Sans surprise, le verdict est tombé ce mercredi après-midi. Agnès Thill n’appartient plus au groupe parlementaire de La République en Marche présidé par Gilles Le Gendre. Jugée fortement probable, cette décision n’était cependant pas acquise dans la mesure où la députée, conseillée par un avocat, entendait faire valoir que ses propos opposés à l’extension de la PMA n’entraient pas en contradiction avec les statuts du mouvement. Argument plaidable, mais manifestement insuffisant.
Les propos d’Agnès Thill « sont préjudiciables à la cohésion du mouvement et nuisent à son image alors que l’ouverture de la PMA (procréation médicalement assistée, ndlr) va faire l’objet dans les semaines qui viennent de débats à l’Assemblée nationale », a fait savoir la Commission des conflits de LREM dans un communiqué, soulignant « la fréquence et le caractère pernicieux des propos ».
Sur le fond, déclare-t-on officiellement à LREM, personne ne reproche à Agnès Thill son hostilité à l’ouverture de la PMA ou ne conteste sa liberté de l’exprimer : c’est la forme – les fameux « dérapages » – qui lui est reprochée. En l’occurrence, une interview au mensuel L’Incorrect, fortement marqué à droite, des propos établissant une corrélation entre l’essor des théories du genre et l’éclosion d’écoles coraniques sur le sol national, et encore quelques autres sorties sans filtre.
Police de la pensée ?
La nuance peut cependant échapper aux observateurs. Il est en effet tentant de voir aussi dans cette sanction le souhait du groupe LREM d’étouffer toute voix dissonante sur la question de la PMA en amont des discussions sur le projet de loi, prévues en septembre prochain. Guillaume Chiche, député PS des Deux-Sèvres qui nourrit une hostilité virulente, presque épidermique, à l’encontre de sa collègue de l’Oise, ne s’y trompe pas lorsqu’il déclare dans les colonnes de Libération qu’« Agnès Thill va argumenter en disant que c’est elle la victime d’une police de la pensée, et que nous l’écartons pour son opposition à la PMA, ce qui est faux. Il faut démonter ça ».
Exclue. La pression et le chantage auront eu raison de la bienveillance tolérance inclusion ouverture affichés par @enmarchefr et @LaREM_AN Rien dans ce dossier d’instruction ne justifie une exclusion. Cela s’appelle un délit d’opinion. pic.twitter.com/I1a532ZGBd
— Agnès Thill (@ThillAgnes) 26 juin 2019
Et il ne sera pas facile de « démonter ça ». Car Agnès Thill affiche des convictions qui la rendent difficilement assimilables à la caricature que l’on fait parfois des opposants aux « avancées sociétales » dans les allées du pouvoir et des partis politiques. Formée à l’école de Témoignage Chrétien, revenue à la foi sur le tard, Agnès Thill ne conteste pas le droit à l’avortement et rappelle qu’elle était favorable au mariage gay… Ce qu’elle refuse fondamentalement, c’est que la PMA prive sciemment des enfants de pères. Agnès Thill va probablement faire appel de la décision, mais si la sanction est confirmée, la question est maintenant de savoir comment elle compte poursuivre son combat bien que réduite au silence parlementaire. Le caractère tranché de l’élue laisse penser qu’elle ne devrait pas renoncer à la parole.
Pour aller plus loin :
- Le défi du développement des peuples et le pacte de Marrakech - la fuite en avant des Nations Unies
- Affaire Ulrich KOCH contre Allemagne : la Cour franchit une nouvelle étape dans la création d’un droit individuel au suicide assisté.
- Dénoncer les abus sectaires dans la vie consacrée et passer l’épreuve en union au Christ Epoux
- Sur le général de Castelnau et le Nord Aveyron.
- Édouard de Castelnau