Pierre Buchoud, un homme hors du commun - France Catholique
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Funérailles catholiques : un temps de conversion
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Pierre Buchoud, un homme hors du commun

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Le père François Casta, que nous avons connu aux Invalides (P.J.)
et qui fut un parachutiste opérationnel, fait l’éloge du colonel Buchoud, chef de corps du 9° RCP, dont il fut l’aumônier de 1956 à 1959. Cette notice a été recueiilie par le fils du colonel, qui est bénédictin (frère Bernard) au monastère de Bonne Espérance à10190 Mesnil Saint-Loup.

Sa position face au putsch n’est pas rappelée. On ne comprend pas qu’un chef de cette valeur ait été éliminé.

M. Faivre.

Né le 15 août 1913 à Epinal dans une famille de militaires (père et 3 frères officiers), Pierre Buchoud entre à St Cyr en 1933 (promotion Albert 1er);
affecté au 35° RI à Belfort, puis au 156° RI de Forteresse, il s’engage au Groupe franc de Faulquemont et succède au capitaine Vernhes, tué au combat.
Il fait des prisonniers. Remarqué par son agressivité et son ascendant, il obtient deux citations dans les combats du 16 au 20 juin 1940.

Il disperse son groupe et se réfugie chez sa grand-mère à St-Dié. Dénoncé par des voisins, il est fait prisonnier le 22 juin et transféré en Autriche.

Promu capitaine en mars 1943, il constitue un mouvement de résistance (liaison radio avec Londres et avec la résistance autrichienne); il organise l’évasion de 144 officiers.

Arrêté et torturé par la Gestapo pendant six mois, il est libéré le 7 avril 1945 par l’armée russe qui lui confie la responsabilité du camp des personnes déplacées.

Il réussit à rapatrier les prisonniers, spécialistes de l’armée française. Il est promu officier de la L.H. avec citation à l’ordre de l’armée.

Volontaire pour les parachutistes, il rejoint son camarade Lefort au 1er BCP ( 25°DAP) en Indochine.

Commandant la 2° compagnie de Choc, il participe au dégagement d’Hanoi de mars à juin 1947;

de juillet à octobre, il pacifie 105 villages du Canal des Rapides, et crée 16 écoles et 4 dispensaires;

Lors de l’opération Léa , il est parachuté le 7 octobre 1947 avec 3 bataillons sur le PC de Ho Chi Minh, récupère des tonnes de matériel et suit la colonne Beaufre de Bac Kan à Hanoi en décembre 1947.

De janvier à avril 1948, il est à Bien Hoa en Cochinchine. De retour au Nord-Vietnam, il participe à l’opération Terminus du 25 au 31 mai et récupère une centaine de partisans Muongs et est grièvement blessé.

Rapatrié le 6 septembre 1948, il est titulaire de 3 citations pour ses qualités d’entraîneur d’hommes.

Nommé chef de corps du 9° RCP, un régiment d’appelés, il est basé à Batna et conduit des opérations de nettoyage dans l’Aurès en 1957.

A la fin de 1957, il participe à la bataille des frontières sous les ordres du général Vanuxem. Après avoir nettoyé l’ouest du barrage, il est le principal artisan de la bataille de Souk -Ahras, du 29 avril au 1er mai 1958.

Se tenant à l’écart des manifestations du 13 mai, il est promu colonel le 27 septembre 1958. Il a obtenu 3 citations à l’ordre de l’Armée,
mettant hors de combat 700 rebelles et récupérant 450 armes de guerres.

Relevé par le colonel Brechignac, il dirige l’école Jeanne d’Arc et forme 500 officiers à la contre-guérilla. Le général Salan apprécie sa très grande classe.

Le 1er décembre 1958, il devient Directeur des études à l’EAI de St Maixent et forme les stagiaires au combat de contre-guérilla.

En janvier 1961, il revient en Algérie. A la tête du Secteur de La Calle, il conduit pacification et garde du barrage.

A l’issue du putsch, il est interné au Fort de l’Est ; acquitté par le Cour de Sûreté de l’Etat, il est cependant rayé des cadres militaires le 16 novembre 1961.

Passionné par le rapprochement Armée-Nation, il suit les activités des associations parachutistes et soutient les anciens détenus.

Revenant à la vie civile, il forme les cadres de l’industrie ( St Gobain et Rhône-Poulenc).

Le père Casta fait l’éloge de sa vie de famille, de sa pratique religieuse, de sa rigueur personnelle et de son sens de l’humain.

