Le drame qui s’est produit vendredi 9 juin à Annecy a fortement ému la France entière, provoquant le déplacement de toutes les autorités, jusqu’au président de la République. On s’interroge sur l’identité de l’agresseur, qui s’est prétendu chrétien de Syrie, et aurait même accompagné son geste par les mots « Au nom du Christ ». S’en prendre à des tout-petits, en les blessant au couteau, dépasse l’imagination et provoque plus encore que l’indignation, l’incompréhension et le désarroi. L’explication la plus simple d’une telle conduite est d’ordre psychiatrique avec l’égarement d’exilés ayant perdu tous repères et voués à l’errance. Plus généralement, c’est l’autorité politique qui est forcément saisie d’un dossier qui englobe tous les phénomènes liés à l’immigration.
Politique migratoire
On sait l’opinion publique désormais hostile à une immigration massive, incontrôlable, a fortiori inassimilable. Les États d’Europe qui s’étaient montrés les plus ouverts aux vagues venues des zones sensibles du Proche-Orient sont désormais sur une autre ligne de conduite. Un pays comme le Danemark dirigé par un parti social-démocrate se signale désormais par la rigueur de sa gestion migratoire. La France, secouée par le drame d’Annecy, sera elle-même obligée d’adopter une autre politique, dont la mise au point s’avère délicate. Les chrétiens sont eux-mêmes sollicités entre compassion évangélique et prudence politique, le primat de la charité ne se séparant pas d’une obligation de discernement. La situation d’une personne privée dans la proximité de ses relations n’est pas identique à celle du politique qui doit prendre des décisions à une échelle nationale et même à une échelle géopolitique.
Un beau témoignage face à l’opinion blessée
Dans ce contexte, comment qualifier alors dans tout ce contexte la conduite admirable du jeune Henri, ce pèlerin qui s’est opposé avec son sac à dos à l’assaillant armé de son couteau ? Au-delà de toute conjoncture politique, il s’agissait pour lui de venir au secours de ces tout-petits en danger de mort. Lui-même se refuse à être considéré comme un héros, mais il s’est bien conduit avec courage. Il a lui-même souligné qu’il ne considérait pas comme fortuit le fait d’avoir rencontré l’agresseur et ses petites victimes sur son chemin des cathédrales. Pèlerin il était, pèlerin il a agi, sans que l’on puisse distinguer entre son réflexe de solidarité et son élan évangélique.
Mais on peut s’interroger aussi sur la construction intérieure d’un jeune homme, élevé depuis le baptême dans une famille chrétienne, ayant pratiqué les disciplines du scoutisme et, à travers des études supérieures, approfondi une culture où foi et raison se répondent comme deux pôles nécessaires d’identification. Dans ce drame d’Annecy, Henri a été porteur d’une lumière singulière, ayant rendu le plus beau des témoignages envers une opinion perplexe et blessée, qui cherche à quoi et à qui se fier dans l’incertitude contemporaine. Il faut des personnes comme lui pour entretenir l’espérance dans nos ténèbres.