L’Ukraine est engagée dans un périlleux jeu de bascule politique, avec un bras de fer entre le dirigeant néosoviétique Victor Ianoukovitch et une opposition déterminée à le chasser du pouvoir… La raison de ce bras de fer ? Le 21 novembre, l’actuel gouvernement ukrainien a sabordé au dernier moment un accord de libre-échange et de coopération avec l’Union européenne. Cela sur pression de Moscou, faisant miroiter une autre offre de coopération économique chiffrée en « dizaine de milliards de dollars ».
Mais la rupture des liens avec l’Europe compromet l’avenir de toute la classe moyenne ukrainienne, de ses cadres, de son intelligentsia et au-delà, à Kiev et ailleurs… Hier, le président Ianoukovitch annonce son intention de rencontrer Poutine à Moscou pour signer « une feuille de route » commune.
Tout cela met le feu aux poudres. L’opposition libérale proeuropéenne descend massivement dans la rue, malgré des provocations policières et une répression violente. A Kiev, 350.000 manifestants ont défilé dimanche, chiffre sans précédent depuis la fameuse « Révolution orange » de 2004… Des foules demandent la destitution du chef d’Etat ukrainien. Ce matin, des manifestants ont bloqué le siège du gouvernement. Un appel à la grève générale vient d’être lancé. Cet épisode est dangereux, mais l’avenir de ce pays-carrefour est en jeu : beaucoup d’Ukrainiens veulent s’ouvrir à l’Europe pour mener une vie meilleure, plus dynamique, plus libre. D’autres restent attachés au modèle de l’Empire soviétique repeint aux couleurs d’une économie de marché mais sous un pavillon autocratique kremlinophile.
Ce peuple a subi voici 80 ans l’ethnocide du « Holodomor » ordonné par Staline en 1932-33 qui faucha plus de 7 millions de paysans ukrainiens, victimes d’une famine sciemment organisée par le communisme. A l’époque, Kiev était ville interdite. Pauvre Ukraine, ton terrible destin est souvent ignoré en Occident. Mais il demeure un enjeu digne d’être connu et pour le moins respecté.
