DROIT A L’ENFANT OU DROIT DE L’ENFANT ?
L’actualité de ces derniers jours attire notre attention sur des projets de maternité ou de gestation pour autrui.
Les interrogations tant d’autorités morales de notre pays que de responsables politiques qui n’envisageraient la gestation pour autrui qu’à certaines conditions, montrent bien qu’il est important de ne pas s’enfermer dans les limites d’un débat public médiatisé et de réfléchir sans précipitation aux questions posées.
La souffrance des couples qui ne peuvent avoir d’enfant ne peut être ignorée. Mais il importe d’être attentif aux bouleversements qu’induit le recours à la maternité pour autrui sur notre conception du couple, de l’enfant et de sa place dans la famille
La prise en compte de la dissociation entre la maternité et l’enfant à naître.
Trois types de maternité se trouvent conjuguées et en même temps dissociées les unes des autres : celle qui donne l’ovule, celle qui accouche, celle qui élève l’enfant. Cette dissociation crée des liens « d’intimité sociale » jusqu’ici inconnus. Elle se différencie en cela de l’adoption qui répond en toute clarté à une situation déjà existante.
L’instrumentalisation du corps et du psychisme d’une femme « porteuse ».
Le temps de la gestation implique une relation très forte et progressive de la femme enceinte et de l’enfant qui se forme en son sein. Durant cette période elle prend conscience qu’elle est devenue la mère de son enfant dès sa fécondation. Elle n’est ni un nid ni une couveuse. De nombreux facteurs inconscients, affectifs et singuliers lient la mère à son enfant et réciproquement.
La remise en cause d’un modèle de famille, de filiation et de parenté.
On doit se demander quelle sera la place réelle et symbolique d’un enfant qui se trouve en relation avec un couple de parents « porteurs », les enfants de ce couple et le couple qui le reçoit. Il paraît difficile de concevoir de manière simple les relations de l’enfant entre chacun de ces pôles que ce soit sur un plan psychologique ou sur un plan juridique.
Notre société moderne pense que la science est capable de régler toutes les souffrances et qu’elle a en tout le dernier mot. Recourir à la procédure de la maternité pour autrui, n’est-ce pas instrumentaliser la naissance d’un enfant pour résoudre finalement de manière illusoire le drame et la détresse de la stérilité ?
Fonder une famille pour un couple ne dépend pas exclusivement de la naissance d’un enfant.
+ Jean-Charles Descubes
Archevêque de Rouen
Président du Conseil pour les questions familiales et sociales
de la Conférence des évêques de France
Pour aller plus loin :
- Le défi du développement des peuples et le pacte de Marrakech - la fuite en avant des Nations Unies
- La paternité-maternité spirituelle en vie monastique est-elle menacée en Occident ?
- GPA : Les enjeux de la gestation pour autrui à l’international
- Affaire S H contre Autriche: une victoire majeure pour la famille et la souveraineté des Etats devant la Cour européenne des droits de l’homme.
- La « Legge 40 » sur l’assistance médicale à la procréation soumise à la Cour de Strasbourg.