Paternité – et maternité - spirituelles - France Catholique
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« Ô Marie conçue sans péché »
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Paternité – et maternité – spirituelles

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Je suis bénie d’avoir de nombreux pères : mon père biologique, mon beau-père, et de nombreux amis prêtres dont je chéris l’amitié depuis très longtemps. Je suis bénie de la même manière avec les mères : ma mère biologique, ma belle-mère, et de très chères sœurs et mères religieuses avec qui j’ai un vrai lien d’amitié.

Parfois mes enfants (qui ne sont plus des gamins) me taquinent : « La plupart de vos amis sont des prêtres et des nonnes, pères et mères, sœurs et frères. » Ils ont raison ; j’ai obtenu des diplômes d’une université pontificale dans les années quatre-vingt-dix, et c’est à Rome que j’ai forgé bon nombre de mes amitiés de toujours avec des pères (et des sœurs, dont certaines sont devenues mères supérieures de leurs ordres).

Pendant le début des années quatre-vingt-dix, peu de femmes laïques étudiaient la théologie et l’histoire de l’Église dans les universités pontificales de Rome, en particulier à l’Institut pontifical oriental, couramment connu sous le nom de l’Orientale, qui fait partie du consortium de l’Université Grégorienne Pontificale. Il y avait des femmes, mais la plupart étaient des religieuses.

Nous étions la génération Jean-Paul II : des jeunes de tous les coins du monde, Orient et Occident. Il y avait des étudiants qui avaient vécu sous la terrible dictature communiste en Europe de l’est, qui avaient reçu le sacrement de l’Ordre en secret comme les premiers chrétiens des catacombes. Ils avaient une immense gratitude que leurs peuples aient gagné la liberté et maintenu une foi catholique vibrante et durement éprouvée.
Après leur diplôme, la majorité de mes camarades de classe – frères et sœurs – retournait en Inde, au Liban, en Pologne, en Géorgie, en Slovénie, en Slovaquie, en Russie et autres, pour servir leurs communautés et ordres religieux. Ils sont fiers d’être pères et mères pour le peuple de Dieu.

Bon, c’était la génération JPII de pères et de sœurs, qui voulaient être appelés par leur titre – Père A. et Sœur Z. Même si je reste proche de beaucoup d’entre eux, je ne me suis jamais risqué à les appeler par leur nom et je pense qu’il faut qu’il en soit ainsi. Il y a tant dans leurs titres.
Je m’explique.

Les prêtres catholiques, après l’ordination, deviennent les pères adoptifs de leurs communautés. En fait, le prêtre agit in persona Christi capitis ainsi que le stipule le Catéchisme de l’Église catholique (CEC 1548). Ils sont les représentants de Dieu le Père sur la terre, pères spirituels du troupeau ; les prêtres initient la foi dans la vie chrétienne : ils nous baptisent, nous confessent, nous marient et nous enterrent.

C’est un engagement à vie, différent de celui de la paternité biologique, mais un engagement tout aussi sérieux, qui vient avec le sacrement de l’ordre et les vœux de célibat et de chasteté. C’est pourquoi saint Paul disait : « Même si vous avez d’innombrables guides vers le Christ, vous n’avez pourtant pas de nombreux pères, parce que je suis devenu votre père en Christ par l’Évangile. » (I Co 4-, 15).

C’est une sérieuse responsabilité donnée aux prêtres par notre Seigneur, c’est pourquoi St Jean Chrysostome écrivait dans Sur le sacerdoce : « Un prêtre doit être sensé, avoir un discernement pénétrant et posséder des yeux dans toutes les directions, comme quelqu’un qui ne vit pas pour lui-même mais pour une grande multitude.