Il conclut par une citation de Péguy : Heureux les grands vainqueurs. Paix aux hommes de guerre.
Maurice Faivre, le 10 juillet 2016

P.J.

François Casta. Homme de Dieu… Homme de guerre. Le drame spirituel de l’armée. Préface de J.Trémolet de Villers. Introduction du général de la Presle. Esprit du Livre, 2009, 275 pages, 22€.

Le père Casta, aumônier parachutiste, publie à nouveau le livre sur le drame spirituel de l’armée, qui en 1962 avait été interdit par le cardinal Feltin et par le chef d’état-major Le Pulloch. Il le fait précéder d’un récit de sa vie de prêtre combattant.

Après des études aux séminaires d’Ajaccio et de Lyon, François Casta s’engage comme brancardier au 1er BCP. Il participe à la bataille de Colmar et est grièvement blessé à Kembs en février 1945. Arrivé en Indochine en mars 1947, il est affecté en juillet comme aumônier du bataillon de choc du commandant Clauzon et participe à toutes ses opérations jusqu’en septembre 1949. Lors d’un deuxième séjour au 2ème BCCP, de janvier 1951 à avril 1953, il combat dans toutes les grandes opérations, jusqu’au camp de Na San. Il est blessé en mai 1952.

Après un court séjour à Friedrichshafen, il rejoint en juin 1956 la 25ème Division para en Algérie ; il est aumônier du 2ème REP et du 9ème RCP, où il retrouve le colonel Buchoud. Il est présent à la bataille de Souk-Ahras, à Jumelles et Pierres précieuses. Rapatrié à Calvi en 1960, il est pensionné en 1962. Curé en Corse, il passe une thèse de doctorat et construit deux églises. En 1994, il est pensionnaire aux Invalides. Son parcours militaire exceptionnel lui a valu 9 citations, il a fait 18 sauts opérationnels en Indochine et a reçu la Grand Croix de la Légion d’honneur en 2003.

Le drame spirituel de l’armée est une longue méditation sur l’éthique du soldat chrétien confronté à la guerre révolutionnaire, nouvelle forme de conflit qui conjugue la manipulation des foules, le terrorisme sélectif ou systématique, et les supplices infligés aux prisonniers. La répression de cette barbarie est nécessaire ; la victoire complète dans la bataille d’Alger était légitime, la défense de la civilisation était en jeu. Mais la législation du temps de paix étant inadaptée, des abus ont été commis, moins nombreux que des intellectuels irresponsables ne l’affirment. Le P. Casta s’en est entretenu avec le ministre Robert Lacoste. Citant les colonels Trinquier et Buchoud, il souligne le caractère pervers et inefficace de la torture ; traçant une typologie du tortionnaire, il condamne le comportement des sadiques, des obsédés d’efficacité, des paresseux, des idéalistes et des brutes réalistes, contre lesquels des sanctions ont été infligées, trop bénignes à son sens.

Comment rester humain dans ces conditions inhumaines ? S’appuyant sur les exemples du général de Sonis, du Père Brottier, du capitaine Beaumont et du lieutenant Zirnheld, il montre la parenté entre l’idéal militaire et les vertus chrétiennes. La maîtrise de la force, valeur chrétienne, est aussi la vertu naturelle du militaire. Dans ces conflits de devoirs, le rôle de l’aumônier est important, mais en définitive, le chef militaire est la conscience de son unité. Une prière autographe de Paul Claudel à St Michel, patron des parachutistes célèbre le gendarme de Dieu ! Il revient au chef d’imposer un comportement humain, afin de protéger la population dont il doit assimiler la culture. On ne peut que résumer toute la richesse de cette pastorale, dont le général de La Presle estime qu’elle est toujours actuelle. C’est pourquoi cet ouvrage doit être lu par tous ceux qui sont acteurs ou observateurs des guerres contemporaines .

Maurice Faivre, le 7 mars 2009

MICHEL ROCARD & L’ALGERIE

A l’occasion du décès de M. Rocard, les médias ont rappelé ses prises de position sur l’Algérie.

1. Sa première intervention est celle du Rapport pour la République algérienne associée à la France, rédigé avec Henry Frenay au printemps de 1957.

Reçu à l’ENA en 1956, M.Rocard adhère au Comité social d’étude et d’action pour la paix en Algérie. Il s’oppose à la politique algérienne de Guy Mollet et Robert Lacoste, et anticipe la création en sept.1958 d’un Parti socialiste autonome, précurseur du PSU.

Il estime que l’armée est hostile à la population algérienne, laquelle appuie totalement le FLN ; ceci est une erreur historique en 1958 (fraternisation du 16 mai et avis de Mohammed Harbi).

