Le voyage de Pierre et de Paul depuis Jérusalem à Rome est un récit de l’histoire de l’Église particulièrement intéressant.
Bien loin de notre univers contemporain, si proche de la réalité de l’Empire de Rome qui s’étendait sur le bassin méditerranéen et bien au-delà dans l’Asie comme on aime à rappeler par le rayonnement de Paul de Tarse au sein de la diaspora juive de son temps.
Mais si le royaume de la terre romaine gouverne cet empire colossal, guerrier et l’objet de guerre de gouvernance sans intermittence, le royaume de l’Eternel sis du côté de Jérusalem dans la vieille terre ancestrale des sémites et des juifs, tous deux entretiennent entre eux des relations complexes, souvent conflictuelles et difficiles.
Rome montrée comme la Babylone de toutes les superstitions de l’époque, creuset polythéiste de tant de divinités païennes héritées des conquêtes impériales, souffrait la suprématie d’une foi unique, singulière et invisible de cette population nomade de Palestine attachée à l’Éternel au dessus de toutes les royautés, les divinités et les cultes rendus aux puissants de ce monde.
La cohabitation et la présence de ces juifs venus d’un monde autre et de soldats romains attachés à leur ville et à ses usages seront difficiles.
La vieille communauté juive de la diaspora romaine attirait des visiteurs de Jérusalem, et les deux cités entretenaient de fait des rapports auxquels Pierre et Paul donneront l’empreinte et le souvenir de leur passage.
Pierre ce Galiléen, pêcheur et fils de pêcheur de Galilée, est un travailleur de ses mains.
Paul sera un juif de la diaspora de Tarse, rabbin cultivé versé dans l’hébreu et l’araméen de ses pères, le grec de sa culture contemporaine, mêlé aux populations étrangères de son temps.
Personnage curieux et cultivé, au fait de la connaissance et des relations entretenues par les élites de son temps.
Le 29 juin l’Église universelle fête ces deux apôtres ensemble au cours d’une fête de première classe.
Les basiliques de Rome s’enflamment de cette mémoire.
Le pape lui même bénit le pallium une sorte d’étole attribuée aux métropolites de l’église au cours d’une cérémonie somptueuse à Rome.
Le nonce apostolique au nom du pape remettant dans chaque pays ce pallium aux récipiendaires de chaque église.
Les orthodoxes attachés à ces deux apôtres rappellent la fin du jeûne des apôtres au cours d’une liturgie particulière et de circonstance.
En Russie on évoque le miracle de Macaire d’Onjina, et dans les échanges œcuméniques entre l’orient et l’occident on ne manque de rapporter le souvenir de saint Pierre et de saint Paul par des manifestations religieuses chrétiennes entre les églises. Jean-Paul II y fut très attaché.
Pierre l’apôtre est singulier pour lui même, il quittera son travail et sa femme, pour rejoindre Jésus de Nazareth après son baptême,”ayant reçu de l’esprit saint le sens du mystère caché depuis la fondation du monde”…
Quant a rabbi Saul devenu Paul de Tarse le converti de l’Évangile, “il entend la voix du ciel qui conduit à sa conversion”.
Inséparables dans la foi mais si différents de par leur parcours personnel !
Pierre portait le nom de Simon ou fils de Jona, Barjona, il est connu pour ses actions et ses sympathies anti romaines, né au premier siècle avant JC, mort autour de 64-70 après JC.
Reconnu comme le premier évêque de Rome, vénéré pour son martyre par les premiers chrétiens sans doute issus pour la plupart du judaisme, sa vie est rapportée par les Epîtres pauliniennes, les Evangiles et le récit des Actes des Apôtres composé par l’évangéliste Luc.
Surnommé l’inflexible comme la pierre, la tradition chrétienne le considère comme le chef de l’église des temps difficiles de son origine.
Sa vie est relativement simple. De Jérusalem à Rome en passant par Antioche, au delà des sources historiques officielles, il faut citer les apocryphes tels les Actes de Pierre et de Paul, la Passion de Pierre que la tradition a versés au culte de l’apôtre comme il est d’usage en orient, de fleurir ainsi l’histoire de commentaires libres.
Rome vit de cette présence, Constantin érigea la première basilique Saint-Pierre, elle a connu depuis reconstruction, agrandissements et aménagements successifs qui font le bonheur de la visite de milliers de pèlerins chaque année, et lors des célébrations internationales officielles de l’église.
Paul fut un autre personnage remarquable des fondations de l’église.
Mort autour de 67 après JC, sans doute après l’incendie de Rome en 64 auquel Néron l’empereur associa les chrétiens et les juifs, pour les pourfendre et les sanctionner par le glaive.
Paul de Tarse.
Paul de Tarse serait un homme cultivé, juif de la diaspora, citoyen romain de l’Empire, et appartenant à la communauté des pharisiens.
Disciple de Gamaliel à Jérusalem, il fréquente le Temple et les enseignements du maitre, mais ses premières entreprises sont peu portées en odeur de sainteté par les chrétiens qu’il pourchasse, tue et pourfend avec l’ardeur prosélyte d’un guerrier jusqu’à cette conversion sur le chemin de Damas où une voix intérieure lui dit,” Saul, Saul, pourquoi me persécutes-tu ?”
La suite est dans les mémoires de tout un chacun.
Le retournement spirituel de Paul est immense.
Il devient le missionnaire de la foi chrétienne auprès de ceux qu’il a combattus dont Etienne le diacre qui fut lapidé sous ses yeux.
Auteur de seize Lettres, sept jugées authentiques par les biblistes, et le récit des Actes des apôtres composé par Luc qui cite généreusement Paul. Il est bien rappelé par Paul lui même “qu’instruit par Gamaliel dans la connaissance exacte de la Loi de nos pères, il se mit au service de Jésus le Messie plein de zèle pour Dieu comme vous l’êtes tous aujourd’hui !”
Les discussions de l’époque entre circoncis et non circoncis, juifs et non juifs, tous de la même église selon des traditions différentes, seront rapportés autour de la dispute d’Antioche où les judéo chrétiens, et les pagano-chrétiens affirmeront leur différence et les tensions dans le vivre commun de la foi au quotidien.
On compte 61 églises et chapelles sous le patronage de Pierre et 4 sous le patronage de Paul dans le diocèse de Bayonne Lescar Oloron.
Pourquoi cette différence ?
Les historiens du diocèse ne le disent pas, mais le constat est patent.
Ces deux disciples de Jésus honorés ensemble ont inspiré l’art, les peintres, les cinéastes, l’architecture des édifices religieux.
Sans les deux pères fondateurs il n’y aurait sans doute pas eu d’Église, et Loisy ou Voltaire eussent manqué de sujet pour pourfendre l’institution ou la revisiter autrement dans un rapport sévère des sources chrétiennes elles-mêmes !