Préalablement à tout jugement politique ou idéologique, on peut avancer que nous ne nous sommes pas ennuyés durant cette primaire de la droite. Non qu’elle ait donné lieu à divertissement, au sens où Pascal l’entendait. Nous ne nous sommes pas ennuyés, parce qu’il s’est passé des choses imprévues et propres à faire réfléchir. Puisque toutes les prévisions se sont trouvées démenties et parce que les nouveaux rapports de force qui se sont révélés sont des plus significatifs. La victoire considérable qu’a obtenue François Fillon apparaît d’autant plus remarquable qu’Alain Juppé se présentait comme l’homme du rassemblement, le plus susceptible de réunir sur son nom les sensibilités les plus diverses.
François Fillon en face de lui était présenté comme le porte-parole d’une droite dure. Ce qualificatif peut être mal reçu, mais le fait est que l’électorat de droite a préféré désigner celui qui incarnait ce qu’on appelle ses valeurs, allant à l’encontre d’une certaine culture progressiste. Cela s’est notamment manifesté sur le terrain scolaire et universitaire lorsqu’il s’est attaqué aux pédagogistes forcenés et à la déconstruction de l’histoire de France. Peut-être parfois à son corps défendant, Alain Juppé apparaissait comme plus proche de la thématique de la gauche progressiste.
Nous aurons évidemment le loisir d’analyser le plus profondément possible la signification de ce mouvement d’opinion. Mais il n’est pas possible d’ignorer le déchaînement de nos confrères de Libération sur le retour des catholiques en politique, avec un titre surréaliste à la une « Au secours, Jésus revient ! ». On ne peut certes pas ignorer un certain retour, notamment des jeunes générations catholiques, surtout celles qui ont participé à La Manif pour tous, sur le terrain civique et militant. Mais il ne faut pas perdre son calme. Ce qui est sûr, c’est que la France a profondément changé ces dernières années et que l’on n’a pas fini d’en mesurer les conséquences.
Chronique diffusée sur Radio Notre-Dame le 28 novembre 2016.