ils affirment que « le syndicalisme chrétien représente un courant original de pensée qui implique de ses adhérents la volonté formelle de se référer dans leur action aux principes de la morale sociale chrétienne » et qu’ « aucune modification substantielle de ces principes ne saurait être imposée, à moins d’une dissolution de l’organisation, à des adhérents pour lesquels ils constituent le motif essentiel de leur affiliation ». Soucieux de présenter une « alternative à l’idéologie marxiste » qui, à leurs yeux, se profile déjà derrière la nouvelle CFDT, ils décident de maintenir la CFTC. Le soir même, 200 irréductibles se retrouvent au Musée social, à Paris, pour proclamer : « La CFTC continue… irremplaçable ! »
Cinquante ans après, à peu près le 15 octobre, le même nombre de militants s’est retrouvé en début de soirée dans la même salle de ce Musée social. « Ce n’était pas gagné d’avance, a souligné Philippe Louis, le président de la CFTC, mais la suite nous a donné raison. » Il a mis en avant « l’esprit d’indépendance » et « l’obstination à faire prévaloir le dialogue ».
Ancien membre du bureau confédéral, Jean-François Vanneste a présenté son livre sur l’histoire récente de la centrale – La CFTC sans complexes, 30 années de syndicalisme de construction sociale (Frédéric Aimard éditeur, 344 p., 26 euros) – visant à justifier la légitimité d’une organisation qui « laissée quasi moribonde en 1964 par la scission qui a vu naître la CFDT, s’est affirmée et fut présente dans tous les grands défis de l’actualité sociale ».
Dans un registre différent, le livre d’Armel Gourmelon – Militant parmi tant d’autres (Frédéric Aimard éditeur, 186p., 13€) – est le témoignage riche en anecdotes d’un homme, venu de la Jeunesse ouvrière chrétienne, ancien vice-président de la CFTC responsable des relations internationales, qui voulait « bâtir des ponts plutôt que construire des murs entre les hommes ». « C’est, explique-t-il, l’histoire d’un militant parmi tant d’autres, qui a essayé de bien faire son travail, avec le souci de servir les autres et particulièrement les plus faibles. »
Ancien président de la CFTC (1993-2002), Alain Deleu a rappelé les valeurs de « liberté, égalité, non discrimination, tolérance » qu’il avait lui-même mises en avant lorsqu’en 2002, sortant de sa neutralité politique habituelle, la CFTC avait appelé à voter pour Jacques Chirac contre Jean-Marie Le Pen au deuxième tour de l’élection présidentielle. Pascale Coton, la secrétaire générale, a défendu « cette pierre précieuse qu’est la CFTC », en soulignant qu’il y avait parmi les adhérents de la centrale la même proportion de femmes – 43% – que parmi les salariés.
De son côté, la CFE-CGC a célébré sobrement, ce même 15 octobre, ses 70 ans, en organisant, à son siège, une table ronde avec la participation de Marc Ducros, le fils du président-fondateur de la Confédération générale des cadres en 1944, Jean Ducros.
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16 octobre 2014