*

Chers prêtres-pères, vous n’êtes pas des « oncles » ni appelés par vos prénoms. Depuis les premiers temps, l’Église utilise le terme de « Père » pour les chefs religieux. Les successeurs immédiats des Apôtres sont appelés les Pères apostoliques. Les Pères de l’Église sont ceux qui ont vécu immédiatement après les Apôtres d’origine pendant les huit premiers siècles du christianisme. De nombreux Pères de l’Église étaient évêques : Ambroise à Milan, Basile le Grand à Césarée, Jean Chrysostome archevêque de Constantinople, Clément à Rome, Ignace à Antioche.

Beaucoup d’autres partageaient ces lourdes charges mais n’ont jamais abandonné leur premier titre : Père. Ils étaient évêques mais n’ont jamais cessé d’être les pasteurs de la communauté locale de l’Église et professeurs de la foi : ils étaient à la fois évêque et « Père ». Les supérieurs de monastères sont appelés Père-abbé (et Mère-abbesse), une paternité céleste, la plus pure et la plus angélique parmi les paternités, ainsi que l’écrivait St Jean Chrysostome (là encore dans Sur le sacerdoce) :

« Parce que la charge sacerdotale est évidemment exécutée sur la terre, mais qu’elle a rang parmi les ordonnances célestes, et très naturellement ainsi : parce qu’aucun homme, ni ange, ni archange, ni aucune autre puissance créée, mais le Paraclet Lui-même a institué cette vocation, et persuadé des hommes de représenter le ministère des anges tout en demeurant dans la chair. C’est pourquoi le prêtre consacré doit être aussi pur que s’il était au Ciel au milieu de ces puissances. »

Il avait un profond sens de la dignité et de l’importance de la charge de prêtre, et des responsabilités du prêtre pour les âmes individuelles ; à tel point qu’il ne se considérait pas lui-même comme digne de cette charge.
En cet été de crise et de scandale dans l’Église (d’abus sexuels, d’abus de pouvoir, et de dissimulations), revoir l’engagement pour toujours de la paternité spirituelle (qui, comme le célibat et la chasteté, vient avec le sacrement de l’Ordre) pourrait être instructif et curatif. La chasteté parfaite, qui est consacrée au service de Dieu, et la paternité spirituelle, sont sans doute parmi les dons précieux que Jésus a faits à la société qu’Il a établie et dont nous avons hérité.

Les prêtres doivent être des pères qui enseignent et nourrissent la foi, interrogent et corrigent, pardonnent et soutiennent leurs fils et filles spirituels. Les prêtres ne devraient jamais avoir peur d’être appelés Père. Tout comme la paternité physique, la paternité spirituelle est un engagement et une responsabilité pour toujours.

Prêtres : votre vie est incomplète sans vos fils et filles spirituels ; nos vies sont incomplètes sans nos pères spirituels. Ainsi que le disait le pape François dans une de ses homélies (26 juin 2013, ndt), la paternité spirituelle « est une grâce que les prêtres doivent implorer : la grâce de la paternité pastorale, de la paternité spirituelle. Bien sûr, même si nous commettons tous des péchés, voire beaucoup de péchés, ne pas avoir de fils et de filles spirituels, ne pas devenir des pasteurs, est équivalent à vivre une vie qui n’atteint pas son but mais s’arrête à mi-chemin. »

Chers prêtres, restez à votre poste ! Soyez des pères.

*Image: La Confession par Giuseppe Molteni, 1838 [Gallerie D’Italia, Piazza Scala, Milan]

Ines Angeli Murzaku est professeur de l’histoire de l’Église à l’Université de Seton Hall. Ses recherches étendues sur l’histoire du christianisme, du catholicisme, des ordres religieux et de l’œcuménisme ont été publiées dans de nombreux scientifiques et cinq livres. Son dernier ouvrage, édité et traduit avec Raymond L. Capra et Douglas J. Milewski, articles est The Life of Saint Neilos of Rossano (La vie de Saint Neilos de Rossano), qui fait partie de la Dumbarton Oaks Medieval Library. Le Dr. Murzaku est souvent en vedette dans les media nationaux and internationaux, journaux, radio et entretiens télévisés, et blogs.