2. Sa deuxième intervention est la rédaction le 17 février 1959 d’une Note sur les centres de regroupement, à l’attention du Délégué général de la France en Algérie.

Affecté en Algérie en septembre 1958, M.Rocard a été informé par Jacques Bugnicourt, officier SAS à Orléansville, du déplacement des populations dans des centres de regroupement, afin qu’ils ils échappent au contrôle du FLN.

Cette note, diffusée par le Monde du 18 avril, fait état de la situation tragique du million d’Algériens déplacés, qui sont menacés par la famine et par la mortalité infantile élevée (un enfant sur mille tous les deux jours ! ).

M. Rocard n’a visité qu’une quinzaine de Centres de regroupement, principalement dans l’Orléansvillois, alors qu’il y en a déjà plus de mille.

Il souligne qu’un crédit de 100 millions de nouveaux francs a été demandé pour soutenir ces regroupements.

Réalité historique (1).

3. Les médias semblent ignorer les réactions négatives du Délégué général Delouvrier, qui déclare le 16 mai 1959 qu’il n’a pas donné mandat de faire ce rapport, et que la mortalité infantile dans les regroupements est inférieure à ce qu’elle était dans les anciennes mechtas.

En août 1959, Paul Delouvrier écrit à la Ligue des droits de l’Homme que la Note de Rocard constituait une information partielle, et que le but des regroupements consistait à créer 1000 nouveaux villages destinés au développement économique et social de l’Algérie, dans le cadre du plan de Constantine.

Grâce aux regroupements, la scolarisation des jeunes musulmans passe de 15% en 1954 à 40% en 1960 et 65% en 1961.

4. Un compte-rendu sur les centres de regroupement avait été demandé par le général Salan à 5 Inspecteurs généraux, dont la synthèse avait été confiée au préfet R. Martin ( 31 janvier 1959). M. Rocard semble ignorer ces C.R..

D’autre part Eric Westphall, affecté au cabinet Delouvrier, dément l’existence d’un crédit exceptionnel de 100 millions (1 miliiard planifié en 1959).

Affecté à la Direction de l’Agriculture, J. Bugnicourt rédige en 1960 un rapport favorable aux nouveaux centres ruraux (les 1000 villages), sans faire référence au rapport de son ami Rocard.

Le GPRA publie des critiques virulentes des regroupements de populations, qu’il assimile à des camps de concentration; mais les C.R. des wilayas et des mintakas reconnaissent la réalité : « Nous sommes coupés de tout ; la population ne nous suit plus « . C’est une des causes de la révolte de Si Salah.

5. Il est apparu que pour des raisons de sécurité, certains regroupements ont été opérés sans préparation, et que certains n’étaient pas viables (article Macaigne dans le Figaro du 22 juillet 1959). Ils seront interdits par le Délégué général en mai 1960.

Des jugements négatifs ont été publiés ultérieurement par des historiens qui ne les ont pas visités : Bourdieu en 1964, Cornaton en 1967, Ageron en 2000, Kamel Kateb en 2001.

Xavier de Planhol, géographe universitaire, a visité les villages blidéens en 1959-60, et publié un mémoire favorable aux regroupements : le niveau de vie moyen s’est sensiblement relevé; les resserrements ont permis l’instauration d’une vie communautaire et le développement d’infrastructures matérielles et scolaires.

Les autorités militaires reconnaissent à la fois les difficultés rencontrées et les réussites de l’opération en matière de sécurité et de développement (généraux Beaufre, Olié, Gambiez, Parlange, Vanuxem, colonel Trinquier). Le général Rondot, expert du renseignement, fait l’éloge de « l’extraordinaire entreprise de construction humaine  » qu’il a vue dans le centre créé par le colonel de Saint-Simon. Rares sont les avis défavorables des chefs de SAS.
90% des personnes déplacées ont préféré en 1962 rester dans les nouveaux villages, qui selon Bruno Etienne, sont devenus les villages socialistes de la Révolution algérienne.

(1) – Maurice Faivre. Les 1000 villages de Delouvrier. Protection des populations musulmanes contre le FLN ; Esprit du Livre, 2009.

– Xavier de Planhol. Les nouveaux villages de l’atlas blidéen. PUF 1961.

– Archives de Delouvrier (1DV17 – de l’armée de terre (1H1096 – 2576) ,

– de l’outremer (15 CAB /143) – de la Commission de Sauvegarde (F60-3156)

– du CICR (BAG 251 008 012).

– ouvrages des auteurs cités.,