Faut-il s’inquiéter de la chute de la natalité enregistrée en France pour l’année 2015 ? Que le taux de fécondité soit passé sous la barre des deux enfants par femme constitue un signal d’alarme, que l’on ne peut toutefois majorer. Toute la question est de savoir s’il s’agit d’une tendance qui se confirmera dans les années à venir. Par ailleurs, nous sommes toujours très au-delà du taux européen qui est de l’ordre de 1,5 enfant par femme. La discussion n’en est pas moins vive entre les spécialistes qui prêchent la prudence dans l’interprétation des chiffres et les responsables d’associations familiales qui stigmatisent certaines mesures gouvernementales. Ainsi, Marie-Andrée Blanc, qui préside l’Union nationale des associations familiales est catégorique : « Grâce à sa politique familiale, la natalité française résistait jusqu’alors, ces remises en cause répétées et massives ont fini par entamer la confiance des familles et par réduire la réalisation de leurs projets familiaux. »
Je ne puis ici me lancer dans une analyse précise de la politique familiale, mais il est sûr qu’un changement de philosophie s’est opéré, lorsque le gouvernement a décidé de moduler les allocations familiales selon les revenus. C’était un tournant symbolique par rapport au principe impératif auquel avaient été fidèles tous les pouvoirs, qu’ils soient de droite ou de gauche. La politique nataliste française se rattache à un grand nom, celui d’Alfred Sauvy, qui fut longtemps le directeur de l’institut national des études démographiques, mais qui avant cela, dès le Front populaire, préconisait des mesures d’aide à la famille, qui firent longtemps consensus.
C’est vrai que les années soixante allaient bousculer quelque peu la philosophie nataliste et que la mentalité contraceptive allait modifier les mœurs et les courbes démographiques. En dépit de ce renversement qui allait atteindre toute l’Europe, la France avait quand même réussi à conserver ce qu’on pourrait appeler sa confiance dans la vie. Il serait dommage qu’à notre tour, nous soyons atteints par l’hiver démographique qui continue à sévir, singulièrement chez nos voisins allemands.
Chronique diffusée sur Radio Notre-Dame le 21 janvier 2016.