La naïade blonde en maillot de bain rouge du feuilleton Alerte à Malibu, dont le décolleté a encore affolé l’Assemblée nationale française, en janvier dernier, quand elle a été appelée en renfort par les Verts dans leur combat contre le gavage des oies, est de retour. Son nouveau combat est moins politiquement correct puisqu’elle part en guerre contre rien de moins que la pornographie !
A 49 ans, Pamela Anderson, dont les frasques ont nourri la presse « people » durant un quart de siècle, et dont le magazine Playboy étalait la splendide nudité sur sa couverture il y a si peu de temps encore, vient en effet de cosigner une tribune avec un rabbin dans le Wall Street Journal. Elle nous appelle à sortir de « l’addiction du porno qui a un effet corrosif sur l’âme d’un homme et sur sa capacité à être un mari, et par extension, un père. […] C’est un danger public d’une gravité sans précédent étant donné que la pornographie est de nos jours disponible gratuitement, qu’on peut y accéder anonymement et qu’elle est aisément répandue. Combien de familles vont en souffrir ? Combien de mariages vont imploser ? Combien d’hommes talentueux vont abîmer leurs plus belles relations et leur carrière pour un bref frisson d’onanisme ? » Selon la traduction donnée par le magazine à scandales Voici, le sex-symbol américain nous appelle à « nous éduquer nous-mêmes ainsi que nos enfants pour comprendre que le porno, c’est pour les nuls, un pis-aller ennuyeux, ravageur et qui constitue une impasse, réservé aux gens trop paresseux pour cueillir les nombreuses récompenses d’une saine sexualité ».
Faut-il sourire de cette révélation tardive transmise par des médias d’une rare vulgarité ? Ou bien se réjouir que cette question soit enfin abordée dans la presse que tout le monde lit, au moins chez son coiffeur ou chez son dentiste… Car l’addiction à la pornographie, cela ne concerne pas que des adolescents boutonneux ou des célibataires endurcis… C’est un phénomène de société qui emplit les cabinets des psychologues, de cadres que leur addiction met en danger professionnel et de maris dont la famille risque en effet d’être détruite…
Les catholiques ne sont pas épargnés. En témoigne la parution ces jours-ci d’un « parcours » Libre pour aimer, sortir de la pornographie, édité par les éditions de l’Emmanuel. C’est l’occasion de rappeler que le Christ n’est pas venu pour les bien-portants mais pour les éclopés et que l’Église a vocation à appeler à elle tous ceux qui ne savent pas vivre et à qui elle veut redonner espoir et équilibre.
Ce parcours en 40 leçons — 40 jours comme un Carême — est un assemblage de témoignages, d’historiettes, de conseils… pas toujours très originaux mais, justement, il a ainsi le mérite de dédramatiser la situation sans pour autant en cacher les redoutables dangers. Il y a un effort de présentation louable et une volonté de positiver puisqu’il s’agit de s’en sortir. Les dessins d’Ixène sont plutôt géniaux. Ce manuel veut ratisser large : même les non-croyants, même les isolés. Mais on pressent qu’il marchera mieux, comme tout parcours psychologique (pour maigrir, pour être heureux au travail, pour réussir son couple…) auquel il s’apparente et qu’il peut compléter utilement, si on se trouve un référent quelconque. La méthode conseille d’ailleurs de prendre un parrain pour être témoin des progrès accomplis, mais à des conditions peut-être un peu illusoires en dehors d’un milieu chrétien. à moins de rencontrer un groupe genre Alcooliques anonymes…
Le parcours a été conçu par le père Éric Jacquinet, prêtre de l’Emmanuel, qui s’est entouré de thérapeutes et de personnes ayant été libérées de la pornographie. Il a été testé durant différentes sessions pendant trois ans. Tel quel, il se laisse lire agréablement et donne des informations utiles.
Mais c’est aussi un parcours très structuré au plan pédagogique,
en faisant appel à l’anthropologie chrétienne dans le contexte spécifique des difficultés propres à un comportement addictif dans le champ de la sexualité.
Il fait d’abord travailler la personne sur la finalité et sur l’espérance, quand l’addiction produit de l’errance et de la désespérance. Puis il fait travailler sur la vérité, quand l’addiction est une culture de mensonge. Il fait travailler sur la connaissance de soi et les conséquences de la pornodépendance dans toutes les dimensions de son être, quand l’addiction engendre le mépris de soi et le déni.
Le parcours continue ensuite sur les armes du combat spirituel, parce que les ressorts de la pornographie sont proprement démoniaques : idolâtrie qui cherche à détruire l’intériorité, poids de honte qui isole, désespérance qui opprime, culpabilité qui éloigne de la miséricorde divine …
Le parcours fait enfin travailler à une reconstruction des relations fondamentales de la personne.
Sa mise en œuvre par les personnes qui se sentent directement concernées réclame donc un fort investissement. ■
Frédéric AIMARD
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