Nous plaidions, la semaine dernière, en faveur de l’autonomie du politique, solidaire de l’autonomie du spirituel. Parallèlement, nous nous félicitions de la position de l’épiscopat français, rappelant les fondamentaux qui permettent aux catholiques d’exercer en conscience leurs responsabilités. Depuis lors, certaines initiatives individuelles d’évêques sont venues contredire ces principes, en vertu de leur volonté de barrer la route de l’Élysée à Marine Le Pen. Loin de nous l’idée de les stigmatiser. Eux aussi ont voulu s’exprimer selon leur conscience. Néanmoins, ce faisant, ils ont pris un risque à l’égard de leurs propres fidèles, aussi bien ceux qui les approuvent que ceux qui les contestent. Si le sanctuaire n’est plus épargné par les divisions qui concernent le champ politique, il y a danger d’atteinte à son inviolabilité. Bien sûr, il est toujours permis d’espérer que les oppositions qui structurent l’opinion chrétienne se transposent dans un climat qui soit en harmonie avec les exigences de l’Évangile. Malheureusement, certains échanges nous font craindre une détérioration qui corrode gravement l’unité et la charité.
Pour notre part, nous nous sommes gardés d’entretenir ces querelles, laissant à chacun la liberté de se déterminer en fonction de son discernement. Nous sommes persuadés qu’il importe avant tout que l’Église reste indépendante par rapport aux choix politiques, afin d’offrir un espace sui generis. Un espace qui permet de parler à tous et de dire à chacun ce qui lui plaît et ce qui ne lui plaît pas. L’avantage de l’indépendance, c’est la possibilité de tout dire. Certains sont tentés d’ignorer l’appel évangélique à la solidarité envers les naufragés de la mer, l’Église leur fait obligation de leur tendre la main. Certains sont tentés d’oublier les principes non négociables, notamment en matière d’éthique familiale, l’Église les leur rappelle comme une obligation impérative à l’égard du devenir de l’humanité. Ceux qui veulent à toute fin mobiliser l’épiscopat dans leur propre camp s’exposent à perdre cet atout incomparable qu’est l’autonomie du spirituel. Plutôt que de se répandre en tribunes comminatoires à l’égard de la hiérarchie, que ne dispensent-ils pas leur énergie à convaincre leurs concitoyens du bien-fondé de leurs positions et de leurs choix. Est-ce un retour au cléricalisme qu’ils convoitent ? Par ailleurs, la difficulté et la complexité des enjeux actuels, qu’ils soient nationaux ou internationaux, économiques ou sociétaux, exigent d’approfondir les analyses et de mettre au point des solutions crédibles. C’est sur ce terrain civique, que les laïcs ont à exercer d’abord leur sagacité et à déployer leur énergie. Et s’ils sont divisés, qu’ils continuent à considérer leur Église comme supérieure à leurs querelles !
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Pour aller plus loin :
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- Vladimir Ghika : le contexte politique avant la guerre de 1914-1918
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